Mme Christine Loir appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique concernant la tardiveté de la diffusion des programmes audiovisuels de première partie de soirée. En effet, depuis de nombreuses années, les programmes audiovisuels du soir ont été progressivement décalés à une heure de plus en plus tardive. Selon les données fournies par Médiamétrie, entre 2009 et 2022, l'heure moyenne de lancement du prime time a été décalée de 29 minutes. En 2009, les grands programmes commençaient en moyenne à 20 h 39, contre 21 h 08 en 2022. Ces résultats globaux dissimulent des disparités qui demeurent entre les différentes chaînes télévisuelles avec des prime times atteignant en 2019 presque 21 h 20 pour TMC, 21 h 15 pour C8 ou encore 21 h 10 pour TF1 ; mais aussi sur le service public avec un horaire moyen de début de 21 h 08 pour France 2. L'accumulation de chaîne privée et le rajout de plus en plus de sport publicitaire tend à retarder ces horaires. C'est d'ailleurs, pendant ces heures, que les coûts de diffusion des spots publicitaires enregistrent le plus haut niveau de rentabilité pour les sociétés vendeuses d'annonces. Cet allongement peut tout à fait être corrélé avec la forte diminution du temps de sommeil des Français, désormais inférieur à sept heures par nuit, en incluant les jours de repos, selon le baromètre de santé publique France publié dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire en mars 2019. Là où il était encore possible de commencer un film à 20h30 et d'aller se coucher à 22h, il est aujourd'hui très rare de voir un film finir avant 23h. Outre le manque de sommeil, le décalage des films du soir a également des conséquences sociales, empêchant certains publics de visionner, notamment en famille, l'intégralité d'un programme. L'Arcom a plusieurs fois alerté sur la tardiveté des horaires de diffusion ainsi que sur le décalage fréquent entre l'horaire annoncé et celui de diffusion réelle, sans résultat. Une concertation avait été organisée en 2019 avec les responsables de différents groupes, mais celle-ci n'a donné aucun résultat. Il n'existe pas de cadre juridique dans le domaine audiovisuel définissant un horaire de début de soirée, et il relève de la liberté éditoriale. C'est pourquoi Mme la députée demande à M. le ministre de bien vouloir s'emparer du problème et d'écouter les réclamations de l'Arcom.
Le législateur a souhaité garantir la liberté de communication audiovisuelle à l'article 1er de la loi n° 86 1067 du 30 septembre 1986 qui dispose que son exercice ne peut être limité que par des motifs qu'il énumère, au nombre desquels figure par exemple le respect de la dignité de la personne humaine, la sauvegarde de l'ordre public ainsi que la protection de l'enfance et de l'adolescence. La loi a confié à une autorité publique indépendante, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), le soin de garantir l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle et de s'assurer que les éditeurs de services de radio et télévision respectent les principes garantis par la loi. Elle dispose à cette fin d'un pouvoir de sanction en cas de non-respect des dispositions de la loi du 30 septembre 1986. Les éditeurs de services, publics comme privés, sont ainsi libres de leur programmation dans les limites qui viennent d'être rappelées et qui sont contrôlées et sanctionnées par l'instance de régulation. Ils peuvent donc librement fixer les horaires de diffusion de leurs programmes. En revanche, des règles ont été élaborées afin que ces horaires de diffusion soient conformes à ceux qui sont communiqués préalablement aux téléspectateurs. L'ARCOM a introduit dans les conventions des chaînes privées des stipulations en matière de respect des horaires et de la programmation : « L'éditeur fait connaître ses programmes au plus tard dix-huit jours avant le premier jour de diffusion des programmes de la semaine concernée. Il s'engage à ne plus les modifier dans un délai inférieur à quatorze jours par rapport au jour de diffusion, celui-ci inclus, sauf exigences liées aux événements sportifs et aux circonstances exceptionnelles : événement nouveau lié à l'actualité ; problème lié aux droits protégés par le code de la propriété intellectuelle ; décision de justice ; incident technique ; intérêt manifeste pour le public décidé après concertation entre les chaînes concernées ; contre-performance d'audience significative des premiers numéros ou épisodes d'une série de programmes. Lors de la diffusion de ses émissions, l'éditeur respecte les horaires de programmation préalablement annoncés, sous réserve des contraintes inhérentes au direct, dans les conditions fixées aux alinéas précédents. ». Le cahier des charges de France Télévisions comporte également des dispositions en la matière. L'article 19 relatif aux horaires de programmation prévoit en effet que : « La société met en œuvre les règles de respect des horaires et de la programmation définies en accord avec l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique. Elle fait connaître ses programmes deux semaines avant leur diffusion et ne peut les modifier, dans ce délai, sauf circonstances particulières le justifiant. Par dérogation aux deux alinéas précédents, la structure de la grille du service de télévision Franceinfo et ses évolutions sont rendues publiques dès qu'elles sont déterminées, sauf en cas de survenance d'un événement exceptionnel et majeur lié à l'actualité. » L'ARCOM dispose d'un pouvoir de sanction en cas de non-respect par les éditeurs des stipulations des conventions des chaînes privées et des dispositions du cahier des charges de France Télévisions. Dans le cadre de sa mission de contrôle des obligations réglementaires et conventionnelles des éditeurs, le régulateur procède à des relevés afin de s'assurer que les horaires de diffusion communiqués sont respectés. La dernière observation réalisée par l'ARCOM sur le premier semestre 2022 révèle ainsi une nette amélioration. L'écart moyen sur l'ensemble des chaînes nationales gratuites s'établit désormais à 2 minutes 49 secondes, contre 3 minutes et 54 secondes en 2021. L'ARCOM n'a pas effectué de nouveaux relevés horaires sur les programmes de première partie de soirée en 2023. En effet, l'Autorité a constaté que la majorité des éditeurs avaient tenu compte, à partir de 2022, des observations qui leur avaient été adressées en décembre 2021, et communiquaient désormais un horaire plus conforme à la réalité de leur programmation. Par ailleurs, l'Autorité a relevé que le nombre de téléspectateurs qui lui adressaient des alertes, via son site Internet, au sujet des retards horaires avait nettement diminué en 2023 : 135, alors qu'il y en avait 300 sur les seuls six premiers mois de 2022, ce qui correspond à une décrue d'environ 78 %. Il convient de noter, s'agissant spécifiquement des cas de France 2 et de France 3, que l'alignement des débuts de premières parties de soirée de ces deux chaînes aux alentours de 21 h 05 – 21 h 10 s'explique par certains choix de programmation appréciés du public tels qu'un feuilleton quotidien permettant de valoriser la création audiovisuelle française ou un magazine d'actualité sportive.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.