M. Pierre Cordier appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les difficultés rencontrées par les patients frontaliers pour se faire délivrer en pharmacie en France certains médicaments prescrits par des médecins belges. Dans le cadre de la zone organisée d'accès aux soins transfrontaliers (ZOAST) des Ardennes, pour garantir un parcours de soin facilité aux patients français, de nombreux patients se dirigent vers la Belgique pour consulter des spécialistes. Les pharmaciens proches des frontières rencontrent des difficultés pour assurer la continuité des soins car la présentation d'une ordonnance belge rédigée par un médecin spécialiste n'est pas conforme à la législation française. Cela concerne de nombreux médicaments nécessitant une ordonnance sécurisée pour les stupéfiants ou assimilés (ex : Skénan, Ritaline, Rivotril), une prescription initiale annuelle hospitalière ou d'un spécialiste (ex : Rivotril, Ritaline), ou encore une ordonnance d'exception à délivrance particulière (ex : Clozapine). Les pharmaciens ne peuvent donc que refuser la délivrance de ces médicaments et mettre les patients dans une situation qui peut être dangereuse, ou se mettre dans l'illégalité, sachant que la plupart de ces médicaments ne peuvent même pas être re-prescrits par les médecins traitant généralistes, ce qui pose le problème de la continuité des soins des patients. En mars 2020, le Gouvernement a déjà été interrogé sur ce sujet important pour les Ardennais, mais malgré 8 renouvellements de la question écrite n° 27559, aucune réponse n'a été apportée. Il souhaite par conséquence connaître les mesures envisagées par le Gouvernement afin de permettre à ces pharmaciens frontaliers de délivrer les médicaments nécessaires aux patients pour maintenir un parcours de soin simple et cohérent dans le cadre de la ZOAST.
Les Etats membres de l'Union européenne dont la France ont adopté plusieurs dispositifs afin de simplifier l'accès aux soins pour les personnes qui vivent près d'une frontière. Les règlements européens de coordination des systèmes de sécurité sociale (règlement 883/2004 et règlement 987/2009) prévoient ainsi les modalités de prise en charge des soins "médicalement nécessaires en cas de séjour temporaire" dans un autre Etat membre de l'Union européenne (UE), de l'Espace économique européen (EEE) ou en Suisse. Ces soins sont ceux qui s'avèrent nécessaires du point de vue médical afin que la personne assurée ou son ayant droit ne soit pas contrainte de rejoindre, avant la fin de la durée prévue de son séjour, son État de résidence pour y recevoir le traitement nécessaire. Il s'agit de soins qui ne peuvent pas faire l'objet d'une programmation et ne sont donc pas soumis à autorisation préalable de la caisse d'assurance maladie de l'intéressé : ils concernent les personnes qui, lors d'un séjour touristique ou pour tout autre motif, notamment professionnel, dans un autre Etat membre, tombent malades ou se blessent et doivent donc être soignées dans cet Etat. Ces règlements organisent également la prise en charge des soins dits programmés. Les soins programmés sont ceux que le patient planifie à l'avance et qui constituent la raison principale du déplacement dans un autre Etat membre de l'UE, de l'EEE ou en Suisse. Les soins programmés doivent être autorisés par la Caisse d'assurance maladie préalablement au départ dans l'autre Etat membre. Une directive relative aux droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, la directive 2011/24/UE, est venue s'ajouter aux dispositions existantes afin de faciliter la prise en charge des soins programmés. Il existe désormais une liste de soins programmés qui sont soumis à autorisation préalable (formulaire européen S2 « droit aux soins programmés »). Ces soins sont les suivants : - les soins qui requièrent au moins une nuit dans un établissement de soins, c'est-à-dire les soins hospitaliers, y compris les soins de suite et les cures thermales avec hospitalisation ; - ceux nécessitant le recours à des infrastructures ou à des équipements médicaux hautement spécialisés et coûteux, qui figurent sur une liste établie par arrêté ministériel (notamment les IRM, scanner, le traitement du cancer, les soins cliniques et biologiques d'assistance médicale à la procréation). S'agissant des autres soins programmés, également dénommés soins de ville ou ambulatoires, ils ne nécessitent pas l'obtention d'une autorisation préalable. Les patients sont libres de circuler dans un autre Etat afin de recevoir de tels soins. Dans le cas des habitants du nord du département de Meurthe-et-Moselle, les dispositions de la directive permettent un accès aux soins de ville au Luxembourg et en Belgique. Après avoir bénéficié des soins, les patients doivent demander le remboursement à leur caisse d'assurance maladie ou directement via leur compte Ameli. Les patients peuvent choisir de se faire rembourser sur la base de la législation française ou sur la base de la législation de l'Etat dans lequel les soins ont été réalisés. Le délai de remboursement par l'assurance maladie française a pu être long en raison du nombre de dossiers mais a vocation à se réduire progressivement grâce à la meilleure information des acteurs concernés. En complément de ces dispositifs, des conventions transfrontalières de coopération sanitaire ont été signées entre la France et les Etats frontaliers dont le Luxembourg. Ces conventions permettent l'adoption de conventions locales afin de s'adapter au mieux aux besoins des territoires concernés. A ce titre, la France et le Luxembourg ont signé une convention de coopération transfrontalière sur les secours d'urgence et le transport sanitaire urgent transfrontaliers ainsi qu'un protocole local pour l'exécution de cette convention. De plus, il existe une convention de zone organisée d'accès aux soins transfrontaliers "ZOAST" qui couvre le sud de la province belge du Luxembourg et une partie de Meurthe-et-Moselle. Cette convention organise la coopération entre les établissements hospitaliers de la zone et permet la facilitation de certaines démarches administratives. Les établissements belges disposent ainsi de lecteurs de cartes vitales qui leur permettent de télétransmettre les factures aux caisses d'assurance maladie françaises. Enfin, les services du ministère chargé de la santé et de la prévention poursuivent leurs travaux pour améliorer la coopération sanitaire avec les Etats frontaliers.
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