M. Yannick Monnet interroge M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur la nécessaire lutte contre le taux élevé d'accidents du travail dans le pays et sur la possibilité d'accélérer la réalisation (obligatoire) dans chaque entreprise d'un document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP). La campagne de prévention « Sécurité au travail : responsabilité de l'entreprise, vigilance de tous » qui a été lancée par le Gouvernement à l'automne 2023 avait pour objectif d'endiguer le fléau des accidents du travail mortels. C'est en effet un véritable sujet : d'après les dernières données disponibles de l'assurance maladie, 600 000 accidents du travail ont été dénombrés en 2022, dont 545 mortels. Des chiffres sous-estimés car plusieurs catégories de travailleurs échappent aux statistiques (travailleurs indépendants, détachés ou non déclarés, etc.). Le service statistique du ministère du travail et du plein emploi, la DARES, a publié en novembre 2022 une enquête sur l'accidentalité en 2019, avec des données couvrant un spectre plus large et qui recense pour sa part 783 600 accidents du travail, dont 780 décès. Quoi qu'il en soit, la France se classe au tout dernier rang des 27 pays européens, avec 3,53 accidents mortels du travail pour 100 000 salariés. Le non-respect, par de nombreuses entreprises, de l'obligation d'établir un DUERP est une véritable anomalie. En effet, le nombre d'entreprises respectant l'obligation légale de tenir un DUERP à jour s'élève à seulement 45 %. Si les entreprises de plus de 50 salariés respectent à plus de 90 % cette obligation légale, elles sont seulement 38 % à être dans la conformité pour ce qui concerne les entreprises de moins de 10 salariés. C'est donc essentiellement en direction des petites et moyennes entreprises qu'un effort doit être mené, tout particulièrement. La transmission systématique et obligatoire d'un DUERP à l'administration, avec un contrôle et des relances en cas de manquement, permettrait sans doute de résorber rapidement le retard inacceptable pris par la France en la matière. Une mission de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) a semble-t-il été chargée, ces derniers mois, d'étudier les modalités possibles d'une plateforme où les DUERP seraient déposés. Les enjeux concernent à la fois la vie des salariés, mais également la sécurité juridique des employeurs, l'absence de DUERP caractérisant une « faute inexcusable de l'employeur » en cas d'accident du travail. Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître les conclusions de la mission de l'IGAS et si cette plateforme pourrait être un outil efficace pour progresser rapidement vers une application effective de la loi par l'ensemble des entreprises du pays.
L'accord national interprofessionnel du 9 décembre 2020 pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail identifie le Document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP) comme un levier pour décliner de façon opérationnelle une politique de prévention primaire des risques professionnels dans l'entreprise. Il prévoit la conservation des versions successives des DUERP dans le but d'assurer une « traçabilité collective » des risques professionnels. La loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 renforçant la prévention et la santé au travail renforce, en cohérence, le DUERP en le rehaussant au niveau législatif, en mettant l'accent sur l'accompagnement des employeurs et le dialogue social et en prévoyant que le DUERP et ses mises à jour sont conservés pendant une période de 40 ans minimum et qu'ils sont « tenus à la disposition des travailleurs, des anciens travailleurs ainsi que de toute personne ou instance pouvant justifier d'un intérêt à y avoir accès ». La loi prévoit également le dépôt dématérialisé des versions du DUERP sur un portail numérique. L'objet de ce portail est de permettre l'accès des anciens travailleurs, notamment, à ces documents. En revanche, il ne constitue en aucun cas une plateforme de déclaration à l'administration, qui n'a pas vocation à la gérer ni à l'administrer, cette tâche étant dévolue, selon les termes de la loi, aux organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel. Sur la base des recommandations de l'inspection générale des affaires sociales publiées en décembre 2023, pointant un bilan bénéfice-risque négatif pour ce portail, et en accord avec le Comité national de prévention et de santé au travail, le ministère en charge du travail procède à des concertations avec les partenaires sociaux afin d'identifier une solution alternative, dans une optique de renforcement de la traçabilité des risques au bénéfice de la prévention et de la santé des travailleurs et des anciens travailleurs. En parallèle, le ministère en charge du travail et l'ensemble des organismes de prévention nationaux définissent et mettent en œuvre sur le territoire, au travers du plan santé au travail et du plan pour la lutte contre les accidents graves et mortels, plusieurs actions concrètes à destination des entreprises pour les accompagner toujours davantage vers une démarche vertueuse de prévention, dont la pierre angulaire reste l'évaluation des risques professionnels. Parmi ces actions figurent par exemple des campagnes de communication à destination du grand public ou au sein de branches professionnelles pour la promotion et l'appropriation par les entreprises des outils d'aide à l'évaluation des risques professionnels, ou encore des actions d'information et de sensibilisation des services de prévention et de santé au travail sur la collecte des DUERP, notamment dans le cadre des campagnes de renouvellement de l'adhésion des entreprises à ces services. Enfin, les services de prévention et de santé au travail (SPST) sont mobilisés au quotidien pour accompagner les entreprises à la mise en place de cette évaluation et des actions de prévention qui en découlent. Il s'agit de l'une des composantes de l'offre socle de services proposée à leurs entreprises adhérentes et pour laquelle les SPST seront prochainement certifiés.
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