Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Philippe Gosselin
Question N° 12997 au Ministère de la culture


Question soumise le 21 novembre 2023

M. Philippe Gosselin attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur l'avenir des scènes de musiques actuelles (SMAC). Le label SMAC a été créé en 2010 à l'initiative du Gouvernement. Il a ensuite été revu dans le cadre de la loi dite « LCAP » - liberté de création, architecture et patrimoine - et a fait l'objet d'une mise à jour du cahier des missions et des charges promulguées par arrêté du 5 mai 2017. Cela confère aux lieux labellisés des engagements en termes artistiques, professionnels, culturels, territoriaux et citoyens, au titre d'une activité de création, de diffusion, d'éducation artistique et culturelle et d'accompagnement des pratiques dans le domaine des musiques actuelles. Pour mettre en œuvre ces engagements, le cahier des missions et des charges prévoit des moyens artistiques, humains, matériels et financiers. Les SMAC ont en moyenne un budget de 1 270 169 euros, autofinancé à 41 %, ce qui en fait le label dont la part d'autofinancement est l'une des plus conséquentes. Dans la part de subventions publiques perçues, ces lieux sont par ailleurs majoritairement soutenus par les collectivités territoriales, au premier rang desquelles les villes et les agglomérations qui la plupart du temps sont aussi propriétaires du lieu. Ainsi en moyenne, l'État finance les SMAC à hauteur de 135 000 euros quand les collectivités les financent pour 499 077 euros, soit près de 4 fois plus. Or, depuis 2017, le secteur des musiques actuelles fait face à des crises successives et multifactorielles : d'abord les attentats de 2015, puis la crise sanitaire et ses conséquences durables, puisque les salles de musiques actuelles ont été fermées le vendredi 13 mars 2020 et les concerts debout n'ont été à nouveau autorisés qu'à compter du 16 février 2022. À l'issue de cette crise sanitaire, le secteur fait face à une crise inflationniste en partie due à la guerre en Ukraine. Celle-ci impacte les coûts de l'énergie (+ 100 % en 2022), les salaires (+ 6,14 % en moyenne), les coûts liés à la venue des artistes (+ 9 % pour l'hôtellerie et la restauration), ceux des prestataires techniques et de sécurité. Cette importante hausse des charges pour les SMAC (de l'ordre de 15 à 20 % selon les lieux) ne s'accompagne, hélas, évidemment pas d'une hausse des ressources. En effet, les subventions stagnent dans le meilleur des cas, voire baissent. Soit parce que les collectivités sont elles-mêmes confrontées à l'inflation, soit pour des raisons politiques. S'agissant des salaires, les SMAC, au même titre que les autres labels du spectacle vivant du ministère de la culture, appliquent pour la plupart la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles (CCNEAC). Les minima conventionnels dans cette branche ont fait l'objet de plusieurs revalorisations en décembre 2021, juin 2022 et juin 2023. Ils ont ainsi augmenté de 6,14 % en moyenne sur la période. On constate alors un décrochage général des salaires minima dans la CCNEAC : 47 % des lieux de musiques actuelles ne sont en effet plus en capacité de respecter ces minima et sont ainsi contraints de sous-classer un ou plusieurs postes pour des raisons économiques. Pour tenter de répondre à ces augmentations de charges, les salles augmentent sensiblement leur part de recettes propres et notamment leurs tarifs de billetterie tout en gardant la volonté de rester accessibles économiquement, conformément au cahier des missions et des charges. Aussi en matière de création, il en résulte, d'après les résultats d'une enquête du ministère auprès d'une trentaine de SMAC, que les marges artistiques de celles-ci se réduisent pour même devenir négatives dans certains cas. C'est-à-dire que ces lieux labellisés ne disposent plus de moyens pour assumer les missions qui leur sont confiées dans le cahier des missions et des charges. Elles doivent donc dégager elles-mêmes des moyens via des ressources propres pour financer les activités. Cela occasionne des dommages considérables, à la fois sur la préservation des diversités culturelles existantes mais aussi sur le développement des nouvelles esthétiques (et des futurs artistes). Cela peut avoir pour conséquences dans le réseau des SMAC des licenciements économiques, le non-remplacement de salariés, des difficultés à recruter, l'arrêt de programmations, la diminution notoire de la prise de risques artistiques, la diminution du nombre de dates par saison, l'augmentation des tarifs et inéluctablement des exercices 2023 en déficit, alors même que leur part d'autofinancement s'est accrue significativement. Ces différents arguments et exemples montrent que, dans le contexte présent, les lieux labellisés SMAC n'ont plus les moyens de mener à bien les missions qui leur sont confiées par le Gouvernement au titre de leur labellisation. Pour répondre aux difficultés actuelles, il lui demande quels moyens le Gouvernement entend accorder aux SMAC et quelle sera la politique du Gouvernement à l'égard de ce réseau, de ces scènes qui ont une place privilégiée dans les territoires, devenues même incontournables.

Réponse émise le 12 décembre 2023

Le réseau des scènes de musiques actuelles (SMAC) est constitué de 92 lieux déployés sur l'ensemble du territoire, en zones urbaines et rurales. Il représente aujourd'hui un outil central de la politique culturelle du ministère de la culture en faveur des musiques actuelles. Face aux risques de concentration qui menacent une partie de ce secteur, les salles labellisées SMAC portent des ambitions de diversité artistique et culturelle. Les SMAC, comme l'ensemble du champ culturel, font face depuis 2020 à une succession de crises. Dès 2020, l'État s'est engagé massivement pour accompagner les professionnels de la musique avec des mesures nouvelles et des crédits exceptionnels de soutien reversés pendant la crise sanitaire (2020 et 2021) soit par le réseau des directions régionales des affaires culturelles, soit par l'établissement public du ministère de la culture, le centre national de la musique. Puis, face à la hausse des coûts de l'énergie, l'État a rapidement mis en place un certain nombre de mesures d'aides transversales dont ont pu bénéficier les SMAC (bouclier tarifaire, prix garantis, amortisseur électricité…). Des dispositifs exceptionnels ont également été alloués en février 2023 par le ministère de la culture à certaines structures particulièrement impactées par la hausse des coûts énergétiques. Si le contexte budgétaire est peu propice à des augmentations généralisées, il est nécessaire de repenser collectivement les missions et les modèles économiques des lieux labellisés et notamment des SMAC. À cet effet, le ministère est engagé aux niveaux central et déconcentré dans le plan d'action « Mieux produire et mieux diffuser, un projet pour le spectacle vivant », en lien avec les structures labellisées et les collectivités locales pour répondre aux enjeux de coproductions et d'une meilleure diffusion des œuvres du spectacle vivant. Le ministère de la culture, en dialogue avec les collectivités territoriales, restera attentif à ce réseau sans équivalent au niveau international et essentiel au maintien de la vitalité et de la diversité des propositions artistiques en musiques actuelles.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion