M. François Ruffin interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la dérégulation du fret aérien. Se déroule en ce moment, à Montréal, la 41e assemblée générale de l'Organisation de l'aviation civile internationale. Des propositions sont discutées, soumises à l'approbation des pays, concernant la « 7e liberté », la dérégulation du fret aérien : jusqu'alors, seule une compagnie ayant des attaches en Europe peut transporter des marchandises entre Paris et Berlin. Seule une compagnie ayant des attaches en Europe ou aux États-Unis d'Amérique peut transporter des marchandises entre Paris et New-York. Seule une compagnie ayant des attaches en Europe ou au Brésil peut transporter des marchandises entre Paris et Brasilia. Etc. Si la « 7e liberté » était acceptée, toutes les compagnies pourraient transporter des marchandises sur toutes les lignes. Lors des assemblées générales précédentes de l'OACI, la France s'est toujours opposée à cette mesure. Notamment pour éviter un dumping social qui a déjà cours. Mais s'y ajoute aujourd'hui, avec acuité, l'impératif climatique. M. le ministre a lui-même déclaré que le secteur devait s'engager fortement dans la transition écologique. Or, évidemment, déréguler le fret aérien, c'est promouvoir le low-cost, c'est multiplier les vols. C'est faciliter un grand déménagement du monde, qui ne se fera plus seulement sur les mers, avec les porte-containers, mais aussi dans les airs. C'est promouvoir un mode de transport, l'avion, fortement émetteur de gaz à effet de serre et provoquant du forçage radiatif. Comment expliquer, dès lors, que ces jours-ci, la France ait changé de position ? Que M. le ministre ne s'oppose plus à cette dérégulation ? Qu'il laisse faire ? Qu'il se retranche dans la neutralité ? Il lui demande donc s'il entend peser pour que l'Europe s'oppose à la dérégulation du fret aérien, pour que le recours à l'avion dans le transport des marchandises demeure fortement encadré et qu'il soit en vérité découragé, exceptionnel.
La libéralisation du fret aérien est un sujet récurrent, discuté tous les 3 ans, lors des assemblées de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), certains pays promouvant l'adoption de dispositions sur la 7eme liberté du ciel, qui permettraient à une compagnie aérienne d'un pays d'embarquer et de livrer du fret entre deux autres pays, pourvu que ces trois pays en conviennent. Des projets d'accords internationaux favorisant une libéralisation large du marché du fret ont ainsi déjà été proposés dans le passé. A l'automne 2022, lors de la 41ème assemblée triennale de l'OACI, les États d'Amérique latine, menés par le Venezuela et à l'appui de l'expérience menée pendant la crise de la covid-19, ont de nouveau souhaité relancer ce débat. La France a toujours été opposée à une mesure de libéralisation générale du fret aérien. Elle reste attachée à négocier directement les règles concernant le fret dans le cadre d'accords aériens bilatéraux ou européens. Elle a pour objectif que ces accords assurent des conditions équitables pour les transporteurs y compris au regard de considérations sociales et environnementales, et promeuvent le développement du pavillon français dans la compétition mondiale. Cette méthode permet bien de répondre aux besoins d'approvisionnement de la France y compris en situation de crise. Ce fut le cas, en 2020, pour permettre à des transporteurs étrangers d'importer des masques et du matériel médical de Chine aux côtés des compagnies aériennes européennes. La France n'a ainsi pas souhaité s'associer aux travaux qui seront conduits au sein de l'OACI dans l'éventualité de l'élaboration d'un accord international sur la libéralisation du transport du fret et n'a pas à ce jour l'intention d'adhérer à un tel accord si ces travaux devaient aboutir.
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