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Justine Gruet
Question N° 12289 au Ministère du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire


Question soumise le 24 octobre 2023

Mme Justine Gruet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire au sujet du projet de réforme de la législation européenne encadrant les indications géographiques (IG) des produits viticoles. Alors que les derniers trilogues sont fixés aux 10 et 24 octobre 2023, date de fin des négociations, la filière vitivinicole jurassienne (AOC Côtes du Jura, Arbois, l'Etoile, Château-Chalon, Crémant du Jura, Marc du Jura et Macvin du Jura) est inquiète devant la position de la Commission européenne qui souhaiterait externaliser l'examen des cahiers des charges à l'EUIPO, agence européenne de gestion des marques d'Alicante, avec la crainte d'une dérèglementation des outils de gestion des IG. Elle redoute également le retrait des dispositions viticoles de l'Organisation commune des marchés (OCM) et donc de la poltique agricole commune (PAC). Les cahiers des charges des vins d'appellation d'origine sont complexes et vont au-delà de la protection d'un nom ; ils contiennent des règles de production, de conditionnement, d'étiquetage et de durabilité pour lesquelles l'EUIPO n'a aucune expertise. Les IG sont donc plus que des droits de propriété intellectuelle et ne doivent pas être gérées comme des marques. L'IG est un label qui permet aux consommateurs d'identifier des produits spécifiques dont la qualité, la réputation ou d'autres caractéristiques sont liées à leur origine géographique. Cette appellation, contrairement à celles d'appellation d'origine protégée (AOP) ou d'appellation d'origine contrôlée (AOC) qui sont principalement liées au seul territoire de provenance, renvoie également à la notion de savoir-faire lié à un territoire. En conséquence, la proposition de règlement devrait préciser que l'appui technique de l'EUIPO ne concernera que l'examen des aspects qui relèvent de son domaine de compétence, c'est-à-dire la propriété intellectuelle. Ceci étant, l'EUIPO pourrait jouer un rôle important en gérant le registre de l'Union européenne, ainsi qu'un système d'information et d'alerte sur les noms de domaine, ce qui pourrait grandement contribuer à renforcer la protection des IG en ligne. Par ailleurs, la filière vitivinicole ne soutient pas la proposition de la Commission européenne de déconnecter une partie des règles relatives aux vins IG de l'OCM unique. Cela aurait pour conséquence de faire figurer certaines dispositions dans l'OCM (définition des IG, contrôles, gestion des volumes, indicateurs de prix) tandis que d'autres parties seraient insérées dans le règlement horizontal des IG (procédures, protection, groupements de producteurs). Ce serait une erreur stratégique car on ne serait plus en mesure de réviser la politique vitivinicole IG en même temps que la PAC. Elle souhaite connaître la position du Gouvernement quant à ce projet de réforme des IG sur les vins et quels sont les arguments défendus pour conserver un système exigeant et vertueux qui a permis jusqu'à présent d'améliorer les pratiques et de garantir les produits sous IG auprès des consommateurs.

Réponse émise le 26 mars 2024

La Commission européenne a publié le 31 mars 2022 une proposition de règlement relatif aux indications géographiques (IG) de l'Union européenne (UE) pour les vins, les boissons spiritueuses et les produits agricoles, et aux systèmes de qualité pour les produits agricoles. Les négociations relatives à ce texte ont abouti, le 24 octobre 2023, à une position commune dans le cadre du trilogue interinstitutionnel entre le Parlement européen, le Conseil de l'UE et la Commission européenne, validée par le Conseil à l'unanimité le 27 novembre 2023. Il résulte du texte issu de ces discussions qu'aucune tâche d'instruction n'est déléguée à l'office de l'UE pour la propriété intellectuelle (EUIPO), conformément au souhait des autorités françaises et a contrario de la proposition initiale de la Commission européenne. Ne sont finalement confiées à l'EUIPO que des tâches administratives annexes, à savoir l'invalidation des marques commerciales enregistrées en violation des règles de protection des IG, l'établissement et le maintien d'un système d'information et d'alerte sur les noms de domaine, la maintenance et la mise à jour du registre des IG. Concernant les modifications relatives aux vins, les autorités françaises ont rappelé tout au long des négociations leur attachement à la stabilité des règles relatives aux IG viticoles, et aux acquis des dernières réformes. Dans le même temps, elles sont restées ouvertes à ne pas priver le secteur viticole des avancées qui seraient obtenues dans la proposition de règlement, notamment en matière de protection. Les autorités françaises sont parvenues à obtenir le maintien des dispositions spécifiques aux IG viticoles prévues dans le règlement (UE) n° 1308/2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles concernant le contrôle du respect du cahier des charges des IG viticoles, les définitions des « appellations d'origine protégée » et des « indications géographiques protégées », des cahiers des charges et du document unique, la spécificité concernant l'homonymie avec le cépage et les boissons spiritueuses, les dénominations de vins protégées existantes, ainsi que les redevances. La proposition de la Commission européenne d'harmoniser, au sein du nouveau règlement, les procédures d'instruction des demandes et de fonctionnement des groupements de producteurs reconnus a par ailleurs semblé acceptable aux autorités françaises, dès lors que le fonctionnement du système français pouvait être maintenu. Le ministère de l'agriculture de la souveraineté alimentaire, qui est particulièrement investi dans les négociations relatives à cette proposition de règlement, suit avec une très grande attention ce sujet et fera valoir ces positions jusqu'au vote de la proposition de texte qui devrait intervenir au courant du mois de mars 2024.

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