M. Gabriel Amard interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les mesures que le Gouvernement compte mettre en place pour végétaliser l'alimentation des Français. Les Français ont une consommation de viande annuelle de 85 kg par personne et de 210 kg de produits d'origine animale. Toutes les recommandations écologiques et de santé publique s'accordent à dire que cette consommation est bien trop importante et qu'il faut davantage végétaliser l'alimentation, notamment grâce à une consommation accrue de légumineuses en tant que sources de protéines. De plus, à l'heure où la ressource en eau tend à manquer, il est urgent de repenser les modèles de consommation. À chaque fois qu'on opte pour un repas végétarien, on économise 7 500 litres d'eau soit l'équivalent de 50 bains. Il faut également souligner le fait qu'il faut 7 900 litres d'eau pour produire un kilo de protéines carnées : c'est moitié moins pour un kilo de protéines végétales. Ces constats viennent corroborer le scénario Afterres de l'association Solagro qui préconise par exemple que 75 % des sources de protéines soient d'origine végétale. On le sait, d'ici à 2050, la consommation mondiale de viande rouge devra être réduite. Les experts de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) estiment que la production alimentaire devra augmenter de 60 % pour nourrir une population mondiale de plus de 9 milliards d'individus. Les scientifiques et agronomes s'accordent pour dirent que la consommation mondiale de fruits, de graines, de noix et de légumineuses devra doubler et que la consommation d'aliments tels que la viande rouge devra être réduite. Cependant un rapport de l'institut de recherche I4CE montre que la consommation de viande n'a plus diminué en France depuis 2013. Pire : elle a même légèrement augmenté ces dernières années, avec une forte progression des viandes de volailles et des produits carnés ultra-transformés. Il est donc urgent qu'une véritable politique publique pour inciter à la baisse de la consommation de viande soit mise en place. Le Gouvernement dépense, certes, un million d'euros par an dans la mise en œuvre de messages issus du dernier programme national nutrition santé (PNNS), mais il faut revoir à la hausse l'engagement de l'État notamment pour faire face aux lobbys de la publicité alimentaire. Le Gouvernement semble ne pas prendre la mesure de l'importante transition à réaliser. M. Jean-Christophe Combe, alors ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, s'est exprimé le 6 avril 2023 contre l'introduction de plus de menus végétariens dans les cantines scolaires, alors que cette mesure aurait aidé à inscrire dans le temps long et dans les consciences des plus jeunes concitoyens la nécessité de rompre avec un modèle alimentaire moribond. S'exprime donc clairement une insuffisance des politiques publiques d'une part et de blocage de solutions proposées d'autre part. Aussi il souhaite savoir ce que le Gouvernement prévoit de mettre en place concrètement pour atteindre des objectifs clairs et mesurables de végétalisation de l'assiette des Français.
De nombreuses mesures ont été mises en œuvre afin de favoriser la diversification des sources de protéines. Les gestionnaires de restauration collective sont accompagnés dans cette démarche dans le cadre du conseil national de la restauration collective (CNRC), qui associe l'ensemble des parties prenantes concernées : professionnels de la restauration collective, de l'industrie agroalimentaire, de la production agricole, collectivités, associations environnementales, parents d'élèves, professionnels de santé, etc. Depuis le 30 octobre 2018, un plan pluriannuel de diversification des sources de protéines est obligatoire : les gestionnaires des restaurants collectifs sont tenus de présenter à leurs structures dirigeantes un plan pluriannuel de diversification de protéines incluant des alternatives à base de protéines végétales dans les repas qu'ils proposent. Ce plan, qui visait précédemment les restaurants publics et à charge de service public, est étendu à la restauration d'entreprise le 1er janvier 2024. Un cadre général a été publié pour accompagner les acteurs de la restauration collective à la mise en œuvre de ce plan, et est disponible sur la plateforme « ma cantine ». Un guide d'accompagnement concernant le menu végétarien hebdomadaire, obligatoire sous forme expérimentale depuis le 12 novembre 2019 en application de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGALIM) a été publié par le CNRC en juillet 2020. Il clarifie les modalités d'application de la loi, synthétise les avis d'expertise scientifique disponibles et propose des recommandations en termes de composition des menus végétariens pour assurer la qualité nutritionnelle des repas. Un livret de recettes a été publié à la suite, en octobre 2020, afin de donner des outils aux cuisiniers pour élaborer des recettes savoureuses et équilibrées. L'expérimentation du menu végétarien hebdomadaire a été pérennisée par la loi « climat et résilience » promulguée en août 2021 pour la restauration scolaire, sur la base des conclusions du rapport d'évaluation du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux qui a été transmis au Parlement le 15 mai 2021. Enfin, la formation initiale des cuisiniers est en cours d'évolution avec une révision des référentiels des diplômes de certificat d'aptitude professionnelle et de baccalauréat professionnel liés à la cuisine pour y intégrer des éléments issus du guide pédagogique « Former les cuisiniers de demain aux enjeux d'une alimentation durable », publié en juillet 2022 afin de faire évoluer cette formation initiale vers l'intégration de la diversification des sources de protéines, de la durabilité et la qualité des approvisionnements ou la lutte contre le gaspillage alimentaire. Par ailleurs, toutes les cantines gérées par l'État, les établissements publics et les entreprises publiques nationales doivent proposer une option végétarienne par jour, en cas de choix multiple. De même, les collectivités volontaires ont la possibilité, de manière expérimentale, de proposer chaque jour une option végétarienne dans le respect du cadre réglementaire en vigueur. Cette expérimentation a été évaluée dans un rapport qui est en cours de transmission au Parlement. Concernant le grand public, une campagne nationale de promotion de la consommation de légumineuses a été mise en œuvre en 2022, cofinancée par le ministère chargé de l'agriculture via le plan de Relance et par les interprofessions concernées. Cette campagne s'est déployée à destination des jeunes, de la restauration collective et des professionnels de santé. Enfin, la stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), en cours d'élaboration, donnera les orientations stratégiques de la politique de l'alimentation et de la nutrition dans les années à venir. Ces orientations seront ensuite déclinées dans le prochain programme national pour l'alimentation et le prochain programme national nutrition santé.
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