Mme Julie Delpech attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation sur la situation dans laquelle se trouvent les chambres de métiers et de l'artisanat. La diminution du budget général de l'État, prévu par la loi de finances initiales pour 2024, touche très fortement les chambres des métiers et de l'artisanat, dont les ressources ont été fortement diminuées par la baisse de la taxe sur les frais de métiers et par la révision du coût des contrats d'apprentissage. Aussi, pour faire face aux réductions de budgets, les CMA sont contraintes de transposer le coût de ces réformes sur les trajectoires de carrière des fonctionnaires qui y travaillent. Leurs rémunérations sont particulièrement faibles en comparaison de celles des autres agents de la fonction publique occupant des postes similaires et n'ont pas été revalorisées depuis plusieurs années, alors même que le point d'indice des fonctionnaires a été réévalué il y a peu. Les phénomènes d'inflation très importants que le pays a récemment rencontré ont donc conduit à une baisse très importante du salaire réel dans ces structures. Aussi, elle l'interroge sur les ambitions du Gouvernement concernant les CMA et sur les pistes envisagées pour améliorer la condition des personnels qui y travaillent.
Les chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) sont des établissements publics à caractère administratif de l'État, placées sous la tutelle du ministre en charge de l'économie et des finances et régies par le code de l'artisanat, et par le code du travail en ce qui concerne ses missions relatives à la formation. Après les profonds changements traversés par les CMA à la suite de la loi PACTE et de la régionalisation ainsi que les évolutions récentes de la rémunération des agents publics, se posent à la fois la question de la rémunération des agents des CMA et de la gestion des emplois du réseau des CMA, ainsi que celle du financement du réseau. En matière de droit social, les CMA ne relèvent ni du statut privé, ni du statut public mais du « statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat », issu des travaux d'une commission paritaire composée d'un collège représentant les employeurs et d'un collège représentant les agents des chambres, comme le prévoit la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952. Cette commission est présidée par le représentant du ministre en charge de l'artisanat qui fait preuve de neutralité afin de laisser le paritarisme s'exprimer. La rémunération des agents est donc une décision stratégique qui ne peut relever que du dialogue social entre les deux collèges lors des commissions paritaires. Elle doit être discutée et décidée en responsabilité par les partenaires sociaux en tenant compte de la situation financière du réseau. La valeur du point d'indice, les modifications des grilles indiciaires et la garantie individuelle du pouvoir d'achat (GIPA) sont de ce fait régulièrement abordés lors des commissions paritaires. La valeur du point d'indice des agents des CMA est, quant à elle, conformément aux dispositions prévues par l'article 22 du statut du personnel des CMA, fixée par la commission paritaire nationale instituée par la loi du 10 décembre 1952, dite « CPN 52 », après examen par la commission paritaire nationale prévue par l'article 56, dite « CPN 56 », commission préparatoire. La dernière augmentation de la valeur du point d'indice des chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) a été actée lors de la CPN 52 du 7 juin 2023, soit une augmentation de 1,85 %, ce qui équivaut à fixer la valeur du point des agents des CMA à 5,50 €. Cette augmentation fait suite à la hausse de 3,64 % de la valeur du point d'indice décidée lors de la CPN 52 du 24 octobre 2022. La majoration des grilles fait également l'objet de négociations régulières entre les collèges salariés et employeurs, menées dans le cadre des commissions paritaires. Enfin, il convient de noter que la CPN 52 du 24 octobre 2022 a également permis d'aboutir à un accord des deux collèges pour la mise en place d'une négociation annuelle obligatoire (NAO) au cours de laquelle sont abordés les questions des rémunérations mais également des avantages sociaux. S'agissant de la garantie individuelle du pouvoir d'achat (GIPA), à l'occasion de la CPN 52 du 26 mars 2019, le collège employeur et le collège salarié s'étaient accordés sur la mise en place d'une GIPA selon des modalités propres et indépendantes de celle prévue pour les fonctionnaires. Il est ainsi prévu, à l'article 3 de l'annexe XXV du statut du personnel des CMA, que le taux de référence pour le calcul de cette indemnité différentielle doit faire l'objet d'un vote par l'assemblée générale (AG) de CMA France, instance décisionnelle du réseau des CMA, après avis de la CPN 56. Lors de sa réunion du 4 octobre 2023, la CPN 56 a retenu à l'unanimité le taux maximum de 8,78 % et le plafond de rémunération de 720 points pour bénéficier de cette indemnité compensatrice, et l'AG extraordinaire de CMA France du 18 octobre 2023, a voté favorablement ces deux taux, avec effet rétroactif. En conséquence, le dispositif GIPA ne peut être automatisé sans être approuvé par un vote en AG de CMA France. La tutelle ne saurait imposer une automatisation du versement de la GIPA, ni modifier d'autres éléments de ce dispositif sans porter atteinte au paritarisme. Deux réunions de la CPN 52 sont prévues durant l'année 2024. Elles devront être précédées de plusieurs réunions de la CPN 56. Ces réunions seront l'occasion de discuter, de nouveau, de ces questions dans le cadre du dialogue social. Enfin, le réseau des chambres de métiers et de l'artisanat, qui fait actuellement face à d'importantes baisses de ses ressources, est actuellement en cours de réflexion sur les mutations de ses missions et l'évolution de ses métiers pour répondre à la nécessité d'optimiser ses revenus. Si les modalités de mise en œuvre, le cas échéant de dispositifs de réduction de la masse salariale, sont déjà en cours de déploiement dans certaines chambres régionales, elles privilégient les non renouvellements de contrat, les non remplacements de départs en retraite et les départs volontaires afin d'éviter de devoir recourir en dernier lieu à des licenciements dont le nombre devrait rester limité. À ce titre, la démarche d'élaboration d'une gestion prévisionnelle des emplois et compétences (GPEC) avait été engagée en 2019 par le réseau. Le processus a été relancé et son objectif inscrit dans le contrat d'objectifs et de performance (COP) pour la période 2023-2027 conclu le 22 mai 2023 entre le président de CMA France et la ministre en charge de l'artisanat. Cette démarche doit aboutir à la définition d'une stratégie et méthodologie communes à décliner dans l'ensemble du réseau, visant la conception, la mise en œuvre et le suivi des actions destinées à adapter les emplois et les compétences des agents, à la fois sur le plan individuel et collectif, face aux profondes évolutions récentes et à venir, des CMA. Les premiers travaux engagés début 2024 concernent les entretiens professionnels, la mobilité fonctionnelle et la formation professionnelle. En matière de financement, ensuite, le réseau des CMA repose entre autres sur la taxe pour frais de chambres de métiers et artisanat (TFCMA), et sur une prise en charge du coût du contrat des apprentis. Le niveau de prise en charge (NPEC) du coût contrat des apprentis relève de la compétence du haut-commissaire à l'enseignement et à la formation professionnels, rattaché aux ministères du travail et de l'éducation nationale, qui a notamment pour mission de proposer des orientations en matière d'enseignement professionnel et de formation professionnelle initiale. Quant à la TFCMA, il s'agit d'une taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises (CFE) prévue par l'article 1601 du code général des impôts. Cette taxe finance en partie le réseau des chambres de métiers et artisanat (CMA), représentant 20 % des produits du réseau en 2021. Elle repose sur (i) un droit fixe proportionnel (0,3275 %) au plafond annuel de la sécurité sociale (41 136 €) et (ii) un droit additionnel à la cotisation foncière des entreprises (CFE) entre 60 % à 90 % du produit du droit fixe destiné à CMA France. Conformément à l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, la TFCMA est plafonnée. Jusqu'en 2016, ce plafond était resté stabilisé à 203,149 M€. Les réformes récentes, notamment la régionalisation du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat, prévue par l'article 42 de la loi « PACTE », qui a conduit à la disparition des niveaux départemental et interdépartemental et à la limitation de la personnalité morale aux seules chambres de niveau régional, avaient pour corollaire un recentrage des missions financées par cette taxe. Cette régionalisation a permis une mutualisation accrue des services support et une réduction des charges d'exploitation, au travers d'économies lors du renouvellement des marchés et en matière de masse salariale. Elle s'est accompagnée de l'arrêt de certaines missions telles que le stage obligatoire de préparation à l'installation, l'enregistrement des contrats d'apprentissage et la tenue du répertoire des métiers par le biais des centres de formalités des entreprises, qui a été remplacé au 1er janvier 2023, par le guichet unique des entreprises, géré par l'Institut national de la propriété industrielle. L'ensemble de ces mesures, destinées à adapter et moderniser les conditions d'intervention du réseau consulaire en faveur des entreprises artisanales, a pour effet de diminuer progressivement les besoins de financement du réseau et de permettre un abaissement du plafond de la TFCMA. Cette diminution du plafond, initialement fixée à 15 M€ en 2023, a été limitée à 7 M€ par amendement du Gouvernement en loi de finances pour 2023. Par ailleurs, la baisse fixée à 29 M€ a été réduite à 13,25 M€ par amendement dans la loi de finances pour 2024.
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