M. Hadrien Clouet alerte M. le ministre des armées sur la dangerosité du site des Ballastières où sont immergées 5 000 tonnes d'explosifs, au sud de la commune de Toulouse et face à des établissements hospitaliers. La poudrerie nationale de Braqueville y était installée durant la Première Guerre mondiale, afin de produire de la poudre B, soit une poudre explosive mélangée à des fibres de coton aussi nommées nitrocellulose. À l'issue du conflit, quatre étangs artificiels furent creusés afin d'y confiner le surplus de production stocké dans des caisses de bois et de zinc. Hautement inflammable, la nitrocellulose est rendue inerte par l'eau. Une poudre inerte, mais dangereuse. Car le danger, jusqu'alors contenu, deviendrait imminent. Si la nitrocellulose n'explose pas à l'air libre, elle serait confrontée à de fortes températures qui libéreraient un gaz toxique. En outre, les poudres explosives pourraient être récupérées à des fins d'actes malveillants. Cela fait plus d'un siècle que les autorités toulousaines alertent à propos de la toxicité des explosifs immergés. Dès 1922, le quotidien socialiste Le Midi publiait le courrier d'un conseiller municipal de Toulouse adressé au préfet, afin de souligner le caractère toxique des poudres contenues dans les explosifs. Dans les années 1970, le ministère des armées missionne des plongeurs, qui constatent l'état dégradé des caisses, d'où s'échappe partiellement la poudre pour s'échouer sur les rives. Durant la même décennie, une première entreprise de dépollution permet d'extraire plusieurs centaines de tonnes de poudre. Cependant, les machines utilisées ont dégradé davantage encore l'état des caisses. Au début des années 2000, après plusieurs incidents causés par des individus ramassant ces fragments d'explosifs échoués, le ministère des armées prend la décision de racheter la zone, l'interdire au public et renforcer la surveillance du niveau de l'eau des quatre ballastières par l'implantation de plusieurs pompes à eau reliées à la Garonne. Or le réchauffement climatique et la multiplication des épisodes de canicules longues accélèrent l'évaporation de l'eau. La mission d'information sur la gestion des conflits d'usage en situation de pénurie d'eau a rappelé en juin 2020 que Toulouse pourrait perdre jusqu'à 40 % des débits disponibles dans les 25 années qui viennent. On doit ainsi s'attendre, dans un délai proche, à ce que l'eau des ballastières ne suffise plus à immerger les explosifs et que le niveau de la Garonne n'assure plus l'alimentation des pompes installées, ou, a minima, à une concurrence entre l'eau courante, l'eau d'agriculture et l'eau de sécurité industrielle. En 2011, une détonation déchausse la dalle de béton d'une entreprise implantés dans la zone de l'ancienne poudrerie. En 2013, après avoir établi deux scénarios de dépollution du site estimés à plusieurs dizaines de millions d'euros, le ministère des armées se dégage de tout cofinancement. En 2014, malgré l'ouverture de l'Institut universitaire du cancer de Toulouse Oncopole à proximité immédiate, l'État demeure passif. En 2017, le Premier ministre Bernard Cazeneuve s'engage à démarrer l'entreprise de dépollution de la zone dans les cinq ans. Sans suite, même si un de ses successeurs, Jean Castex, réunit un comité de suivi à rythme régulier. En juillet 2022, la préfecture de la Haute-Garonne a précisé que les travaux de dépollution pourraient advenir en 2024. Mais cette volonté se heurte à des manques techniques et financiers. Faute de compétences publiques, fruit du démantèlement de l'État, la puissance publique a lancé un appel d'offres auquel une dizaine d'entreprises ont répondu. Le point d'achoppement réside à présent dans le règlement de la facture. Aussi M. le député demande à M. le ministre quelle distribution des responsabilités financières est envisagée. Qui de l'État, des collectivités locales, de la métropole ou de la municipalité est censé contribuer au projet ? Selon quelle clé de répartition ? Au vu de la durée, des moyens matériels et humains requis, quel autre acteur que l'État peut être chef de file, maître d'ouvrage et financeur principal ? Et au sein de l'État, quel ministère est pressenti afin de piloter le projet de dépollution lié à un armement passé ? Enfin, pour éclairer ces choix budgétaires, il lui demande si les études seront rendues toutes publiques, jointes à un calendrier des travaux de dépollution.
Après le rachat de l'emprise par l'État à la société Grande-Paroisse en 2004, le site des Ballastières a fait l'objet d'une régularisation de son statut d'installation classée pour la protection de l'environnement, afin notamment d'assurer dans les meilleures conditions la sécurité des biens et des personnes. L'arrêté d'autorisation d'exploiter du 25 octobre 2012, mis à jour le 6 août 2018, a permis d'encadrer en renforçant les mesures de sécurité, les activités autorisées limitées aux seules opérations de gestion et de mise en sécurité du site. À ce titre, l'inspection des installations classées du contrôle général des armées vérifie périodiquement le respect des prescriptions de l'arrêté d'autorisation. Les prescriptions applicables à ce site, notamment la surveillance du site et l'immersion permanente des poudres, permettent d'en assurer la sécurité y compris au regard des différents projets en cours de développement à proximité des Ballastières. Afin de rassurer la population riveraine, l'État, qui a pris le contrôle et la maîtrise du site des Ballastières, apporte une garantie quant à la saine gestion du site et à l'absence de risque sur l'environnement. Les représentants du ministère des armées sont disponibles afin d'apporter de plus amples explications ou des présentations auprès des élus assurant le rôle de relais vers les riverains. A cet égard, il convient de préciser que la poudre utilisée pour la fabrication des cartouches n'est pas une matière qui devient explosive à l'air libre. Il s'agit d'une matière énergétique qui brûle si on l'allume. Dans le cas des Ballastières, même dans l'hypothèse d'un asséchement, l'explosion des poudres présentes est exclue compte tenu de l'absence de concentration et de confinement. En outre, en cas de combustion, les effets thermiques seraient contenus dans les limites de l'enceinte et aucune libération de gaz toxique ne se produirait, même en cas d'exposition à une forte température. Par ailleurs, la surveillance du niveau d'eau des Ballastières, ainsi que la possibilité de compléter leur niveau si nécessaire, font l'objet d'une attention particulière de la part des services du ministère des armées. Des mesures de régulation des niveaux d'eau entre les Ballastières sont bien prévues et il est planifié d'augmenter sensiblement la profondeur d'immersion de certains fûts en les repositionnant. Un pompage dans la Garonne ne serait mis en oeuvre qu'en cas de mesure extrême, et dans le plus strict respect de la réglementation, en particulier des arrêtés préfectoraux relatifs à la sécheresse. Malgré l'absence actuelle de risque, les nombreuses sollicitations pour une réhabilitation du site des Ballastières ont été entendues et comprises et une décision a été prise. Les différents services concernés du ministère se sont concertés et organisés pour préparer le déstockage des poudres. Ainsi, en avril 2021, l'opération, érigée en programme à effet majeur, est entrée dans sa phase de préparation. Les études conduites pendant cette phase permettront de disposer à l'horizon 2025 des éléments de décision nécessaires pour lancer l'opération de réhabilitation, qui constituera un projet d'ampleur en temps et en investissement. L'État financera la totalité de la réalisation des travaux de réhabilitation tandis que la maîtrise d'ouvrage du projet sera confiée à la direction générale de l'armement. De plus, au niveau local, un comité de suivi, présidé par le préfet de région et composé de représentants locaux de l'État et du ministère des armées, a été constitué pour assurer une pleine collaboration des services quant au devenir du site. Dans ce cadre, le ministère des armées reste particulièrement attentif à l'adoption des mesures les plus appropriées tant en matière de sécurité qu'en matière de protection écologique et de la biodiversité.
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