M. Philippe Fait alerte M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité, sur la situation des pêcheurs et de l'ensemble de la profession qui demeure incertaine, plusieurs années après le référendum sur le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne. La proximité de la façade Manche mer du Nord avec les eaux territoriales britanniques rend les pêcheurs de cette région particulièrement vulnérables aux conséquences du Brexit. Le déplacement de l'effort de pêche des navires européens vers les 6-12 milles nautiques français suite au Brexit a entraîné des démarches considérables pour la réattribution des licences de pêche. Malheureusement, beaucoup de navires n'ont toujours pas obtenu à ce jour leurs licences. Pour ceux qui les ont obtenues, des exigences constantes de nouvelles pièces justificatives ainsi que de nouvelles contraintes réglementaires ont été imposées, ajoutant une complexité et une lourdeur administrative inattendue. Aussi, les consultations fréquentes du Marine Management Organisation (MMO), chargé par le Royaume-Uni de réglementer la pêche, soulèvent également des préoccupations. Ces consultations, axées sur l'analyse des caractéristiques des flottilles européennes, semblent se concentrer davantage sur la collecte de données que sur l'amélioration de la cohabitation des flottilles, laissant présager des négociations futures difficiles en 2026. Malgré la coopération des Européens, en particulier de la France, dans ces consultations techniques, le manque d'équité actuel risque de perturber les équilibres économiques et naturels de la façade maritime. La concentration des flottilles dans les eaux françaises risque fortement d'entraîner une surpêche, avec des conséquences économiques graves pour la filière et des conséquences écologiques délétères pour les écosystèmes. Outre les contraintes techniques, de nouvelles zones d'exclusion pour la pêche sont régulièrement introduites, notamment pour la protection des oiseaux et des marsouins. Ces zones, souvent situées aux frontières des eaux européennes, soulèvent des questions quant à la justification écologique de telles mesures. Il est tout de même à noter que le Royaume-Uni, bien qu'étant devenu un pays tiers suite au Brexit, continue de bénéficier du marché européen, tandis que les filières française et européenne font face à des contraintes croissantes. Aucune exigence réglementaire ou technique n'est mise en place envers les Britanniques, ce qui engendre un sentiment d'injustice chez les pêcheurs français. Dans ce contexte, le manque de visibilité sur les accès aux zones de pêche affecte moralement les professionnels de la mer et nuit fortement à l'image positive de la filière. Dans un contexte où l'Union européenne importe une part significative de ses produits de la mer, provenant de divers pays aux normes environnementales plus que variables, il est impératif d'agir rapidement pour rétablir l'équilibre et permettre à la filière de négocier d'égal à égal avec les partenaires britanniques. Aussi, M. le député souligne que la survie de l'ensemble de la filière halieutique et de la souveraineté alimentaire de la France est en jeu. Il souhaiterait connaître sa position sur le sujet ; il l'invite enfin à interpeller la Commission européenne dans le but d'obtenir des informations sur ses intentions et actions envisagées en vue de réagir et de protéger le secteur économique en question.
En tant qu'Etat côtier indépendant de l'UE, le Royaume-Uni entreprend depuis 2020 de consolider son réseau d'aires marines protégées en limitant dans certaines zones l'activité des navires de pêche, quel que soit leur pavillon. Ces mesures vont dans le sens des engagements internationaux pris par le Royaume-Uni comme par la France pour une meilleure protection des océans. Cependant, elles doivent se faire en pleine conformité avec l'Accord de Commerce et de Coopération (ACC) issu du Brexit qui dispose que les mesures mises en œuvre doivent être non discriminatoires et proportionnées. Plusieurs consultations publiques, auxquelles la France a activement participé, ont ainsi été lancées. L'une d'elles (le « stage 2 ») a donné lieu à la publication d'un texte réglementaire restreignant la pêche de fond dans 13 aires marines protégées (AMP) des eaux anglaises à compter du 22 mars. D'autres consultations publiques sont en cours, dont l'une comme souligné, vise à évaluer l'impact de la pêche dans les zones de protection des espèces à forte mobilité (marsouin commun, oiseaux). Des échanges ont eu lieu entre les professionnels concernés et l'administration, afin d'analyser ces potentielles restrictions et leurs impacts sur l'activité de pêche française, et en particulier, celle des pêcheurs des Hauts-de-France. Une réponse à cette consultation a par ailleurs été transmise aux autorités britanniques. Associée à d'autres mesures du même type, la dynamique britannique fait craindre une restriction progressive de l'accès des navires de l'UE aux eaux et aux ressources de pêche britanniques, en dépit de l'Accord de commerce et de coopération (ACC). Dans ce contexte, la France a multiplié les actions diplomatiques pour faire part de sa profonde préoccupation quant aux mesures britanniques en vigueur ou à venir, et rappelé que la désignation de sites protégés, et l'adoption de mesures à leur échelle, nécessitaient une réflexion commune avec l'ensemble des acteurs concernés. Soutenue par plusieurs délégations dont le Danemark et l'Irlande, la France a par ailleurs demandé à la Commission européenne, lors du Conseil des affaires générales le 19 mars et lors du Conseil informel des ministres de la pêche le 25 mars, de présenter une analyse technique de l'effet de l'ensemble de ces mesures sur les flottes européennes et françaises, ainsi qu'une analyse juridique individuelle et au global de leur conformité à l'ACC. A l'initiative de la France, un courrier des Etats membres a été partagé à la Commission pour l'enjoindre d'échanger au niveau technique avec le Royaume-Uni. Grace à cette démarche, un point dédié aux aires marines protégées a été ajouté à l'ordre du jour du Comité Spécialisé des Pêches des 20-23 mai 2024. Les échanges entre les deux parties se poursuivent. Enfin, concernant l'attribution des licences de pêche pour les navires français dans les 6-12 miles britanniques, il convient d'indiquer que l'ensemble de navires éligibles, et en ayant fait la demande, ont à ce jour obtenu leur licence.
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