M. Philippe Fait appelle l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'expérimentation animale et la situation des élevages de chiens de Mézilles et Gannat. Selon une enquête réalisée par deux ONG, Anima au Danemark et Camp Beagle au Royaume-Uni, des milliers de chiens élevés aux États-Unis d'Amérique d'Amérique par l'entreprise d'élevage américaine Marshall BioResources seraient vendus aux laboratoires français en transitant par le Danemark. Ils seraient retenus dans des élevages à Mézilles et Gannat avant d'être remis à des laboratoires à des fins de tests. Selon les dernières statistiques du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en 2016, près de 2 millions d'animaux ont été sujets aux expérimentations des laboratoires français. En 2021, le chiffre est identique. La réglementation européenne (2010/63/UE) est pourtant claire lorsqu'elle impose aux États membres de l'Union européenne de décliner la règle des 3R (réduire, raffiner, remplacer) dans le cadre de l'expérimentation animale. Ces chiens sont soumis à des injections de produits, des prises de sang, des prélèvements de tissus, d'organes, des ponctions, des biopsies, des gavages, des tests cutanés, cardiaques et cérébraux. Les beagles et les golden retrievers sont les races privilégiées en raison de leur docilité et leur sensibilité rendant leur expérimentation d'autant plus cruelle. La Commission européenne a institué en 2015 la base de données ALURES qui prévoit de regrouper des données sur les expérimentations menées par chaque pays membre. Ces données permettent d'extraire des statistiques sur le niveau de souffrance reçu par les animaux dans ce cadre. Cependant, les laboratoires ne respecteraient pas ces exigences de transparence, ce qui compliquerait les rapports d'inspection publics permettant aux services de l'État de les contrôler, afin d'assurer l'application de la directive européenne évoquée précédemment. De plus, l'accès aux comptes rendus de visites préfectorales engagées dans ce cadre présente de réelles difficultés. Les données compilées par l'association One Voice mettent en évidence un niveau de souffrance plus élevé dans le pays pour les animaux utilisés à des fins d'expérimentation, à l'inverse des pays scandinaves comme la Finlande qui tendent à limiter au maximum les expérimentations causant trop de souffrances aux animaux. À la lumière de ces éléments, il lui demande de lui indiquer quelles mesures le Gouvernement envisage afin de limiter les souffrances infligées aux animaux utilisés à des fins d'expérimentation et de bien vouloir tout mettre en œuvre pour assurer la collecte et favoriser la transparence de ces données censées rendre compte des conditions de détention, d'exploitation et surtout d'expérimentation de ces animaux, exigée par la réglementation européenne en vigueur.
L'utilisation d'animaux à des fins scientifiques est une activité fortement réglementée. Elle n'est possible qu'après l'obtention d'un avis favorable du comité d'éthique en expérimentation animale et l'autorisation du projet par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Malgré les progrès importants des méthodes alternatives et les efforts de recherche pour remplacer le recours aux animaux, ce recours reste une nécessité scientifique comme l'a rappelé la Commission européenne (réponse du 25 juillet 2023 de la Commission européenne à l'Initiative citoyenne européenne Save cruelty free cosmetics – commit to a Europe without animal testing). Le nombre d'animaux utilisés à des fins scientifiques, entre les années 2016 et 2021, est resté stable (- 1 %). Une analyse plus détaillée montre qu'au cours de cette période, le nombre d'animaux utilisés pour des recherches liées à la conservation des espèces a augmenté d'un facteur 3, tandis que le nombre d'animaux utilisés en recherche biomédicale (recherches fondamentale, translationnelle et réglementaire) a diminué de 4 %. Effectivement, la France importe des chiens en provenance des États-Unis d'Amérique. Les données statistiques montrent qu'en 2021, 603 chiens (23 % du total de cette année) provenaient des États-Unis soit deux fois moins qu'en 2016 (1 261 chiens). Le ministère considère que la présence et le développement d'élevages de chiens sur le territoire français contribuent non seulement à l'objectif de souveraineté nationale en recherche biomédicale mais également à préserver le bien-être de ces chiens en évitant les contraintes de leur transport par avion. La réglementation impose la collecte annuelle des données statistiques relative à l'utilisation d'animaux dans des procédures expérimentales puis leur transmission à la Commission européenne. Tous les ans, les services du ministère assurent la collecte, auprès de l'intégralité des laboratoires français, des données, leur synthèse, leur transmission à la Commission européenne et leur diffusion auprès du public. Les données transmises à la Commission européenne sont également adressées à l'association One Voice citée. Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ne clôt cette enquête que lorsqu'il dispose de 100 % des réponses et veille ainsi à ce que chaque laboratoire fournisse les données prévues par la réglementation européenne. En 2021, les procédures classées au niveau sévère en France représentent 14 % pour l'ensemble des espèces et 4 % pour les chiens. Le Centre français pour les 3R (FC3R) a initié, en lien avec le Comité national de réflexion éthique en expérimentation animale (CNREEA), un travail sur ce sujet. Une analyse de ce constat est nécessaire avant de définir des mesures : l'application des critères de classements sont-ils appliqués de façon similaire par les laboratoires français et européen ? Les pratiques de recherche sont-elles différentes en France ? Le ministère apporte son appui et travaille avec le FC3R et le CNREEA sur ce constat. À la différence de la Finlande, la France a une position forte dans les domaines de la médecine humaine ou vétérinaire avec plusieurs leaders mondiaux grâce à ses nombreux laboratoires de recherche et à ses nombreuses entreprises privées dans le secteur des biotechs. Ces acteurs contribuent à la souveraineté nationale dans le domaine de la santé. Le ministère veille à ce que leurs activités soient réalisées dans le respect de la réglementation française et européenne. Cette réglementation est la plus protectrice du bien-être des animaux au niveau mondial. Par ailleurs, le ministère soutient le FC3R, notamment ses appels d'offre permettant de limiter le recours aux animaux (2022 – remplacement : alternatives aux modèles animaux et produits d'origine animale en recherche ; 2023 – approches numériques). L'utilisation justifiée et nécessaire des animaux à des fins scientifiques, la garantie de leur bien-être et le rayonnement de la recherche française sont des préoccupations majeures du ministère.
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