M. Laurent Croizier attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur le dispositif du « 100 % santé » pour les lunettes. Le comité de suivi de la réforme 100 % santé, réuni le 25 janvier 2022, a donné un éclairage sur l'efficacité de la réforme en faveur de l'accès aux soins pour tous et pour la lutte contre le non-recours aux soins. Au total, dix millions de Français ont bénéficié de ce dispositif, voyant leurs lunettes, leurs soins dentaires et leurs audioprothèses totalement pris en charge et le recours à ce type de soins a augmenté depuis la mise en place de la réforme. Concernant les lunettes, pour les montures, on sait qu'elles doivent être conformes aux normes de qualité européennes et disposer d'un marquage CE qui garantit leur qualité. Les verres sont, eux, tous contrôlés afin de garantir leur conformité aux exigences techniques. Néanmoins, ce nouveau dispositif de remboursement des montures et des verres de lunettes semble favoriser les équipements à bas coût, qui sont pour la plupart de fabrication chinoise. En outre, comme l'indique la Cour des comptes dans son rapport de juillet 2022 sur le bilan de la réforme, le 100 % santé s'accompagne d'une augmentation du reste à charge pour les équipements du panier libre en raison d'une diminution des remboursements par l'assurance maladie et, pour les organismes complémentaires, par la diminution du plafond de prise en charge des montures. Ces changements ont un impact potentiel sur la production française et sur l'activité des opticiens et donc sur l'emploi dans ce secteur économique. Compte tenu de la volonté affirmée de réindustrialisation de la France et considérant que l'on dispose désormais d'un recul suffisant pour apprécier les externalités du dispositif, il souhaite souhaite connaître la position de M. le ministre et savoir si une évaluation de l'impact de la mesure sur l'activité économique et sur l'emploi va être effectuée.
Dans son rapport de juillet 2022 sur la réforme du 100% santé, la Cour des comptes rappelle l'inquiétude initiale des professionnels de l'optique qui prévoyaient lors de la mise en place de la réforme la fermeture de 3000 magasins sur les 12 000 implantés sur le territoire. Un an et demi après le début du déploiement de la réforme, la conclusion de la Cour des comptes est que ces craintes se sont révélées infondées. De fait, au début de sa mise en œuvre, les cibles de pénétration de la réforme prévoyaient déjà que les comportements des assurés témoigneraient d'un recours modéré aux produits du panier 100% dans le secteur de l'optique, du fait de moindres renoncements aux soins dans ce secteur. Un premier bilan de la réforme montre que les taux de pénétration du 100% santé effectivement réalisés ont même été inférieurs aux prévisions initiales en matière d'optique. Ainsi en 2021, 16% des verres et 14% des montures achetés correspondaient au panier 100% santé. Ce taux de pénétration n'apparaît ainsi pas de nature à déstabiliser économiquement le secteur de l'optique. Cette tendance est également confirmée par les chiffres de la consommation de verres et de montures. Après une baisse de la consommation enregistrée en 2020 en raison de la crise du Covid-19, un rebond des ventes a été enregistré en 2021 (+ 3% par rapport à la référence hors crise de 2019), montrant ainsi le dynamisme du secteur. Comme la Cour des comptes le montre, le nombre de patients achetant des montures ou des verres est resté stable depuis la mise en place de la réforme : il est de 15,5 millions en 2021, et 13,4 millions en 2020, soit une moyenne de 14,5 millions, proche du nombre de patients ayant acheté des équipements en 2018 et 2019. Nous ne disposons pas de données permettant de suivre plus finement l'évolution de l'emploi dans ce secteur, mais ces données montrent déjà que la consommation des équipements d'optique n'a pas été bouleversée par la réforme du 100% santé. Enfin, concernant l'adaptation des fabricants français aux exigences du panier 100% santé, la Cour des comptes mentionne dans son rapport l'existence de certains acteurs qui parviendraient à produire des montures à tarif réduit en France. Par ailleurs, il faut rappeler que la réforme du 100% santé ne fait pas obstacle au développement de produits faits en France qui continueront très certainement à trouver leur public parmi les assurés.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.