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Ségolène Amiot
Question N° 1904 au Ministère du travail


Question soumise le 4 octobre 2022

Mme Ségolène Amiot appelle l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion au sujet de l'usage trop fréquent d'intérimaires à La Poste. En effet, ce choix apparaît comme étant une nouvelle politique de comblement d'emploi pour l'entreprise. Un rapport de l'inspection du travail de 2022 décrit la situation : « Les données nationales sur la période 2015 - 2020 relatives au montant des versements à des entreprises de travail temporaires exprimés en millions d'euros mettent en évidence une politique d'investissement dans le travail temporaire ». « Il est constaté que le niveau d'investissement "intérim" de la S.A. LA POSTE a plus que doublé entre 2015 et 2020. Traduit en masse d'emplois, le nombre d'intérimaires - tous métiers confondus, incluant les facteurs/factrices - au niveau national représente près de 11 500 équivalent agents années ». Mme la députée a été alertée de l'usage fréquent d'intérimaires par La Poste parce que deux employées avaient saisi le tribunal des prud'hommes de Nantes après avoir été remerciées pour avoir sollicité une embauche en CDI pendant un contrat en CDI Intérimaire. Le motif de recours des intérimaires y était abusif. En effet, ces employées ne répondaient pas à un accroissement d'activité, mais occupaient des emplois vacants suite à des départs à la retraite. Ce motif invoqué par La Poste, est surprenant dans une entreprise qui supprime des milliers de positions de travail chaque année, qu'elle justifie par la baisse du courrier, alors qu'elle développe parallèlement la sous-traitance pour ses colis. Les contrats intérimaires utilisés, CDI intérimaires, sont d'une grande précarité, La Poste joue sur l'ambiguïté du terme CDI, alors que les missions sont limitées à trois ans au sein d'une même entreprise. Ce qui ne permet ni une évolution professionnelle, ni une progression des rémunérations. Alors que la philosophie du CDI intérimaire était de déprécariser l'emploi, il devient un outil pour contourner le CDI, dédouanant La Poste de toute responsabilité d'employeur. Ce mois-ci, La Poste a enfoncé le clou en demandant aux entreprises d'intérim de ne pas appliquer l'augmentation du taux horaires du Smic à 11,07 euros brut, précisant qu'avec les primes ceux-ci restent à un salaire net au-dessus du smic. Cela a conduit des avenants de contrat pour diminuer le taux horaire des intérimaires déjà utilisé par La Poste. Si La Poste est donneuse d'ordre du salaire des intérimaires ne devrait-elle pas les embaucher ? La Poste, malgré une condamnation par le tribunal de Nantes en mai 2022, ne change pas de cap. La Poste appartient directement à l'État à hauteur de 34 % et a bénéficié d'un demi-milliard d'aide publique en 2022, en bénéficiera d'une somme équivalente en 2023, dans le cadre de ses obligations de service public. Il s'agit d'un service public indispensable, subissant déjà un démantèlement organisé par les dirigeants de l'entreprise se pliant aux injonctions des actionnaires publics que sont la CNP et la CDC. Cette politique d'entreprise conduit aussi à des fermetures de bureau de poste en plein centre urbain tel qu'à Nantes. Mme la députée questionne donc le M. le ministre au sujet de l'exemplarité de l'État. Comment M. le ministre peut-il être crédible lorsqu'il encourage les entreprises privées à embaucher en CDI, alors que les services publics ont de plus en plus recours aux intérimaires pour combler des postes précédemment occupés par des CDI de la poste ? Le rôle des services publics français n'est-il justement pas de mettre en valeur des conditions de travail justes avec des contrats de travail justes afin d'être une figure d'exemplarité pour les entreprises privées ? L'argent public ne doit-il pas servir l'intérêt général par le développement des services publics, plutôt qu'à précariser l'emploi ? Les demandes de soutien de La Poste ne doivent-elle pas être soumises à des exigences sociales et environnementales ? Mme la députée considère cet usage abusif des contrats précaires dans les services publics honteux et espère qu'il s'agit d'un sentiment partagé par M. le ministre. Elle souhaite connaître sa position sur ces sujets.

Réponse émise le 10 janvier 2023

Il convient de rappeler, en premier lieu, que le code du travail pose le principe selon lequel le contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale de la relation de travail. Par dérogation, une entreprise utilisatrice peut faire appel à un salarié temporaire, uniquement pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et dans les cas limitativement énumérés par la loi. Le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice. Le recours à des travailleurs temporaires permet aux entreprises de répondre à des besoins ponctuels en termes de qualification ou de personnel. Il confère ainsi davantage de flexibilité aux entreprises, notamment dans des secteurs dépendants de la conjoncture économique. L'intérim favorise en outre l'insertion dans l'emploi des salariés temporaires : ceux-ci bénéficient d'une rémunération au moins égale à celle que percevrait un salarié de l'entreprise permanent utilisatrice sur le même poste et ont l'opportunité de varier les employeurs et les milieux professionnels. Il est loisible à la société La Poste, comme à tout autre employeur de droit privé, de recourir à des intérimaires pour assurer la continuité de son activité, à condition de respecter le cadre juridique applicable. Le contrat à durée indéterminée intérimaire (CDI) permet à une entreprise de travail temporaire de conclure avec un salarié intérimaire un CDI pour l'exécution de missions successives au sein d'entreprises utilisatrices. Les cas de recours sont identiques à ceux de l'intérim classique. Ce contrat a été conçu comme un outil de flexi-sécurité, permettant de sécuriser les parcours professionnels des salariés intérimaires et de lutter contre la précarité. Il présente ainsi plusieurs avantages, au regard de l'intérim classique. Les salariés bénéficient d'un contrat à durée indéterminée avec un salaire garanti, au moins au niveau du SMIC et la possibilité de se former pendant les intermissions dans la perspective d'une meilleure employabilité auprès des clients utilisateurs. Par ailleurs, le CDI intérimaire favorise des missions plus longues, et sans délai de carence sur le même poste. Le Gouvernement est favorable à son développement, tout en soulignant qu'il ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.

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