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M. François Ruffin interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie : quand va-t-il sortir le sucre à fermentation des griffes de la main invisible du marché ? M. le député a alerté M. le ministre au mois de mai 2023 à propos de la concurrence déloyale chinoise sur le marché de la lysine. L'entreprise Metex, basée à Amiens, est particulièrement concernée. Dans sa réponse publiée le 11 juillet 2023 au Journal officiel, M. le ministre a admis la chose suivante : « La dépendance de la France et de l'Europe vis-à-vis de la Chine pour la lysine est aujourd'hui une question primordiale. La lysine est un acide aminé essentiel pour l'alimentation animale et la production pharmaceutique et la perte de souveraineté de l'Europe sur cette molécule pourrait avoir des conséquences économiques et stratégiques réelles ». Mais pour prévenir ces « conséquences économiques et stratégiques réelles », que propose M. le ministre ? Pas grand-chose, à vrai dire : de « l'activité partielle », un « appel à projet du plan d'investissement France 2030 », un « guichet d'aide gaz et électricité », un « ensemble de documentation sur le site impots.gouv.fr. pour faciliter les démarches des entreprises ». Quand on en vient au fond du sujet, à savoir rétablir une concurrence plus juste, les droits de douane sur la lysine, aucune mesure n'est évoquée. Et c'est le laisser-faire qui domine, si l'on en croit ses propres explications : « La lysine fait aujourd'hui l'objet d'un droit de douane de 6,3 % à l'importation. [ ] Sur demande de plusieurs États-membres, un contingent tarifaire s'est ouvert sur la lysine depuis 2020. À ce jour, ce contingent permet d'importer 300 000 tonnes de lysine par an en exemption de droits de douane ». La production de lysine dépend du sucre, dont les cours varient fortement depuis 2017 avec la disparition des quotas sucriers. En Europe, le prix du sucre, d'abord divisé par deux, a ensuite été multiplié par quatre, atteignant les 800 euros. L'écart avec le prix mondial ne cesse de s'accroitre, à mesure que la Chine subventionne sa production et que la France, elle, la laisse entrer. Ce dumping paraît d'autant plus scandaleux qu'il a des conséquences environnementales. D'après l'Ademe, les acides aminés produits en Chine avec du maïs génèrent cinq fois plus de CO2 que ceux produits en France avec de la betterave. Pour inverser cette pente dangereuse, il faudrait un certificat CO2. Pour récompenser les entreprises utilisant le sucre de betterave, moins polluant, produit localement. C'est ce que fait Metex, évitant ainsi environ 350 000 tonnes de CO2 par an. Le ministère a écrit un rapport sur le sujet en 2018 : « Stratégie nationale bio production en France ». Leurs recommandations étaient claires : « Identifier la production d'acides aminés comme stratégique et soumis à une concurrence déloyale, revoir les conditions de tarif préférentiel établies sous le régime « General System of Préférence » du règlement UE 978/2012 et les exclure des produits à droits d'import nul ». On ne peut plus laisser les entreprises françaises comme Metex lutter à armes inégales avec leurs concurrentes chinoises. En tant qu'actionnaire de Metex via la BPI, M. le ministre doit tout mettre en œuvre pour préserver la viabilité économique de l'entreprise, de ses employés, de ses sous-traitants. Il lui demande quand il va engager une véritable négociation avec les partenaires pour sortir le sucre à fermentation de la main invisible et inopérante du marché.
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