Mme Florence Lasserre interroge M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur les ambitions du Gouvernement afin de faire évoluer la législation du travail sur l'organisation des déplacements professionnels des salariés afin de garantir le respect de leur vie privée et leur droit à la déconnexion. Un déplacement professionnel est une mission effectuée par un salarié dans le cadre de ses fonctions, mais en dehors du lieu de travail habituel. À cette occasion, son contrat de travail n'est pas modifié : la rémunération et le temps de travail restent strictement les mêmes et l'employeur doit veiller à assurer la sécurité et la protection de son salarié. Pour ce qui est des frais de déplacement, la loi impose que l'employeur prenne en charge les frais de déplacement ou les rembourse si son ou ses salariés les ont avancés. Mais la réglementation est muette quant à la possibilité pour un employeur d'imposer à plusieurs de ses salariés qui effectuent le même déplacement sur plusieurs jours, de partager leurs chambres d'hôtel ou gîtes à plusieurs. Sous couvert de vouloir faire des économies, certains employeurs peu scrupuleux sont ainsi laissés libres d'imposer de partager une chambre d'hôtel à plusieurs. Alors que l'éloignement de la cellule familiale et le travail en dehors de son cadre habituel constituent déjà d'importants facteurs de risques psychosociaux, imposer de partager une chambre à plusieurs collaborateurs augmente considérablement les risques de stress et porte atteinte au droit à la vie privée de chacun, autant qu'au droit à la déconnexion. Aussi, elle souhaite savoir si le Gouvernement envisage de garantir à tous les salariés leur droit à la vie privée pendant leurs déplacements professionnels, en leur accordant un droit de refuser de partager leur chambre avec un ou plusieurs collègues, sans que cela ne puisse constituer un motif valable de licenciement.
La réglementation actuelle garantit déjà le respect de ces obligations, en particulier à l'occasion des déplacements professionnels. Ainsi, en matière de remboursement de frais, pour le régime social, le salarié est présumé être en grand déplacement lorsqu'il accomplit une mission professionnelle et qu'il est empêché de regagner sa résidence en raison des deux conditions suivantes : - d'une part, la distance séparant le lieu de résidence du lieu de déplacement est au moins égale à 50 km (trajet aller ou retour) ; - d'autre part, les transports en commun ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à 1 h 30 (trajet aller ou retour). La jurisprudence a posé le principe selon lequel l'employeur doit obligatoirement prendre en charge les frais engagés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur. Ces frais ne peuvent pas être imputés sur sa rémunération. Cette obligation s'impose à l'employeur même lorsque la loi, une convention ou un accord ne le précisent pas (Cass. soc., 25 févr. 1998, n° 95-44.096). L'employeur n'est pas autorisé à imposer des « arrangements » en vue de réaliser des économies. En effet, à défaut de disposition conventionnelle ou contractuelle relative à la prise en charge des frais professionnels, l'employeur ne peut pas fixer unilatéralement les remboursements des frais de déplacement à un montant inférieur à leur coût réel. Si tel était le cas, le salarié serait fondé à demander un complément de remboursement des frais. En effet, les frais qu'un salarié justifie avoir engagés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur doivent être remboursés sans qu'ils ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due (Cass. soc., 23 sept. 2009, n° 07-44.477, n° 1895 FS - P + B). En conséquence, le licenciement d'un salarié fondé sur le fait que ce dernier aurait demandé le respect du droit en matière de remboursement de frais pourrait être reconnu par le juge comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.