M. Bastien Lachaud interroge Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville, sur la sortie annoncée des quartiers de l'Ilot 27 et des Sept Arpents de la cartographie des quartiers prioritaires politiques de la ville. Le retrait du classement prioritaire des quartiers de l'Ilot 27 (situé sur la commune de Pantin) et des Sept Arpents (situé sur les communes de Pantin et du Pré Saint-Gervais), qui n'est pas encore officiel à ce jour, a été annoncé par la préfecture de la Seine-Saint-Denis à la municipalité de Pantin. Les motifs d'une telle décision interrogent, tant ils semblent méconnaître la réalité sociale des quartiers concernés, les difficultés et les besoins de leurs habitantes et habitants. De fait, la sortie des deux quartiers de l'Ilot 27 et des Sept Arpents de la cartographie prioritaire repose sur une étude Insee de 2019 et sur le seul critère du revenu fiscal médian. Or un tel critère méconnaît les écarts importants entre les habitants de ces quartiers, qui voient coexister des dynamiques de gentrification et d'implantation de population à plus hauts revenus d'une part, d'importantes poches de précarité et de pauvreté d'autre part. Cette appréciation erronée conduit à occulter purement et simplement la réalité des difficultés sociales que connaissent ces quartiers : 28 % d'habitantes et d'habitants vivant sous le seuil de pauvreté, 26 % d'enfants qualifiés de vulnérables sur le plan socio-éducatif, 35 % de demandeurs d'emploi de longue durée et 18 % de salariés en emploi précaire. Reposant sur une évaluation erronée, la décision de sortir l'Ilot 27 et les Sept Arpents de la liste des quartiers prioritaires politiques de la ville aurait des conséquences graves pour les habitantes et habitants. Elle se traduirait par la remise en question de politiques publiques indispensables au devenir de ces quartiers et de leur population : incertitudes sur le devenir des projets ANRU de requalification des deux quartiers, fin du programme de réussite éducative, mise en péril du classement REP (réseau d'éducation prioritaire) de l'école maternelle Eugénie Cotton à l'Ilot 27, perte de l'agrément centre social pour la maison de quartier Mairie-Ourcq, fin d'aides financières importantes pour les associations, de la TVA réduite pour les travaux de rénovation urbaine et de l'abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties et perte de 110 000 euros de dotation de solidarité urbaine (DSU) annuelle pour la municipalité de Pantin. La disparition de ces dispositifs n'aurait pour effet que d'aggraver encore davantage des difficultés sociales présentes de longue date, que l'impact de la crise sanitaire liée à la pandémie de la covid-19, les récentes révoltes urbaines et la flambée continue de l'inflation ont rendu plus aigües au cours des dernières années. Dans un contexte où le nombre de bénéficiaires des associations de solidarité a été multiplié par trois depuis 2020 dans la ville de Pantin, une telle décision serait à la fois incompréhensible, injuste et dramatique. Elle enverrait le signal d'un désengagement supplémentaire de l'État, dans un département, la Seine-Saint-Denis, le plus pauvre de France métropolitaine, qui pâtit déjà de longue date de l'abandon des pouvoirs publics et de l'insuffisance des moyens déployés, ainsi que l'a démontré le rapport parlementaire « Sur l'évaluation de l'action de l'État dans l'exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis », rendu en mai 2018 par les députés Kokouendo et Cornut-Gentille. C'est pourquoi M. le député souhaite attirer l'attention de Mme la secrétaire d'État sur la situation des quartiers de l'Ilot 27 et des Sept Arpents. Il souhaite savoir si elle confirme la décision annoncée de leur retirer le classement en quartiers prioritaires politiques de la ville. Il lui demande de renoncer à cette perspective, de maintenir les quartiers concernés dans la cartographie des quartiers prioritaires et souhaite savoir si elle serait disposée à effectuer une visite de ces quartiers afin de mieux apprécier leur réalité sociale et les besoins de leurs habitantes et habitants.
L'année 2023 est celle de la définition d'un nouveau périmètre des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), conduite dans une concertation approfondie entre les préfets de département et les élus. La carte actuelle des 1 514 quartiers prioritaires est fondée sur des critères définis à l'article 2 du décret n° 2014-767 du 3 juillet 2014 relatif à la liste nationale des quartiers prioritaires de la politique de la ville et à ses modalités particulières de détermination dans les départements métropolitains, en application de l'article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. Ces quartiers se caractérisent par un nombre minimal d'habitant (1 000) et un écart de développement économique et social par rapport au territoire national de même que les unités urbaines où ils se situent, apprécié par le revenu médian par unité de consommation. Pour la nouvelle géographie prioritaire, ces critères ont été maintenus et actualisés par l'INSEE et l'Agence Nationale de Cohésion des Territoires à partir des données de 2019. La délimitation des périmètres des quartiers proposés à l'intégration au sein de la nouvelle géographie est le fruit des concertations menées par les préfets de département avec les élus locaux. La liste des quartiers inscrits sera définie prochainement par un décret portant modification du décret n° 2014-1720 du 30 décembre 2014 fixant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans les départements métropolitains, avec une application au 1er janvier 2024. Ce nouveau zonage des QPV entend mieux tenir compte des réalités sociales des territoires, en confiant au terrain les outils pour dessiner des quartiers qui ont réel sens à l'échelle locale. Il convient de préciser que la sortie d'un quartier de la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville, si elle était confirmée pour les deux quartiers évoqués, ne signifie pas la fin de tout dispositif à son égard. L'agrément « centre social » attribué par les CAF départementales répond à des critères autres et n'est pas lié au classement QPV. La sortie d'un quartier n'impactera pas non plus le devenir des programmes de l'ANRU localement engagés et prévus. La TVA à taux réduit (5,5 % au lieu de 20 %), entendant faciliter l'accession à la propriété dans les quartiers situés en « zones ANRU » et dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, est quant à elle reconduite par l'article 10 quindicies du PLF 2024. La reconduction neutralisera les effets de bord sur les opérations passées ou engagées liés à l'entrée en vigueur de la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville. Les QPV actuels faisant l'objet d'une convention avec l'ANRU pourront, par cette mesure, continuer à bénéficier de la TVA à taux réduit, et ce jusqu'au terme du nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU) prévu au 31 décembre 2026. Outre les crédits de droit commun de l'Etat, il sera possible d'allouer, de manière circonscrite et sous l'égide du préfet de région, des moyens du programme 147 aux territoires qui n'ont pas été retenus dans la géographie prioritaire de la politique de la ville et considérés comme « poches de pauvreté ». Ce soutien sera à titre exceptionnel et devra s'inscrire dans le cadre partenarial d'un contrat de ville, ce qui serait le cas pour le ou les quartiers de Pantin concernés. Les territoires ciblés pourront se situer dans toutes les communes d'une intercommunalité en charge des contrats de ville, y compris celles ne disposant pas d'un QPV.
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