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Élise Leboucher
Question N° 1924 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 4 octobre 2022

Mme Élise Leboucher appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la situation des étudiants étrangers, notamment africains, ayant fui l'Ukraine et ayant trouvé refuge en France. L'invasion de l'Ukraine par la Fédération de Russie a eu de graves répercussions humanitaires, entraînant notamment l'exil de centaines de milliers de personnes du pays. Afin de répondre aux besoins de protection et d'accompagnement des populations déplacées, le Conseil de l'Union européenne a actionné le dispositif exceptionnel de protection temporaire prévu à l'article 5 de la directive n° 2001/55/CE du 20 juillet 2001. Dans le cadre de ce dispositif, la protection temporaire s'applique aux ressortissants ukrainiens, aux ressortissants de pays tiers ou apatrides bénéficiant d'une protection internationale ou nationale équivalente en Ukraine et aux ressortissants de pays tiers ou apatrides titulaires d'un titre de séjour permanent en Ukraine et ne pouvant pas rentrer dans leur pays ou région d'origine, ainsi qu'aux membres de la famille d'une personne relevant de l'un des cas précédents sous certaines conditions. Bien que la directive offre la possibilité aux États membres d'offrir une protection plus élargie et d'étendre la protection temporaire à d'autres catégories de population, notamment les ressortissants de pays tiers titulaires d'un titre de séjour temporaire en Ukraine, il est regrettable de constater que la France n'a pas saisi cette opportunité de montrer son hospitalité et sa solidarité, contrairement à d'autres pays comme le Portugal ou l'Espagne. Cela a mené à une situation désastreuse pour de nombreux ressortissants de pays tiers, notamment de pays africains, ayant fui l'Ukraine. Ainsi, au-delà du traumatisme de la guerre et de l'exil, ces personnes ont fait et continuent de faire face à la discrimination et au racisme, écopant ainsi d'une double peine. Ne pouvant bénéficier d'un titre de séjour, elles se trouvent privées des garanties de protection et de soutien les plus élémentaires (logement, soutien psychologique et intégration dans le marché du travail ou l'enseignement supérieur...) et confrontées à l'indifférence, la précarité et la clandestinité forcée. Il convient ici de saluer le travail et l'engagement des associations et organisations non gouvernementales qui ont mis en place des systèmes de solidarité. Cet état de fait n'exonère néanmoins pas le Gouvernement de ses responsabilités. Parmi cette catégorie de population, la question des étudiants étrangers, notamment africains, est particulièrement préoccupante. Selon l'Union des étudiants exilés et France Fraternités, près de 1 000 étudiants se sont retrouvés du jour au lendemain dans l'impossibilité de poursuivre leurs études et leur projet professionnel. Ils se sont également retrouvés menacés par le risque d'expulsion vers des pays où beaucoup ne peuvent poursuivre leurs études. Bien que le ministère de l'intérieur ait mis en place un moratoire sur les obligations de quitter le territoire français (OQTF) jusqu'à la rentrée universitaire et que le ministère de l'enseignement supérieur autorise les inscriptions dans les universités, plusieurs étudiants ont rapporté avoir reçu des OQTF après la mise en place du moratoire sur les OQTF le 17 juin 2022 et cela parfois en dépit de leur inscription dans des universités françaises. Cela dénote une pratique inégale et disparate d'une préfecture à une autre. Cette incertitude et cette précarité sont renforcées par le fait que plusieurs de ces étudiants ayant entamé une démarche de formation attendent encore et toujours que leur situation soit régularisée auprès des préfectures. Mme la députée demande ainsi à M. le ministre de lui exposer les mesures prises afin faire appliquer uniformément sur l'ensemble du territoire le moratoire sur les OQTF pour les étudiants étrangers ayant fui l'Ukraine. De plus, alors que le moratoire sur les OQTF arrive à son terme, elle souhaite savoir quelles mesures seront prises afin de garantir un statut stable et une protection pérenne aux étudiants concernés, notamment en leur délivrant des titres de séjour qui leur permettrait une intégration réelle en France.

Réponse émise le 15 août 2023

Les préfectures ont été particulièrement sensibilisées à la situation des étudiants ressortissants de pays tiers, titulaires d'un titre de séjour étudiant et ayant fui l'Ukraine, notamment à travers deux instructions des 24 mars et 24 juin 2022 indiquant les dispositions qui leur étaient applicables. Elles ont, par ailleurs, été de nouveau mobilisées récemment et depuis le début de la rentrée universitaire, en lien avec les rectorats, afin d'apporter une attention particulière à cette population. Ces personnes ont pu bénéficier d'une prolongation de l'autorisation provisoire de séjour (APS) d'un mois qui leur a été remise en raison de leur non éligibilité à la protection temporaire ou, le cas échéant, de la délivrance d'une nouvelle APS jusqu'au 31 octobre 2022, sous les deux conditions cumulatives suivantes : avoir quitté l'Ukraine à compter du 24 février 2022 ; avoir introduit une demande de protection temporaire avant le 17 juin 2022. L'APS ainsi remise a permis de couvrir la campagne d'inscription de la rentrée scolaire ou universitaire 2022-2023, permettant à ces ressortissants de s'inscrire dans un établissement d'enseignement supérieur afin d'y suivre une formation. Ils ont ensuite pu, en cohérence avec le calendrier classique pour de telles démarches, solliciter une carte de séjour portant la mention « étudiant » en se conformant aux conditions de droit commun prévues pour la délivrance d'un tel titre, notamment de ressources (disposer de 615 € par mois), à titre exceptionnel, d'une exemption de présentation du visa long séjour exigé normalement pour accéder à ce titre de séjour. Ces instructions nationales s'appliquent sous réserve de considérations de sécurité que l'instruction de la demande aurait fait apparaître. Durant cette année universitaire, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche comptabilisait 308 nouvelles inscriptions enregistrées au bénéfice de ressortissants de pays tiers, déplacés d'Ukraine.

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