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Christine Arrighi
Question N° 17038 au Ministère auprès du ministre de la transition écologique (retirée)


Question soumise le 9 avril 2024

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Mme Christine Arrighi interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la directive européenne des méga-camions et son impact négatif pour le fret ferroviaire et fluvial. Le Parlement européen a adopté le mardi 12 mars 2024 la directive de la Commission européenne qui facilite la circulation dans l'Union de camions géants à deux ou trois remorques. L'augmentation du poids maximum des camions est pensée pour compenser le fait que les camions électriques sont plus lourds que les camions diesel, en raison du poids supplémentaire de la batterie électrique. Le texte propose donc d'augmenter le poids maximum des camions français de 40 à 44 tonnes. Mais il facilite par la même occasion la circulation de méga-camions étrangers qui peuvent peser jusqu'à 60 tonnes et mesurer 25,25 mètres de long. Ces mastodontes pourraient rouler en France, où ils étaient interdits. Ces méga-camions ne seraient même pas considérés comme des convois exceptionnels, qui sont eux encadrés par une réglementation très contraignante. Ils suivraient les mêmes règles que les camions classiques. Cela participe à rendre cette directive inacceptable et à contresens de ce qu'il faudrait faire en matière d'écologie. Différentes études montrent que des camions plus lourds, même s'il y en a moins, ne permettent pas de réduire les émissions de CO2. Le CER, un groupement qui rassemble les acteurs européens du rail, montre que cette directive provoquerait l'émission de 6,6 millions de tonnes de CO2 supplémentaires par an dans l'Union européenne. Autre problème : le texte autorise également les camions diesel à augmenter leur taille, donnant lieu à la possibilité de voir rouler des méga-camions diesel. Cela est inacceptable. Les méga-camions représentent aussi un vrai risque pour la sécurité routière. Leur distance de freinage est plus longue que les camions plus légers et ils seront pourtant soumis aux mêmes limitations de vitesse. Les accidents impliquant un poids lourd sont près de trois fois plus mortels qu'avec d'autres véhicules. Leur gigantisme n'est pas, non plus, adapté aux axes routiers français. Enfin, le coût de l'adaptation des routes à ces méga-camions devrait être assumé par les Français ! En plus, les camions lourds accélèrent l'usure des routes, ce qui fera exploser les coûts de maintenance des infrastructures routières et des ouvrages (ponts) que l'on sait déjà insuffisamment couverts par les contributions de leurs utilisateurs. Ces dépenses sont autant de pertes pour le développement du ferroviaire et du fluvial. Quel signal enverra-t-on aux entreprises qui seraient tentées, aujourd'hui, par le rail ou le fluvial ? En encourageant la route même quand le rail ou le fluvial est plus efficace et écologique, la directive méga-camions enferme le transport de marchandises dans le seul secteur du routier. La France est déjà à la traîne sur le fret ferroviaire. Le fret ferroviaire fait l'objet de promesses depuis plus de 20 ans. Les plans de restructuration se sont succédés (2003, 2007, 2009, 2011, 2016, 2021), tous fondés sur une politique publique libérale de dérégulation et de baisse des coûts largement inspirée du mode routier. Tous opérateurs confondus, la part modale du transport ferroviaire sur l'ensemble des marchandises transportées en France est passée de 14,6 % en 2009 à 10,7 % en 2021. L'État a pris des engagements dans le cadre de la loi climat en se fixant pour objectif un doublement de la part modale du fret ferroviaire d'ici 2030. Or, aujourd'hui, le fret ferroviaire représente en France entre 9 à 10 % des marchandises transportées alors que la moyenne européenne est à 17 %. Le volume de trafic fluvial a lui été divisé par deux depuis 1980. Le fret fluvial représente aujourd'hui 2,3 % en France contre 5,5 % en moyenne européenne. Pour autant, la logique du tout routier peut être empêchée. En l'état, la circulation de ces méga camions reste suspendue à une ultime validation du Conseil européen. Car les Vingt-Sept n'ont pas encore arrêté leur position sur le sujet. Un trilogue avec le Parlement et la Commission sera donc organisé après les élections européennes de juin 2024 pour finaliser le parcours législatif du texte et acter son éventuelle application. Le Gouvernement doit donc pousser pour l'interdiction des méga-camions. La France se trouve au cœur de la géopolitique des poids lourds. Il faut qu'il soit très ferme. S'agissant du fret ferroviaire, par l'intermédiaire de son ancienne Première ministre, le Gouvernement a annoncé en mars 2023 un plan de 100 milliards d'euros dédiés aux infrastructures ferroviaires. Pourtant, aucun élément concret ne concrétise cet engagement à ce jour. Quant au fret fluvial, l'infrastructure est là ; il manque un investissement supplémentaire de 100 millions par an pour sa totale régénération, ce qui est peu, face à des enjeux écologiques majeurs quand on sait que le transport fluvial comme le fret ferroviaire permettent de réduire les émissions de CO2 du transport de marchandises. C'est pourquoi elle l'interroge pour s'assurer que la France refusera l'application de la directive qui facilite la circulation dans l'Union de camions géants à deux ou trois remorques et lui demande par ailleurs quelles actions concrètes le Gouvernement entend prendre pour respecter ses engagements et développer le fret ferroviaire et fluvial.

Retirée le 11 juin 2024 (fin de mandat)

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