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M. Alexis Corbière interroge Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques sur le suivi, par la France, de l'héritage de la Coupe du monde de football masculin au Qatar. L'organisation de cette compétition dans ce pays du Golfe, au-delà de son aspect sportif, a aussi été le théâtre de scandales politiques, sociaux, économiques et écologiques. La presse en a largement fait état, cette Coupe du monde a été entachée par de nombreuses. Pendant quelques mois, le Qatar a été sous les feux des projecteurs internationaux, l'obligeant ainsi à modifier sa communication, cherchant à apparaître plus moderne et respectueuse des droits humains. De nombreux acteurs des droits humains comme Amnesty international avaient alerté sur les conditions de travail des ouvriers, sur la question du respect des droits de l'homme par le Qatar et sur l'implication de la France à ce sujet. Lors d'une rencontre à l'Assemblée nationale, avec des parlementaires issus de différents groupes, Mme la ministre avait indiqué que « dans la partie héritage, il ne faudra rien lâcher » De plus, lors d'une interview datant du 23 novembre 2022, Mme la ministre a aussi expliqué que les « fonds de cet héritage seraient tournés vers un centre d'excellence pour les travailleurs migrants, pour la cause de l'éducation ». Par « héritage », le Gouvernement français estimait que les progressions observées dans ces domaines devaient se poursuivre et que l'organisation de cette Coupe du monde ne devait être que le début de futures améliorations. S'inscrivait aussi dans cette perspective, la création d'un fonds pour les blessés et les familles des travailleurs morts sur les chantiers du Mondial, demande que M. le député a notamment appuyée et relayée. Un an après, quelle est la réalité de cet « héritage », si souvent mis en avant pour valider le choix de l'organisation de la Coupe du monde dans ce pays conservateur et autoritaire ? À la mi-novembre 2023, un rapport d'Amnesty international pointait du doigt cet héritage, considéré comme très faible. Le sort des travailleurs migrants dans le pays n'a quasiment pas évolué et les nombreux abus perdurent : ils ont toujours besoin de la permission des Qataris pour changer d'emploi et continuent à subir des intimidations ou même sont envoyés en prison pour de fausses raisons. Enfin, les travailleurs doivent toujours s'acquitter de frais de recrutement, les salaires restent extrêmement bas et n'ont pas évolué depuis 2021 même s'il y a, là-bas aussi, une inflation. De plus, beaucoup d'ouvriers ne sont pas payés mais ne disposent pas de la possibilité d'entamer une action en justice. À cela s'ajoutent des logements toujours extrêmement précaires ainsi qu'une violence physique qui perdure sur les lieux de travail. Ainsi, le bureau de l'OIT au Qatar - qui a pourtant toujours été clément envers le gouvernement qatari - dénonce même avoir relevé des cas de représailles de la part des employeurs à l'encontre des travailleurs qui demandent de changer d'emploi, y compris l'annulation des visas de résidence ou le dépôt de fausses accusations de fuite. En conclusion, les travailleurs migrants sont encore en danger au Qatar, du fait des nombreux abus qui violent directement les réformes promises par le gouvernement qatari. La création d'un fonds minimum de 440 millions de dollars abondé par la FIFA, comme le demandait l'ONG Amnesty international pour les blessés et les familles des travailleurs morts sur les chantiers du Mondial, est restée lettre morte. Celui-ci était l'un des points principaux de cet héritage, tant relayé par le gouvernement Qatari. Les quelque 250 millions de dollars qui auraient déjà été versés par le Qatar sont bien insuffisants pour réparer les violations directes et indirectes des droits humains dont le pays. Plusieurs stades construits exprès pour la Coupe du monde devaient ensuite être démontés pour être envoyés vers des pays manquant d'infrastructures sportives. Des journalistes du Guardian ont ainsi révélé qu'en mars 2023, contrairement à ce qui était indiqué initialement dans le calendrier de la FIFA, les stades étaient intacts. Interrogée à ce propos, la FIFA a elle-même indiqué que « les promesses en matière d'héritage sont devenues beaucoup plus floues ». Alors que la Coupe du monde de football 2022 a été organisée par le Qatar, classé à la 114e place par The Economist par rapport à son indice de démocratie, il est désormais quasiment certain qu'elle sera organisée en 2034 par l'Arabie Saoudite, classée elle, à la 150e place. C'est dans ce pays où les droits humains sont encore plus ignoblement bafoués, où les inégalités femmes/hommes sont particulièrement élevées et où la lapidation et la peine de mort sont appliquées, que se déroulera un moment censé promouvoir l'égalité et l'union entre les peuples. M. le député dénonce fortement ce choix. Cet héritage apparaît pour beaucoup comme n'ayant été que temporaire et n'ayant pour seule finalité que de donner une façade moderniste au Qatar, sans aucune durabilité. À l'inverse, les violations des droits de l'homme perdurent et seront de plus en plus présentes, au fur et à mesure que les souvenirs de la Coupe du monde s'effaceront. La France, aux côtés d'autres États, doit s'engager pour que cet héritage soit une réalité et qu'un suivi puisse être effectué, sur le long voire très long terme. M. le député demande à Mme la ministre d'expliquer de quelle manière la France suit l'évolution de la protection des droits humains au Qatar. Comment la France y est-elle attentive ? De plus, la ministre pourrait-elle préciser les avancées concrètes que le pays aurait pu vérifier concernant les droits des travailleurs, les droits des personnes LGBTQ+ ou encore les droits des femmes sur place ? M. le député demande à Mme la ministre de bien vouloir partager les informations concernant la mise en place des fonds d'indemnisation des travailleurs migrants. Enfin, il lui demande d'exprimer la position de la France quant à l'organisation de la Coupe du monde de football 2034 en Arabie Saoudite.
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