Mme Andrée Taurinya attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'enquête ouverte en mars 2021 par Cour pénale internationale (CPI) concernant des allégations de crimes de guerre commis sur le territoire palestinien occupé par des dirigeants israéliens et par des groupes armés palestiniens. En mars 2021, la procureure de la CPI Fatou Bensouda a annoncé l'ouverture d'une enquête sur la situation en Palestine. Cependant, depuis cette annonce, aucune avancée n'a eu lieu. L'arrivée du nouveau procureur en juin 2021, Karim Khan, n'a pas permis de progrès dans l'enquête. Aucun membre de son bureau ne s'est rendu en Palestine pour enquêter. Sur les dix enquêtes prioritaires de la CPI en 2023, la Palestine est celle qui bénéficie du budget le plus réduit. Dans une réponse à une question parlementaire écrite posée par le député Sébastien Nadot le 6 avril 2021 (question n° 37931), le ministère de l'Europe et des affaires étrangères avait indiqué que « la France ne commente pas les décisions et procédures judiciaires de la Cour ». La position française a depuis lors évolué, comme en témoigne le soutien ferme de la France à l'enquête initiée par la Cour pénale internationale concernant l'agression russe contre l'Ukraine. L'attaque menée le 7 octobre 2023 par des groupes armés palestiniens liés au Hamas contre Israël a causé la mort d'environ 1 400 Israéliens, pour la plupart des civils. Environ 240 Israéliens ont été pris en otage. Les bombardements israéliens initiés sur la bande de Gaza en réaction à cette attaque ont causé la mort de 8 300 Palestiniens, en majorité des civils et pour près de la moitié des enfants. Tous ces éléments constituent a minima des crimes de guerre au regard des conventions de Genève et pourront être l'objet des investigations de la CPI dans le cadre de l'enquête ouverte en 2021. Au regard de la situation actuelle, elle lui demande donc comment la France compte, dans le cadre de son engagement en faveur de la lutte contre l'impunité au niveau international, soutenir l'enquête de la CPI ouverte en 2021 et faire en sorte qu'elle reçoive toutes les ressources nécessaires.
La Cour pénale internationale (CPI) est compétente pour les faits commis sur le territoire d'un État partie au Statut de Rome et/ou par les ressortissants d'un État partie au Statut de Rome. Le 2 janvier 2015, la Palestine a adhéré au Statut de Rome. Le 3 mars 2021, le Procureur de la CPI a annoncé l'ouverture d'une enquête sur la situation en Palestine, faisant suite à la décision rendue par la Chambre préliminaire I, le 5 février 2021, sur sa compétence territoriale. Dans cette décision, la Chambre préliminaire a estimé que la compétence territoriale de la Cour s'étendait à Gaza et à la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est (territoires occupés depuis 1967). La CPI est donc compétente pour des faits commis sur ces territoires par des Palestiniens ou par des nationaux d'autres États comme pour des faits commis par des Palestiniens en dehors de ces territoires. Peu après sa prise de fonction en juin 2021 comme Procureur de la CPI, M. Karim Khan a constitué une équipe dédiée à l'enquête sur la situation en Palestine. Il a depuis rappelé, à plusieurs reprises, l'importance accordée par la CPI à cette enquête. Le 29 octobre 2023, au Caire, le Procureur de la CPI a rappelé « les obligations juridiques découlant du droit des conflits armés » et indiqué que « la prise d'otages constitue une grave violation des Conventions de Genève […] un crime relevant du Statut de Rome » et que « le fait d'entraver l'acheminement des secours, en vertu des dispositions des Conventions de Genève, peut constituer un crime relevant de la compétence de la Cour ». Le 4 décembre à New York, lors de la 22e Assemblée des États Parties (AEP) au Statut de Rome, M. Karim Khan a annoncé le recrutement, en 2024, d'un nouveau membre du personnel de niveau D1 « qui dirigera les enquêtes sur la Palestine et [lui] rendra compte directement. » La France continuera d'apporter son plein soutien à la CPI, laquelle, en tant qu'unique juridiction pénale internationale permanente et à vocation universelle, joue un rôle primordial dans la lutte contre l'impunité des crimes internationaux les plus graves. Elle œuvre en faveur de l'universalisation du statut de Rome et pour que la Cour puisse remplir sa mission de manière indépendante et impartiale, ce qui est essentiel pour que les victimes obtiennent justice. Elle met régulièrement à disposition de la Cour des magistrats et des enquêteurs. Elle apporte également un soutien financier à la CPI via ses contributions obligatoires (16 millions d'euros en 2024) et volontaires (830 000 euros en 2023) au budget de la Cour. La France a également soutenu, lors de la 22e AEP, le renforcement du budget de la CPI - il augmentera en 2024 de +7,9 % par rapport à 2023 (173,2 millions d'euros en 2023, 187 millions d'euros en 2024). La France poursuivra ses efforts en faveur du respect du droit international humanitaire et en faveur de la lutte contre l'impunité. Face au très lourd bilan civil des opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza et à la situation d'urgence humanitaire absolue, la France continue d'appeler au plein respect du droit international humanitaire, ainsi qu'à un cessez-le-feu immédiat et durable. Comme l'a noté le procureur de la CPI, un accès suffisant à l'aide humanitaire en fait indéniablement partie. La France continue également d'appeler à la libération immédiate et sans condition de tous les otages.
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