Mme Virginie Duby-Muller appelle l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur la situation préoccupante de certaines entreprises au regard de la profusion, ces derniers mois, de la prescription d'arrêts de travail motivés par l'existence de « syndromes anxio-dépressifs réactionnels ». Nombre de ces arrêts de travail font suite à des réprimandes de l'employeur au regard de la qualité insatisfaisante du travail du salarié voire même à une simple mésentente entre les protagonistes. Plusieurs employeurs se trouvent donc totalement démunis face à la répétition des arrêts de travail de leurs salariés et de leur prolongation. Si la prescription initiale de certains arrêts de travail peut susciter en elle-même l'interrogation des employeurs, ce sont les prolongations sans fin de ceux-ci qui les mettent le plus dans l'embarras. Ces situations engendrent une désorganisation fonctionnelle des entreprises qui peinent déjà à recruter et les employeurs ne peuvent rompre les contrats de travail des salariés concernés, sachant pourtant pertinemment, que, pour la plupart d'entre eux, il n'est pas envisagé qu'ils reprennent leur travail. C'est ainsi que certains chefs d'entreprise se retrouvent face à des arrêts de travail dont la durée excède parfois une année avec, pour autant, l'obligation d'octroyer à leurs salariés un droit intégral à congés payés, comme l'a récemment affirmé la Cour de cassation. Aussi, face à ce constat, elle souhaiterait connaître la position du Gouvernement et voir ce qui peut être envisagé en matière de contrôle des arrêts de travail pour ce motif et éviter ainsi les abus.
L'absentéisme a un coût non négligeable pour les employeurs et pour les finances publiques (20,9 milliards d'euros en 2022) mais affecte aussi la bonne organisation et la productivité des entreprises. Il révèle par ailleurs l'importance de renforcer la prévention des risques professionnels et la promotion de la santé au travail, alors que les accidents du travail et les maladies professionnelles sont à l'origine d'une partie de ces arrêts de travail. Si l'absentéisme comporte une part incompressible (épidémies de grippes, par exemple), le renforcement des mesures de prévention en entreprise peut en effet contribuer à renforcer la santé au travail et ainsi à réduire les arrêts, par exemple en agissant sur la prévention de la pénibilité, l'organisation du travail, ou la prévention des risques professionnels prioritaires. Dans ce cadre, les services de prévention et de santé au travail disposent d'outils renouvelés depuis la loi du 2 août 2021 pour accompagner les entreprises, y compris lorsque les travailleurs se retrouvent exposés au risque de désinsertion professionnelle (création de cellules de prévention de la désinsertion professionnelle, essai encadré, convention de rééducation professionnelle, etc.). S'agissant de la lutte contre les fraudes, la contre-visite patronale constitue un levier permettant à l'employeur d'agir. La contre-visite telle qu'elle est prévue par l'article L. 1226-1 du code du travail est ouverte à l'employeur à partir du moment où il est tenu de maintenir en totalité ou en partie le salaire. La contre-visite permet de vérifier l'état pathologique de l'intéressé afin de vérifier le bienfondé de l'arrêt de travail. Si le médecin-contrôleur estime que l'arrêt de travail n'est pas ou plus justifié, le salarié doit reprendre le travail. S'il refuse et décide de s'en tenir à la date de reprise initialement prévue par son médecin traitant, il est privé du maintien de salaire à compter de la date de la contre-visite. Si le salarié est considéré comme responsable de l'impossibilité du contrôle, il perd également le bénéfice des indemnités complémentaires à compter de cette date. L'assurance maladie dispose également de leviers pour agir contre la fraude. En effet, des contrôles peuvent être effectués auprès des professionnels de santé lorsque ces derniers ont une activité de prescription d'arrêts qui apparaît anormalement élevée. Dans ce cadre, le médecin peut alors être mis sous accord préalable et voir ses prescriptions d'arrêts subordonnées à un avis du service de contrôle médical de l'assurance maladie pour une durée déterminée. De manière alternative, l'assurance maladie peut également proposer au médecin d'être mis sous objectif. Si ce dernier accepte, il s'engage à atteindre un objectif de réduction des prescriptions dans un certain délai. Dans le cadre de la nouvelle campagne de contrôle et d'accompagnement engagée par la caisse nationale d'assurance maladie en 2023, environ 1000 médecins se sont vus proposer une mise sous objectifs. L'assurance maladie s'est par ailleurs fixée comme priorité de renforcer les contrôles des assurés en arrêt de travail itératif ou en lien avec certains motifs dont la durée dépasse celle recommandée par la Haute Autorité de santé. Face à la forte progression des arrêts de travail, le Gouvernement a récemment mis en œuvre une mesure visant notamment à réduire certaines dérives liées au développement de la téléconsultation. En effet, depuis le 1er janvier 2024, la prescription ou le renouvellement d'un arrêt de travail via la téléconsultation est par principe limité à une durée maximale d'arrêt de trois jours si le prescripteur n'est pas le médecin traitant ou la sage-femme référente. Afin de tenir compte d'éventuelles situations d'indisponibilité de médecins, notamment dans les zones de faible densité médicale, cette limitation est inapplicable lorsque le patient justifie de l'impossibilité de consulter un professionnel médical en présentiel. Parallèlement à cette mesure, l'assurance maladie prévoit de renforcer son contrôle des arrêts prescrits en téléconsultation, en adressant des courriers d'alerte aux assurés ayant le plus recours à des arrêts de travail obtenus à la suite d'une téléconsultation réalisée auprès de médecins différents et non connus au préalable. Certains pourront en outre être contactés par le service médical de l'assurance maladie qui s'assurera de l'absence de recours abusif à ce type de prescription.
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