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M. Ugo Bernalicis alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les moyens de réduire la population carcérale dans les prisons françaises. En effet, au 1er avril 2024, la France a enregistré encore une fois un nombre de personnes détenues en hausse dans ses centres pénitentiaires : soit 77 450 personnes pour 61 570 places opérationnelles. Il est important de rappeler que 26,4 % de ces personnes détenues sont prévenues, c'est-à-dire présumées innocentes et en attente de leur procès. La surpopulation carcérale devenue endémique arrive à des taux inacceptables en maisons d'arrêt de l'ordre de 150,4 % en moyenne sur le territoire français et ce sont 143 établissements ou quartiers qui ont une densité supérieure à 100 %. Pour les professionnels, le constat unanime est que la situation ne peut plus durer ! Organisations et syndicats de magistrats, du personnel pénitentiaire de direction ainsi que d'insertion et de probation, de médecins, d'avocats et associations œuvrant pour les droits des personnes détenues constatent la dégradation des conditions de détention, l'épuisement du personnel, la détérioration générale et accélérée de l'immobilier et la saturation de l'ensemble des services. L'incapacité du système pénitentiaire à remplir sa mission de réinsertion, à garantir le respect de la dignité et des droits des détenus ainsi que leur sécurité et celles des agents chargés de les garder est également identifiée par tous. Tous s'accordent sur l'impossibilité de laisser se poursuivre une telle désagrégation d'un service public. Dans ces conditions, cela fait des années que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) témoigne du profond décalage entre les normes applicables et la réalité quotidienne des conditions de vie des personnes détenues et observe les conséquences dramatiques de la surpopulation carcérale sur les droits fondamentaux. Le CGLPL estime qu’« il est inutile d'attendre que la prison puisse réinsérer quiconque dans une situation qui rend infernal également, le travail du personnel pénitentiaire ». En détention, les maux se multiplient et accablent les personnes détenues : altération des conditions d'accueil dans les établissements, banalisation du recours au matelas au sol, atteintes à l'intimité et à l'hygiène des personnes détenues, obstacle à la délivrance de soins de qualité, obstacle à l'accès aux activités, clé de la réinsertion, conditions de détention insalubres, aggravation de la vétusté des locaux, multiplication des incidents et des rixes, etc. S'ajoute un mal-être persistant chez le personnel pénitentiaire de surveillance et d'insertion et de probation, qui subit également les conséquences de la dégradation des établissements. Toutes les précédentes réformes visant à la limitation de la population carcérale mais se fondant uniquement sur un changement des pratiques des magistrats ont fait la démonstration de leur échec jusqu'à ce jour. La Gouvernement se cache et s'entête avec son « ambitieux » programme immobilier de livraison de 15 000 places supplémentaires de prison. Cet argument éculé est devenu un mensonge récurent de M. le ministre, car l'augmentation continuelle du parc pénitentiaire n'a jamais permis de lutter contre la surpopulation carcérale au contraire. Comme l'a constaté le Conseil de l'Europe dans sa recommandation du 30 septembre 1999 : « L'extension du parc pénitentiaire devrait être plutôt une mesure exceptionnelle puisqu'elle n'est pas, en règle générale, propre à offrir une solution durable au problème du surpeuplement ». Selon le Gouvernement, au 1er janvier 2024, 19 établissements ont été livrés représentant 6 076 places brutes, soit 4 103 places nettes, une fois prises en compte les fermetures d'établissements. Parmi les derniers établissements livrés, trois l'ont été en 2022 pour un total de 360 places et dix l'ont été en 2023 pour un total de 1 662 places nettes. En 2024, la moitié des établissements du programme 15 000 sera opérationnelle. Ce calendrier n'a pas freiné le taux de surpopulation qui continue de croître continuellement de mois en mois depuis janvier 2024. De même, le Gouvernement prétend que « les récentes évolutions législatives sont intervenues afin de favoriser le recours aux alternatives à l'incarcération, qui constituent des leviers de régulation des effectifs en milieu fermé ». Là aussi, les chiffres sont là pour rappeler l'échec du Gouvernement et démontre l'impasse dans laquelle il est. La lutte contre la surpopulation carcérale et les conséquences qu'elle entraîne sur toutes les politiques pénitentiaires impose un ensemble de mesures structurelles et, désormais, nombreux sont les professionnels, associations et experts qui prônent la mise en place d'une politique publique de déflation carcérale, par la mise en place d'un mécanisme de régulation carcérale. C'est pourquoi il lui demande quand le Gouvernement va travailler à mettre en œuvre, de manière effective et rapide, des mécanismes contraignant de régulation carcérale.
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