M. Hubert Julien-Laferrière appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l'incohérence et l'imperfection des dispositions concernant la mise en place de bornes de recharge pour véhicules électriques dans les immeubles en copropriété. L'article L113-16, alinéa 1er du code de la construction et de l'habitation (issu de l'ordonnance n° 2020-71 du 29 janv. 2020 recodifiant le livre 1er du CCH) prévoit que « le propriétaire d'un bâtiment doté de places de stationnement d'accès sécurisé à usage privatif ou, en cas de copropriété, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic ne peut s'opposer sans motif sérieux et légitime à l'équipement des places de stationnement d'installations dédiées à la recharge électrique pour véhicule électrique ou hybride rechargeable et permettant un comptage individualisé des consommations, par un locataire ou occupant de bonne foi et aux frais de ce dernier ». Le législateur a donc institué un « droit à la prise » qui permet dans une copropriété à tout utilisateur de véhicule électrique de faire installer, à ses frais, une borne de recharge de son véhicule sur sa place de parking. Ce droit concerne aussi bien les propriétaires que les locataires. Depuis l'entrée en vigueur du décret n° 2020-1720 du 24 décembre 2020, qui élargit les cas d'application du droit à la prise (tandis que l'article L 111-3-8 du code de la construction et de l'habitation qui en était le support a été abrogé par l'ordonnance n° 20-71 du 29 janvier 2020), il n'en est pas néanmoins possible, en vertu du dispositif réglementaire restant applicable, pour tous les propriétaires de véhicule électrique vivant en copropriété d'invoquer ce droit. Il est donc possible sans avoir à ce stade à solliciter une autorisation de la copropriété, de faire installer un point de charge raccordé au compteur des parties communes de l'immeuble, sous réserve qu'une solution de comptage soit mise en place pour que la consommation d'électricité soit refacturée. Ce dispositif n'a toutefois de sens que dans l'hypothèse où les travaux préalables de mise aux normes de l'installation électrique permettant de lever cette réserve revêtent un caractère obligatoire pour la copropriété. Ce préalable relève en effet de la notion de travaux d'amélioration. À cet égard, à l'issue de l'adoption de la loi « Climat et Résilience » n° 2021-1104 du 22 août 2021, modifiant la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété, trois textes et deux majorités différentes sont applicables aux installations de recharge des véhicules électriques en copropriété : - par application de l'article 25 (j) relève de la majorité absolue (avec un second vote en 25-1), la décision du syndicat d'entreprendre à ses frais des travaux d'amélioration portant sur l'installation collective afin d'augmenter la puissance délivrée, pour permettre l'installation de bornes de recharge, ou plus précisément la décision concernant « l'installation ou la modification des installations électriques intérieures permettant l'alimentation des emplacements de stationnement d'accès sécurisé à usage privatif pour permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides, ainsi que la réalisation des installations de recharge électrique permettant un comptage individuel pour ces mêmes véhicules » ; Lorsque la délibération n'atteint pas la majorité des voix de tous les copropriétaires, mais que le projet a recueilli au moins le tiers de leurs voix, la même assemblée peut adopter ce projet à la majorité de l'article 24 en procédant immédiatement à un second vote (L. n° 66-557, 10 juill. 1965, art. 25-1). Si le projet n'a pas recueilli le tiers des voix de tous les copropriétaires, une nouvelle assemblée générale peut l'adopter à la majorité de l'article 24 à condition d'être convoquée dans le délai maximum de 3 mois (L. n° 66-557, 10 juill. 1965, art. 25-1, al. 2). - par application de l'article 24-5-1 nouveau, si le syndicat décide, non de réaliser ces travaux collectifs à ses frais, mais simplement de passer une convention sans frais avec un opérateur, la décision relève de l'article 24 ; - par application de l'article 24 (i), la décision d'équiper une place de stationnement d'une borne de recharge (la « décision d'équiper les places de stationnement couvertes ou d'accès sécurisé avec des bornes de recharge pour véhicules électriques ») relève de la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés. Il apparaît que les propriétaires minoritaires d'emplacements de stationnement ou de garage peuvent se heurter aux exigences de majorité récemment instituées pour les travaux collectifs préalables d'amélioration. Dans ces conditions, il paraît utile de revoir à nouveau ces dernières dispositions de manière à assurer l'effectivité du droit à la prise dans les immeubles en copropriété, afin de rendre obligatoires les travaux de mise en conformité électriques préalables à toute démarche d'installation d'une borne de recharge. Les copropriétaires pourraient alors être appelés à voter directement sur les modalités de réalisation et d'exécution de ces travaux. Il lui demande sa position sur ce sujet.
Réduire les émissions de gaz à effet de serre, la dépendance énergétique et améliorer la qualité de l'air en milieu urbain : c'est tout l'enjeu du développement des véhicules propres. L'électromobilité constitue une des priorités du Gouvernement. Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, l'État engage résolument la transition pour tous les modes de transports, notamment le développement des véhicules électriques nécessitant l'installation de bornes de recharge. L'accès à un point de recharge à domicile est un levier clé pour le développement massif de l'électromobilité et le Gouvernement a mis en place plusieurs mesures pour faciliter ces déploiements, en particulier dans les copropriétés. La loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités a renforcé et simplifié le droit à la prise permettant à tout occupant d'une place de stationnement d'installer un point de recharge à ses frais, sauf motif sérieux et légitime. Le droit à la prise est approprié pour les premiers points de recharge individuels qui représentent un impact limité sur l'installation électrique du bâtiment. À partir d'un certain nombre de points de recharge, la demande de puissance peut devenir importante et il peut être pertinent d'installer une infrastructure collective (infrastructure électrique dimensionnée en puissance pour permettre le raccordement d'un plus grand nombre de points de recharge) pour réduire les coûts d'installation et les délais de connexion des futurs points de recharge individuels. Il n'existe pas d'obligation de faire réaliser de tels travaux et, dans le cas de la copropriété, leur réalisation est soumise à une décision de l'assemblée générale des copropriétaires votée à la majorité absolue (art. 25 j de la loi du 10 juillet 1965). La possibilité de rendre obligatoire l'installation d'une infrastructure collective a été examinée dans le cadre des travaux sur le projet de loi d'orientation des mobilités. Or, cette disposition n'a pas été adoptée en raison de son atteinte forte au droit de propriété. Afin de lever cet obstacle à l'installation d'infrastructures de recharge, deux mesures ont été mises en place. D'une part, la loi d'orientation des mobilités a permis qu'un ou plusieurs copropriétaires puissent demander au syndic d'inscrire à l'ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires la question des travaux d'adaptation des installations électriques pour qu'ils soient réalisés sous la responsabilité du syndicat des copropriétaires et aux frais des seuls copropriétaires demandeurs (art. 24-5 de la loi du 10 juillet 1965). Cette délibération est adoptée à la majorité simple. D'autre part, la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets prévoit la possibilité de faire installer une infrastructure collective par un opérateur d'infrastructures de recharge ou par le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité, sans frais pour le propriétaire ou le syndicat des copropriétaires. Les coûts d'installation de l'infrastructure collective sont pré-financés par l'opérateur d'infrastructures de recharge ou le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité et sont répercutés sur les seuls utilisateurs de cette infrastructure. En effet, chaque utilisateur qui demande la création d'un ouvrage de branchement individuel alimenté par cette infrastructure collective est redevable d'une contribution au titre de l'infrastructure collective et d'une contribution au titre de l'ouvrage de branchement individuel. Ce dispositif permet de n'avoir aucun reste à charge pour la copropriété. Dans ce cas, la décision de l'assemblée générale des copropriétaires est prise à la majorité simple. Enfin, on constate que de plus en plus de décisions d'assemblées générales des copropriétaires sont favorables à l'installation d'infrastructures de recharge. Selon l'AFOR, l'association française des opérateurs de recharge, les décisions favorables à l'installation d'infrastructure déjà prises en assemblée générale de copropriété représentaient à la fin du premier trimestre 2022 plus d'un million de places de stationnement éligibles à un équipement de borne de recharge.
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