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Sylvain Carrière
Question N° 11921 au Ministère auprès du ministre de la transition écologique


Question soumise le 3 octobre 2023

M. Sylvain Carrière interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur le bilan de la libéralisation du fret ferroviaire sur la part modale du fret ferroviaire dans le transport de marchandises en France. Depuis 2005, par l'adoption des paquets ferroviaires, la France a entamé une déstructuration de Fret SNCF et de l'activité toute entière, notamment par l'abandon progressif de la prise en charge du wagon isolé et par extension des gares de triages, au profit d'une ouverture à la concurrence qui se concentrait par essence sur les tronçons les plus rentables. Ainsi, d'une activité capillaire et désenclavant les territoires et les nombreuses entreprises qu'ils comptent, le fret ferroviaire se concentre quasi exclusivement aujourd'hui sur le développement de transport combinés et d'autoroutes ferroviaires. Cela a eu pour effet de supprimer progressivement les cheminots de Fret SNCF. Ils étaient 50 000 à la fin du siècle dernier, ils ne sont plus que 5 000 aujourd'hui et la tendance est encore à la baisse, leur transfert vers le privé étant déjà acté dans le plan ferroviaire annoncé en mai 2023. Dans le même temps, les ministres des transports successifs depuis 6 ans promettent d'atteindre 18 % de part modale du ferroviaire dans le transport de marchandises en 2030, contre 10 % actuellement. Faire plus avec moins de moyens donc, le tout sans calendrier prévisionnel permettant de garantir ce seuil. La perte d'activités de la libéralisation du fret a entraîné le retour sur la route de plus d'un million de camions annuellement, la route étant « plus souple et à plus bas prix », selon les termes de Sylvie Charles, directrice des transports de marchandises pour Fret SNCF en 2017. Ce secteur routier, dont les coûts sociaux étaient estimés cette même année à 89 milliards d'euros annuels mais considérés comme externalités dans les prix pratiqués, est donc favorisé par rapport au fret ferroviaire, dans les prix « bruts » pratiqués aujourd'hui. Seule une massification du transport aura donc de l'avenir en suivant cette stratégie de toute concurrence basée sur les secteurs rentables, adieu donc les 40 % de l'activité dépendant des lignes capillaires. La motivation principale affichée des gouvernements ayant transposé la concurrence du fret ferroviaire dans le droit français étant d'effectuer des économies pour l'État, M. le député aimerait vérifier que les externalités, notamment le coût social du report modal du train vers le camion, ont bien été intégrées à la stratégie gouvernementale. Ainsi, dans un effort d'approche globale, il lui demande s'il peut lui transmettre les documents qui prennent en compte les coûts sociaux du transport de marchandises sur la route et sur les rails, les investissements nécessaires au maintien et au déploiement de ces activités et donc les motivations qui guident les choix du Gouvernement sur la destruction du pôle public ferroviaire qu'est Fret SNCF.

Réponse émise le 11 juin 2024

L'Etat est pleinement mobilisé pour la relance du fret ferroviaire. Dans cet objectif, la stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire, publiée en septembre 2021 et validée par décret du 18 mars 2022, est en cours de déploiement et comprend 73 mesures opérationnelles construites en partenariat étroit avec les acteurs du secteur. Dans le sillage du lancement de cette stratégie, une enveloppe budgétaire additionnelle de 170 M€ a été mise en place à partir de la loi de finances pour 2021 afin de renforcer les soutiens à l'exploitation aux services. Si la stratégie nationale de développement du fret ferroviaire prévoyait initialement le maintien de cette enveloppe supplémentaire jusqu'en 2024, son maintien jusqu'en 2030 a été annoncé en mai 2023 afin de continuer à soutenir les opérateurs fortement touchés par les crises récentes (coûts de l'énergie, mouvements sociaux début 2023), de donner de la visibilité aux acteurs pour favoriser l'investissement.  Dans le prolongement des engagements pris dans le cadre du plan de relance et des travaux menés par le conseil d'orientation des infrastructures, le Gouvernement a également annoncé, en mai 2023, un plan d'investissements de 4 Md€ dont la moitié financée par l'Etat. L'ambition est, d'ici 2032, de poursuivre la dynamique d'investissement initiée dans le cadre du plan de relance en faveur des infrastructures spécifiques aux services de fret ferroviaire. Un travail partenarial d'identification et de programmation des investissements est actuellement mené entre l'Etat, SNCF Réseau et les représentants de l'Alliance 4F.  Concernant l'avenir de Fret SNCF, à la suite de l'ouverture par la Commission européenne en janvier 2023 d'une procédure formelle sur les conditions de financement de l'entreprise, des échanges ont eu lieu entre l'Etat français et la Commission. L'Etat fait tout depuis cette date pour éviter le scénario du pire, à savoir une issue négative de la procédure qui se traduirait par l'obligation pour Fret SNCF de rembourser plus de 5 Md€. Une telle décision conduirait en effet immédiatement à la liquidation de Fret SNCF, supprimerait de nombreux emplois et remettrait plus d'un million de camions sur les routes chaque année. Plutôt que de prendre le risque – réel en cas d'inaction – de voir disparaître Fret SNCF, et à travers lui une grande partie du fret ferroviaire français, dans les mois qui viennent, la solution privilégiée est de mener une transformation de l'entreprise, qui permettra à terme que la commission européenne puisse constater l'existence d'une discontinuité économique et éteindre le risque de remboursement des 5 Md€. Cette solution garantit la préservation intégrale du cœur d'activité de fret SNCF qu'est la gestion capacitaire, clé pour le report modal et indispensable à nos territoires. Elle respecte également les trois lignes rouges que le Gouvernement s'était fixées, à savoir (i) l'absence de tout licenciement pour les statutaires comme les contractuels (100 % des emplois dans le ferroviaire sont préservés, et 90 % des emplois seront maintenus au sein de la nouvelle organisation), (ii) l'absence de privatisation (le groupe SNCF conservera la majorité du capital), et (iii) l'absence de report modal sur la route.

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