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Matthieu Marchio
Question N° 16122 au Ministère auprès de la ministre du travail


Question soumise le 12 mars 2024

M. Matthieu Marchio interroge M. le ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention, sur la situation préoccupante des pénuries de médicaments en France, qui a vu près de 5 000 signalements de spécialités en tension ou en rupture totale en 2023 et qui révèle une augmentation de 30 % par rapport à l'année précédente. Un tiers des Français a été confronté à une pénurie de médicaments en 2023. Toutes les catégories de médicaments sont touchées, des antibiotiques et anticancéreux jusqu'aux corticoïdes, aux anesthésiques locaux et aux traitements pour le diabète, les maladies cardiovasculaires, l'ostéoporose et les vertiges. La situation s'aggrave de jour en jour, les termes tels que « tension d'approvisionnement » et « rupture de stock » devenant courants dans les mises à jour de l'agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Cette situation génère de l'angoisse chez les patients tout en créant une pression sur les pharmaciens qui doivent constamment trouver des alternatives sans visibilité ni perspective d'amélioration. L'impact s'étend aux conditions d'exercice des médecins, qui doivent ajuster leurs prescriptions ou rééquilibrer les traitements, mais aussi sur la santé publique. Certains patients se voient contraints d'obtenir des médicaments à l'étranger sans prise en charge par l'assurance maladie, engendrant des inégalités d'accès aux soins. Dans le département du Nord, les retombées de ces pénuries de médicaments se font durement sentir. Les habitants de la région, déjà confrontées à des défis socio-économiques importants, se trouvent davantage pénalisées par ces difficultés d'accès aux médicaments essentiels. Cette situation accentue les inégalités en matière de santé et souligne l'urgence d'actions ciblées pour garantir l'équité dans l'accès aux soins sur l'ensemble du territoire national. La nouvelle stratégie 2024-2027 présentée le 21 février 2024 par le ministère s'articule autour de quatre axes principaux pour améliorer la situation, mais des questions demeurent quant à son efficacité à long terme pour prévenir de telles crises à l'avenir. Dans ce contexte, il souhaite connaître les mesures concrètes que le Gouvernement envisage de mettre en place pour assurer une amélioration durable de la disponibilité des médicaments, notamment pour les 450 médicaments stratégiques identifiés.

Réponse émise le 21 mai 2024

Compte tenu de l'augmentation des signalements de ruptures et risques de ruptures de stock constatée ces dernières années, indépendamment de la pandémie de Covid-19, le ministère du travail, de la santé et des solidarités a réuni un nouveau comité de pilotage le 21 février 2024, lequel a acté une nouvelle feuille de route 2024-2027 pour garantir la disponibilité des médicaments et assurer à plus long terme une souveraineté industrielle. Depuis 2019 et à plus forte raison pendant la crise sanitaire, les travaux entrepris par les ministères chargés de la santé et de l'industrie, notamment dans le cadre de la feuille de route précédente ont permis de renforcer la lutte contre les pénuries de produits de santé dans le prolongement de la précédente feuille de route 2019-2022 qui a marqué des avancées majeures (plan de gestion des pénuries pour les médicaments d'intérêts thérapeutiques majeurs, obligation de détention de stocks de sécurité notamment). En outre, une liste de 450 médicaments dits « essentiels » car stratégiques pour la santé des patients a été établie sur la base des recommandations des autorités scientifiques. Cette liste, publiée le 13 juin 2023, est évolutive. À partir de cette liste, des travaux spécifiques ont étés engagés pour mieux garantir la disponibilité des médicaments concernés (suivi renforcé sur les capacités d'approvisionnement, analyse des pratiques de prescription et des tendances d'achat, cartographie et renforcement des chaînes de production, mise en œuvre de solutions de production de secours, actions de prévention, etc.). Le Président de la République a également annoncé le 13 juin 2023, la relocalisation de la production d'une partie de ces médicaments essentiels. Dans ce cadre, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en lien avec la direction générale de la santé a établi un plan hivernal (sécurisation des stocks de médicaments majeurs de l'hiver, amélioration de la mise à disposition des données, responsabilisation de l'ensemble des acteurs du soin et des patients, etc.) pour anticiper d'éventuelles tensions et renforcer notre capacité à faire face à des pics saisonniers de consommation de médicaments. Ce plan hivernal inclut une phase d'anticipation qui vise à sécuriser les approvisionnements afin de garantir la couverture des besoins et les règles de bon usage des médicaments. Le Gouvernement a également annoncé un moratoire sur les baisses de prix des génériques stratégiques sur le plan industriel et sanitaire. Il est également prévu d'opérer des hausses de prix ciblées sur certains génériques stratégiques produits en Europe. Ces hausses de prix se feront en contrepartie d'engagements des industriels sur une sécurisation de l'approvisionnement du marché français. A titre d'exemple, des hausses de prix ont eu lieu sur certains antibiotiques à base d'amoxicilline et amoxicilline acide clavulanique. De plus, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoit plusieurs mesures pour lutter contre les tensions d'approvisionnement notamment l'obligation, sous peine de sanction financière, pour les laboratoires pharmaceutiques de chercher un repreneur en cas d'arrêt de commercialisation d'un médicament d'intérêt thérapeutique majeur, le renforcement des pouvoirs de l'ANSM pour ce qui concerne la requalification d'un médicament en médicament d'intérêt thérapeutique majeur et pour réguler les tensions en lui permettant par exemple de privilégier un circuit de distribution ou des contingentements ainsi que la création d'un statut de préparations officinales spéciales permettant aux pharmaciens de pallier à des pénuries. Enfin, au niveau européen, le règlement (UE) n° 2022/123 du 25 janvier 2022 a introduit des dispositions visant à prévenir et gérer les pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux considérés comme critiques, en renforçant le rôle de l'Agence européenne des médicaments est entré en application. Il s'agit là d'une première étape visant à mettre en place un cadre renforcé pour la notification et la surveillance des pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux lors d'urgences de santé publique ou d'événements majeurs dans l'Union européenne. De même, dans le cadre du projet de révision de la législation pharmaceutique présenté par la Commission européenne, des mesures visant à anticiper et réduire les tensions d'approvisionnement sont prévues dans ce projet, reprenant les dispositions françaises (obligation d'avoir des plans de gestion des pénuries pour les laboratoires, liste de médicaments critiques, déclaration des ruptures notamment).

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