M. Timothée Houssin appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur l'insatisfaction des maires quant au respect des pouvoirs de police inhérents à leur fonction. L'article 16 du code de la procédure pénale et l'article L. 2122-31 du code général des collectivités territoriales assurent la qualité d'officier de police judiciaire aux maires qui partagent, également, cette charge avec leurs adjoints. En zone rurale, ce statut est d'une importance particulière parce qu'il garantit l'existence et la permanence, sur des territoires ne disposant pas de police municipale, d'une autorité capable de sanctionner tout comportement dérogeant au strict respect de la loi. Seulement, nombre de maires signalent un non-respect ou une absence de continuité entre l'action de verbalisation à laquelle ils procèdent et la condamnation effective du contrevenant. Cette rupture provoque chez les maires, les premières « figures démocratiques » des Français, à la fois une impression d'injustice, d'absence finale d'une justice dont ils s'étaient faits les garants et les juges et un sentiment d'irrespect de leur fonction, dans la mesure où celle-ci est censée garantir l'autorité dont ils se trouvent finalement amputés. Faute de suites et conséquences, certains d'entre eux renoncent désormais à agir et procéder à des verbalisations qu'ils pourraient juger nécessaires ; d'autres souhaitent continuer mais ont fait part de leur assurance de ne voir aucune suite à leurs actions. En conséquence, il demande au Gouvernement de bien vouloir présenter les causes de cette absence de continuité et les actions qu'il compte mettre en place afin de résoudre cette problématique.
Le ministère de la Justice est pleinement engagé dans la lutte contre la délinquance du quotidien. Les maires, en tant que premiers relais de la République dans les territoires, sont des interlocuteurs privilégiés des parquets. Lorsque les faits portés à la connaissance du procureur de la République constituent une infraction pénale, l'article 40-1 du code de procédure pénale prévoit que celui-ci a l'opportunité des poursuites et décide ainsi s'il est opportun d'engager des poursuites, de mettre en œuvre une procédure alternative ou de classer l'affaire. Néanmoins, le ministère de la Justice est pleinement engagé pour renforcer les relations entre les parquets et les élus, spécialement les maires. Dans le prolongement de la circulaire de politique pénale générale du 1er octobre 2020, la circulaire du 15 décembre 2020 relative à la justice de proximité invitait les procureurs généraux et procureurs de la République à poursuivre le renforcement des échanges avec les collectivités locales et les maires, afin de favoriser une bonne circulation de l'information et une institutionnalisation des échanges, une meilleure articulation avec les forces de police municipale, les maires étant impliqués dans le traitement global des problématiques de sécurité. Elle préconisait également une amélioration de l'articulation avec les forces de police municipale dans le cadre des conventions de coordination. Elle s'inscrit dans la continuité des directives données par le ministère de la Justice. En effet, la circulaire du 29 juin 2020 de présentation des dispositions des articles 42, 59 et 72 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 invitait déjà les parquets à développer les relations partenariales avec les élus en organisant des réunions spécifiques dans le cadre d'une journée de présentation, à l'occasion du renouvellement général des conseils municipaux ou lors de l'assemblée générale des maires des départements. Elle rappelait les relations étroites que les procureurs doivent entretenir avec les maires de leur ressort, afin notamment de présenter aux élus les outils juridiques mis à leur disposition, ainsi que leurs prérogatives, au travers par exemple du signalement d'infractions, du dépôt de plainte au nom de la commune, ou encore du rappel à l'ordre instauré par l'article L132-7 du code de la sécurité intérieure en cas d'atteinte au bon ordre, à la sûreté, ou la salubrité publique. Elle s'accompagne de fiches techniques notamment relatives aux attributions du maire en matière de prévention de la délinquance et en matière de police judiciaire. Il y est notamment rappelé que les prérogatives qui s'attachent à leur qualité d'officier de police judiciaire, de même que les pouvoirs de verbalisation des agents de police municipale, en leur qualité d'agents de police judiciaire adjoints visés à l'article 21 du code de procédure pénale, sont distincts des pouvoirs de police administrative que le maire tire des dispositions de l'article L. 2212-2-1 du code général des collectivités territoriales, qui leur permettent de prononcer des amendes administratives en cas de non-respect de leurs arrêtés de police. Il est également rappelé que l'exercice effectif de ces prérogatives doit respecter les conditions générales prévues par le code de procédure pénale, et notamment s'exercer sous la direction du procureur de la République, conformément à l'article 12 du CPP ainsi que dans les limites territoriales où ils exercent leurs fonctions. Cette circulaire rappelle également que la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique a renforcé l'obligation d'information du maire par le procureur de la République, dans le respect du secret de l'enquête et de l'instruction. Les dispositions de l'article L. 132-3 du code de la sécurité intérieure prévoient en effet désormais que « le maire est systématiquement informé, à sa demande, par le procureur de la République des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent des infractions mentionnées au premier alinéa du présent article. Il est également systématiquement informé, à sa demande, par le procureur de la République, des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent des infractions constatées sur le territoire de sa commune par les agents de police municipale en application de l'article 21-2 du code de procédure pénale et par les gardes champêtres en application de l'article 27 du même code. Le maire est systématiquement informé par le procureur de la République des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent des infractions signalées par lui en application du second alinéa de l'article 40 du même code ». Le renforcement du dialogue entre les parquets et les maires, en ce qu'il participe d'une meilleure articulation des actions de chacun, constitue un des objectifs réaffirmé par la circulaire de politique pénale générale du 20 septembre 2022, laquelle s'inscrit dans la continuité des travaux conduits par le groupe de travail sur les relations entre les parquets et les élus, initié par le garde des Sceaux, dont le rapport a été déposé le 8 mars 2022. La circulaire de politique pénale générale du garde des Sceaux du 20 septembre 2022 encourage à cet égard en outre la mise en œuvre d'une politique pénale territorialisée et souligne la nécessité pour les parquets de délivrer des réponses rapides, fermes et visibles contre toutes les atteintes dont ces derniers sont victimes. Le ministère de la Justice agit ainsi pour favoriser le renforcement des relations entre les parquets et les maires, au service d'une articulation appropriée des actions de chacun, dans le respect des prérogatives de chacun.
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