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Laurent Alexandre
Question N° 1925 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 4 octobre 2022

M. Laurent Alexandre souhaite interpeller M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la situation concrète des Ukrainiens accueillis en France. Conformément à la décision d'exécution n° 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022, les Ukrainiens sont des personnes déplacées, au sens de la directive n° 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001. Ce statut leur ouvre le droit à un séjour sur le territoire français d'une durée de trois ans, avec l'octroi de titres de séjours renouvelables tous les six mois. Ainsi, les Ukrainiens présents sur le territoire peuvent exercer « une activité salariée ou non salariée », « participer à des activités telles que des actions éducatives », « des cours de formations professionnelles », ou encore suivre des « stages en entreprise » (Directive n° 2001/55/CE, Art. 12). Les enfants ukrainiens peuvent être scolarisés dans les écoles (Art. 14) et le sont. M. le député salue les effets du statut de déplacé, qui ne peuvent qu'être positifs pour l'intégration et la reconstruction de populations qui ont souffert et continuent de souffrir de la guerre dans leur pays d'origine. De plus, il permet d'apporter des réponses réactives à une situation de crise grave et soudaine. Et pourtant, tous les Ukrainiens sur le sol français, qui paient des impôts directs ou indirects et qui pour certains d'entre eux travaillent, n'ont même pas le droit aux aides les plus élémentaires permises par son système social qu'ils contribuent pourtant à financer. Pas de droit aux allocations familiales pour aider à financer la rentrée scolaire des familles ukrainiennes, ni de prime d'activité pour ceux qui exercent un emploi rémunéré au Smic. M. le député est pour le moins très étonné de cette situation. C'est pourquoi il se demande s'il ne serait pas opportun, sept mois après le déclenchement de la guerre en Ukraine, de réévaluer la situation. La directive n° 2001/55/CE pose, dans son introduction et son article 3, que le statut de protection temporaire accordé aux populations n'entre pas en concurrence avec le statut de réfugié défini dans la Convention de Genève du 28 juillet 1951. Selon l'article 1 de cette convention, est réfugiée « toute personne craignant avec raison d'être persécutée du fait (...) de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social (...), se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ». Les bombardements constants de l'armée russe, ou encore la tragique mise au jour du charnier d'Izioum récemment ne laissent aucun doute quant au danger encouru par les civils ukrainiens sur leur sol. L'octroi du statut de réfugié aux Ukrainiens présents en France leur permettrait notamment l'obtention d'un titre de séjour de dix ans, ainsi que des droits équivalents à ceux des compatriotes. En effet, des remontées de terrain sur certaines difficultés rencontrées par des Ukrainiens vivant sur la circonscription de M. le député l'ont alerté. Certains d'entre eux se sont très bien adaptés à la vie en France et ont obtenu un travail. Leurs enfants sont scolarisés dans des écoles, tandis que d'autres suivent activement des cours de français. Et pourtant, au moment de la rentrée scolaire, ces familles ne peuvent prétendre au versement des allocations familiales. Les Ukrainiens de la circonscription qui travaillent ne peuvent prétendre à la prime d'activité, quand bien même ils exercent un emploi rémunéré à moins de 1 806 euros nets par mois. La caisse des allocations familiales du département s'est contentée de répondre que le Gouvernement n'ouvrait pas le droit à ces prestations pour les Ukrainiens cette année. De la même manière, certains Ukrainiens auraient l'opportunité de signer un CDI, mais leurs patrons ainsi qu'eux-mêmes sont hésitants, car ils ne savent pas s'ils ont le droit légal de le faire. La préfecture contactée n'a pas été en mesure de répondre à leur question. M. le député considère cette situation de flou artistique inacceptable. D'autant plus, que de plus en plus de problèmes de cette nature risquent se multiplier dans le pays. Des populations déjà meurtries et accueillies sur le territoire national au nom de la solidarité internationale devraient pouvoir a minima avoir de la visibilité sur leur avenir et bénéficier du système français de solidarité. Il en va de l'honneur de la France, pays des droits de l'homme et de sa tradition d'accueil. Ainsi, il lui demande s'il compte prendre des mesures concrètes pour améliorer les conditions de vie des Ukrainiens sur le sol français, en leur permettant notamment un accès équitable aux prestations sociales qu'ils participent à financer, comme ils en ont le droit légitime.

Réponse émise le 22 novembre 2022

Le Gouvernement a décidé, le 14 avril 2022, de la prise en compte, pour le calcul de certaines prestations familiales, de la charge des enfants mineurs des allocataires titulaires d'une autorisation provisoire de séjour (APS) portant la mention “bénéficiaire de la protection temporaire” et ce, alors même que ces enfants ne remplissent pas la condition relative à la régularité de leur séjour en France en application de l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale. Parmi ces prestations pour lesquelles la charge de ces enfants peut être prise en compte figurent bien les allocations familiales. Il convient de souligner, à cet égard, que cette évolution est d'ailleurs, bien que le Gouvernement ait fait preuve de réactivité, d'application rétroactive depuis l'arrivée en France des enfants. Par une lettre datée du 21 avril 2022, la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) a indiqué l'ensemble du réseau départemental les modalités pratiques d'ouverture des droits à ces différentes prestations ainsi que l'accompagnement adapté à ce public. La CNAF a également insisté sur le caractère prioritaire de ces dossiers. 5 806 nouveaux foyers étaient couverts par des prestations familiales en août 2022, pour un total de plus de 14 000 nouveaux foyers couverts depuis le mois de mai 2022. Le département de l'Aveyron couvre plus de 250 personnes, pour un montant de prestations versées d'environ 30 000 euros. La prime d'activité est également octroyée aux bénéficiaires de la protection temporaire. Néanmoins, ces interrogations ne relèvent pas du périmètre de compétences du ministère de l'intérieur et des outre-mer. Il vous appartient, pour davantage de précisions, d'en saisir les ministères compétents. Il n'existe aucun obstacle juridique empêchant les étrangers déplacés d'Ukraine de solliciter l'asile en plus ou en lieu et place de la protection temporaire, afin de prétendre au statut de réfugié notamment. En effet, l'article L. 581-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) dispose que « Le bénéfice de la protection temporaire ne préjuge pas de la reconnaissance de la qualité de réfugié au titre de la convention de Genève du 28 juillet 1951. ». Ces mêmes dispositions font simplement obstacle au cumul des deux statuts : par exemple, un étranger bénéficiaire de la protection temporaire qui sollicite également l'asile ne peut obtenir deux fois le versement de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA). La protection temporaire est un mécanisme d'urgence qui vise à fournir une protection immédiate et collective à des personnes déplacées, au demeurant similaire par certains aspects, à celle accordée par le statut de réfugié, afin d'alléger la pression sur les systèmes de demande d'asile nationaux qui ne seraient pas en capacité d'absorber une telle demande. Par ailleurs, les bénéficiaires de la protection temporaire disposent d'un accès au marché de l'emploi qui est total. Certaines dispositions réglementaires du CESEDA ont été modifiées en ce sens afin de permettre la meilleure insertion possible, notamment professionnelle, des populations déplacées sur le territoire. Ainsi, le décret n° 2022-468 du 1er avril 2022 permet aux bénéficiaires de la protection temporaire de travailler sans solliciter d'autorisation de travail auprès d'une plateforme de main d'œuvre étrangère. Les conditions permettant l'exercice d'une activité professionnelle en France ont donc été assouplies pour les bénéficiaires de la protection temporaire. De plus, l'instruction interministérielle N°DGEFP/DGEF/2022/109 du 14 avril 2022 relative à l'insertion professionnelle des bénéficiaires de la protection déplacés d'Ukraine a élaboré un plan d'actions à réaliser pour ce faire : identifier le plus en amont possible les personnes souhaitant travailler, au besoin directement depuis les centres d'hébergement et proposer des formations linguistiques par exemple. Il n'y a donc aucune difficulté à ce que les employeurs proposent la conclusion d'un contrat à durée indéterminée (CDI) aux bénéficiaires de la protection temporaire.

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