M. André Chassaigne interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur les actions publiques à engager face à la pollution de l'environnement et au risque sanitaire sur la population de communes situées à proximité de sites industriels sensibles. Des enquêtes ont plusieurs fois été réalisées sur la pollution de l'air, de l'eau et du sol par les PFAS (per- et polyfluoroalkylées) autour de sites industriels, notamment de la région lyonnaise. Cette famille de produits est largement utilisée par des usines classées « Seveso seuil haut » dans la fabrication de produits de consommation courante : textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, revêtements antiadhésifs, cosmétiques, produits phytosanitaires. Ces PFAS, reconnus dangereux pour la santé humaine, continuent d'être massivement utilisés, se retrouvant dans l'environnement, qu'ils polluent durablement. Ils sont même considérés comme étant « éternels », tant leur persistance et leur dissémination est importante. On les retrouve maintenant dans les cours d'eau et dans tous les océans de la planète. Or de nouvelles enquêtes journalistiques considèrent qu'il y a eu de graves défaillances dans le contrôle des usines et de leurs rejets et au niveau du taux de contamination de l'eau du robinet et des sols cultivés ou utilisés pour des activités de plein air. Les prélèvements effectués, plus particulièrement à Pierre-Bénite (Rhône) et les communes avoisinantes, révèlent une contamination générale de l'environnement liée aux activités de divers sites industriels. Des élus, des associations, des ONG et des citoyens ont plusieurs fois interpellé les services de l'État, les ministères et les gestionnaires du réseau d'eau potable, sans retour ou sans réponse probantes et rassurantes. Ils demandent de nouvelles enquêtes épidémiologiques pour évaluer l'impact sur la santé autour des sites, un audit de l'action des services de l'État, une réglementation nationale et européenne (Reach) plus stricte ou l'arrêt de la production et de l'utilisation de tous les PFAS. À la lumière de ces enquêtes édifiantes, il lui demande de répondre aux inquiétudes de la population et d'engager toutes les actions publiques nécessaires à la préservation de la santé et de l'environnement autour de ces sites industriels producteurs ou utilisateurs de PFAS.
Les composés perfluorés ou PFAS (per and polyfluoralkyl substances) sont une large famille de substances, utilisées dans de nombreux produits : traitements imperméabilisants, revêtements antiadhésifs, mousses à incendie, emballages alimentaires, cosmétiques, etc. Extrêmement persistants, les PFAS se retrouvent dans tous les compartiments de l'environnement (eau, air, sol) et peuvent contaminer les populations notamment par le biais de l'alimentation. Les aliments peuvent être contaminés via la terre ou l'eau (utilisées pour cultiver et nourrir les animaux) mais aussi via les emballages alimentaires et les équipements de transformation des aliments. L'eau du robinet peut également être un vecteur de contamination. L'exposition à certains de ces composés pourrait générer des effets néfastes sur la santé. Des études scientifiques ont associé l'exposition à des PFAS et certaines pathologies. Les études de biosurveillance (imprégnation biologique) menées en France métropolitaine par Santé publique France (SpF) montrent que la population est exposée à ces substances. L'enquête Esteban, menée entre 2014 et 2016 chez 249 enfants et 744 adultes, et dont les résultats sur les composés perfluorés ont été publiés en 2019, a analysé 17 PFAS : 7 étaient quantifiées à plus de 40 % chez les adultes et 6 chez les enfants, le PFOA (acide perfluorooctanoïque) et le PFOS (acide perfluorooctanesulfonique) étaient quantifiés à 100 % chez les enfants et les adultes. Les niveaux de PFAS en France étaient généralement plus faibles que ceux observés dans d'autres pays (États-Unis, Canada). À la demande de la Direction générale de la santé, le laboratoire d'hydrologie de Nancy de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) avait réalisé une campagne nationale exploratoire en 2009 et 2010 sur les eaux brutes et les eaux traitées afin de caractériser la présence de composés perfluorés dans les eaux destinées à la consommation humaine. Parmi les 10 composés recherchés simultanément, les plus fréquemment détectés étaient le PFOA, le PFOS, le PFHxS et le PFHxA. Dans les aliments, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a mené des analyses dans le cadre de plusieurs études, notamment l'étude de l'alimentation totale 2 (EAT 2) publiée en juin 2011 qui a analysé 16 composés perfluorés. Une nouvelle étude (EAT 3) est en cours et inclura à nouveau des analyses de composés perfluorés (19 seront recherchés). Dans les sols, les composés perfluorés font l'objet d'un suivi rapproché : le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a publié en décembre 2020 un état de l'art des connaissances de ces substances et de leur présence dans les sites et sols pollués. Par ailleurs, diverses mesures réglementaires ont été instaurées en vue de maitriser les expositions aux PFAS. Au niveau international, la convention de Stockholm visant à encadrer certains polluants organiques persistants, réglemente plusieurs composés de la famille des PFAS : le PFOS est restreint depuis 2009 et le PFOA est interdit à l'import, l'export et à la production, depuis 2020. Depuis le 10 juin 2022, la famille de l'acide perfluorohexane sulfonique (PFHxS), ses sels et composés apparentés sont également également inclus dans ladite Convention et dont donc interdits d'import, d'export et de production. Les PFAS sont une priorité de la stratégie de l'Union européenne pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques publiée par la Commission européenne le 14 octobre 2020 et déclinée dans sa feuille de route présentée le 25 avril 2022. Elle prévoit des mesures de restriction des utilisations des PFAS. De plus, les Pays-Bas et l'Allemagne, avec le soutien de la Norvège, du Danemark et de la Suède, préparent une proposition de restriction visant à interdire toute la famille des PFAS, qui devrait être transmise à l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) dès janvier 2023. La France soutient bien évidemment cette démarche. S'agissant de la réglementation dans les eaux de consommation, les PFAS font partie des nouveaux paramètres introduits à l'occasion de la nouvelle directive européenne de décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Celle-ci prévoit à compter du 1er janvier 2026 une nouvelle limite de qualité fixée à 0,1 µg/L pour la somme des 20 PFAS considérés comme préoccupants. Lorsque des lignes directrices techniques relatives aux méthodes d'analyse auront été élaborées, cette directive européenne fixe également une limite de qualité à 0,5 µg/L pour le total des PFAS. Ces substances devront ainsi être recherchées dans l'eau du robinet dans le cadre du contrôle sanitaire mis en œuvre par les Agences régionales de santé (ARS). Ainsi, les PFAS font l'objet d'une attention particulière et l'État est déterminé à poursuivre toutes les études visant à améliorer les connaissances sur les expositions et les impacts sur la santé et l'environnement de ces substances. Suite aux questionnements soulevés par l'enquête diffusée le 12 mai dernier sur la présence de PFAS en aval du site industriel de Pierre-Bénite, la préfecture du Rhône, la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et l'Agence régionale de santé (ARS) se sont mobilisées et coordonnées pour objectiver la situation et prendre les mesures nécessaires.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.