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Philippe Lottiaux
Question N° 2083 au Ministère de la justice


Question soumise le 11 octobre 2022

M. Philippe Lottiaux attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des personnes ayant divorcé avant la loi du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce et plus spécifiquement sur la transmission de la dette des débiteurs à leurs héritiers. En cas de divorce, le code civil prévoit une prestation compensatoire afin qu'elle soit versée à l'époux le moins aisé. Or sous certaines conditions prenant en compte l'âge et l'état de santé du créancier, cette prestation compensatoire peut être versée sous la forme d'une rente viagère. Au décès du débiteur, la prestation compensatoire n'entraîne pas l'arrêt de son versement. Elle constitue une dette dans sa succession et l'obligation de paiement est alors transmise à ses héritiers. Si ceux-ci acceptent la succession, ils sont contraints de verser la prestation compensatoire à la place de l'ex-époux ou épouse décédé. Pour échapper à cette obligation il convient aux héritiers de renoncer à l'héritage. Cela concerne actuellement encore environ 50 000 chefs de familles, qui ont en moyenne plus de 80 ans. Depuis la loi du 26 mai 2004 relative au divorce, les personnes ayant divorcé avant l'année 2000 ont certes la possibilité de demander au juge civil une révision ou une suppression de la rente viagère de prestation compensatoire. Le paiement de la prestation compensatoire est aussi depuis lors prélevé sur la succession et dans la limite de l'actif successoral et non sur les biens propres des héritiers. Néanmoins, il apparaît assez injuste, aux yeux des personnes concernées, de devoir honorer une dette qu'ils n'ont pas contractée car son paiement reste une charge financière importante pour la famille du défunt. Le faible nombre de demandes en révision ou suppression formulées devant les juges semble mettre en avant le manque de lisibilité des réformes de 2000 et 2004. Il faut d'ailleurs préciser que la révision ou la suppression ne sont possibles que lorsque le maintien de la prestation en l'état procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard de l'âge et l'état de santé du créancier, ce qui réduit considérablement les cas de figure. Il lui demande s'il peut être envisagé de modifier l'article 280 du code civil afin de supprimer la dette au décès du débiteur pour les divorcés d'avant 2000.

Réponse émise le 28 février 2023

En vertu de l'article 270 du code civil, la prestation compensatoire vise à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux. Cet article poursuit un but légitime de protection du conjoint dont la situation économique est la moins favorable au moment du divorce (Cass. 1re civ., 30 nov. 2022, n° 21-12.128). Aussi, au décès de l'époux débiteur, le paiement de la prestation compensatoire se réalise sur le patrimoine du défunt. Quelle que soit sa forme, le montant de la prestation compensatoire est prélevé sur la succession (article 280 al 1 du code civil). Conformément au principe de la division des dettes posé par les articles 873 et 1309 du code civil, chacun des héritiers est tenu, dans la limite de sa part successorale, au paiement de la dette de prestation compensatoire. Le prélèvement s'effectuant dans la limite de l'actif successoral, les héritiers ne sont donc pas tenus personnellement au paiement de la prestation compensatoire. En cas d'insuffisance, le paiement est supporté par tous les légataires particuliers, proportionnellement à leur émolument, sous réserve de l'article 927 du code civil (article 280 al 1 du code civil). Par dérogation à l'article 280 du code civil, les héritiers peuvent décider ensemble de maintenir les formes et modalités de règlement de la prestation compensatoire qui incombaient à l'époux débiteur, en s'obligeant personnellement au paiement de cette prestation. Dans ce cas, les héritiers bénéficient des mêmes actions qu'avait le débiteur pour demander la révision de la prestation compensatoire. Si la prestation compensatoire consiste dans le versement d'un capital, l'héritier, en cas de changement important de sa situation, peut demander un rééchelonnement des versements indexés (article 275, al. 2, par renvoi de l article 280-1, al. 2 du code civil). La prestation compensatoire fixée sous forme de rente peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties, sans que la révision puisse avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge (article 276-3, par renvoi de l'article 280-1, al. 2 du code civil). La substitution d'un capital à la rente peut être demandée par un héritier ou le créancier dans les termes de l'article 276-4 du code civil. Au regard des dispositions existantes, lesquelles permettent d'assurer un juste équilibre entre les intérêts des différentes parties concernées, le ministère de la Justice n'envisage pas de modifier l'article 280 du code civil.

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