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Arnaud Le Gall
Question N° 1898 au Ministère de l’économie


Question soumise le 4 octobre 2022

M. Arnaud Le Gall interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'impact des sanctions appliquées à la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine. L'Union européenne a imposé plusieurs trains de sanctions économiques, financières et individuelles contre la Russie depuis mars 2022. La France a endossé ces sanctions. Les secteurs de l'énergie, de l'industrie minière et de la finance ont été particulièrement ciblés. Ces sanctions ont notamment conduit à l'arrêt des livraisons de gaz par la compagnie russe Gazprom, ainsi qu'à un flou concernant les exportations de charbon, d'acier, de fer, de cobalt, de palladium et même de produits alimentaires durant l'été 2022. Ces sanctions avaient pour but officiel d'étrangler l'économie russe dans la perspective de mettre fin à la guerre en Ukraine. Pourtant, la guerre s'intensifie. Et la hausse du prix des hydrocarbures aggravée par ces sanctions a permis à la Russie de voir ses bénéfices commerciaux exploser cette année. En définitive, ce sont à la fois l'industrie française, mais aussi et surtout les citoyennes et les citoyens du pays qui payent le prix de ces sanctions. De la même manière, les citoyens russes subissent bien d'avantage les sanctions que les oligarques au cœur du régime. Dans l'histoire des sanctions de ce type, tout montre que l'aggravation de la condition économique et sociale des peuples ne les aide pas à se mobiliser contre les régimes autoritaires. Au contraire, ces dernières savent profiter des situations de pénurie pour accentuer leur mainmise sur l'allocation des ressources diverses. Si M. le député ne condamne pas le principe des sanctions faisant suite à l'agression de l'Ukraine par la Russie, il en questionne donc l'efficacité. Il souhaite donc connaître l'impact réel de ces sanctions sur l'économie russe ainsi que sur l'économie française. Une réévaluation de la nature et de l'objectif de ces sanctions est-elle envisagée par l'Union européenne et la France ? Comment s'explique la modestie des saisies de biens appartenant à des oligarques russes proches du régime ? La mise en place de sanctions ciblées bien plus ambitieuses contre les biens matériels et financiers des oligarques ne serait-elle pas souhaitable ? Le cas échéant, il lui demande si l'opacité des systèmes bancaires en Europe même n'est pas un frein à lever.

Réponse émise le 20 décembre 2022

A titre liminaire, il convient de rappeler que l'objectif et la nature des sanctions sont définis par le Conseil de l'Union européenne, les mesures restrictives sont adoptées à l'unanimité par les États-membres de l'UE lesquels sont ensuite chargés de mettre en œuvre les sanctions. En France, l'autorité nationale compétente pour la négociation des sanctions et la coordination de l'action française est le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères. Les sanctions ont déjà un effet sensible sur l'économie russe.Neuf mois après le début du conflit, la Russie entre en récession : le PIB a reculé de 4,1 % en glissement annuel au deuxième trimestre et de 4% au troisième trimestre 2022. L'OCDE dans ses perspectives économiques de novembre table sur une récession de 5,6 % en 2022 et de 4,5 % en 2023. De plus, le fonctionnement du secteur bancaire sera durablement entravé en raison du découplage presque complet du système bancaire russe des marchés financiers internationaux. Cela limitera sa capacité à financer l'économie dans un environnement de taux mouvant, doublé d'un contexte inflationniste fort, et sans recours aux capitaux étrangers. En parallèle, l'entrée en vigueur de l'embargo européen sur le pétrole russe à partir du 5 décembre 2022 et du plafonnement du prix du pétrole russe affectera les exportations d'hydrocarbures ; la Russie verra ses sources traditionnelles de revenus se tarir, ce qui limitera sa marge de manœuvre budgétaire. Enfin, les sanctions auront un impact significatif et durable sur le potentiel de croissance russe. D'une part, les secteurs de haute technologie seront durablement handicapés par les ruptures d'approvisionnement. D'autre part, la guerre affectera le capital humain, avec l'émigration significative d'une main d'œuvre qualifiée. S'agissant du gel des avoirs des personnes sanctionnées, les biens appartenant à des oligarques russes proches du régime ne sont pas tous automatiquement saisis. En effet, il est nécessaire que ces personnes fassent l'objet de sanctions (mesure de gel des avoirs) en étant listé à l'annexe du règlement (UE) n° 269/2014 modifié pour que leurs biens fassent l'objet d'une mesure de gel. Le gel se différencie de la saisie : le gel interdit de tirer profit d'une ressource, par exemple en louant son bien immobilier ou en jouissant des fruits de la vente de celui-ci, mais il reste possible de l'entretenir et d'y accéder ; la saisie qui peut-être administrative ou judiciaire, est utilisée lorsqu'il existe une suspicion de contournement des mesures de gel ; enfin, la confiscation est prononcée par un juge judiciaire à la suite d'une infraction pénale (violation d'une mesure de gel des avoirs, blanchiment de capitaux…). La France a procédé au gel de 1,35 milliard d'euros de fonds et de ressources économiques entre le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie et novembre 2022. Les mesures de gel des avoirs constituent d'ores et déjà des mesures ciblées sur les fonds et ressources économiques des personnes sanctionnées. En effet, à compter de leur inscription sur la liste, tous les fonds et les ressources économiques des personnes listées font l'objet d'une mesure de gel des avoirs. Il n'est donc pas nécessaire de prendre des mesures complémentaires visant spécifiquement le gel des biens immobiliers. Concernant les systèmes bancaires, les banques sont assujetties aux mesures de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme et doivent donc respecter les sanctions internationales qui incluent les mesures de gel des avoirs. Concrètement, les personnes assujetties sont ainsi tenues de ne plus opérer de transactions bancaires pour les personnes privées ou morales faisant l'objet de gels (sauf dérogations explicitement prévues par le règlement et après autorisations expresses par les autorités compétentes). Le respect de ces obligations est suivi par la direction générale du Trésor en lien avec l'Agence de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) adossée à la Banque de France. Le non-respect des sanctions internationales peut entraîner des sanctions administratives, mais aussi des sanctions pénales comme prévu par l'article 459 du code des douanes. La France compte parmi les systèmes bancaires les mieux surveillés en la matière, comme en témoigne le rapport sur la France du Groupe d'Action Financière Internationale (GAFI), organisation internationale indépendante hébergée par l'OCDE. Enfin, tous les règlements mettant en place des régimes de sanctions prévoient une procédure de réexamen visant à garantir que les mesures restrictives continuent de contribuer à l'objectif qu'elles poursuivent.Ainsi, dans le cadre du régime de sanctions contre la Russie, le règlement européen mettant en place des mesures de gel des avoirs a été réévalué en septembre par le Conseil de l'Union européenne et reconduit pour 6 mois jusqu'en mars 2023.

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