Mme Corinne Vignon attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer, sur le projet d'arrêté du Gouvernement visant à permettre aux navires équipés de dispositif techniques actifs de réduction des captures accidentelles ou d'un système actif d'observation électronique à distance de déroger à l'obligation de fermetures spatio-temporelles des zones de pêche dans le golfe de Gascogne. Ces systèmes répulsifs acoustiques dits pingers ou « effaroucheurs » fixés sur la coque du bateau ou sur des balises sur les filets n'ont à ce jour pas prouvé leur efficacité. Peu importe qu'ils soient simples, sélectifs ou passifs, le manque de données scientifiques ne permet pas d'évaluer ces dispositifs de dissuasion de capture accidentelle. Même si les effaroucheurs semblent être efficaces dans un premier temps, il apparaît qu'un effet d'habituation des mammifères marins et des poissons s'installe. De plus, ces systèmes augmentent la pollution sonore marine et sont suspectés d'être associés à la présence de poissons. Le golfe de Gascogne est connu pour être une zone dans laquelle sont perpétrés de nombreux massacres de dauphins à répétition. 10 000 dauphins y sont tués chaque année par les engins de pêche non sélectifs. Ce taux de mortalité menace la survie de l'espèce et outre la dimension éthique liée aux enjeux du bien-être animal, cette situation est intenable pour le maintien de cet environnement. À cet effet et ce depuis 2018, le Conseil d'État a relevé un nombre trop important de décès de petits cétacés. Dans un avis du 20 mars 2023, il enjoint le Gouvernement à fermer certaines zones de pêche dans le golfe de Gascogne sous six mois et pendant un temps approprié pour notamment deux motifs. Premièrement, cette décision soulève une menace grave pour la conservation des petits cétacés. Le nombre de décès par capture accidentelle imputable aux activités de pêche menace gravement la conservation des dauphins. Deuxièmement, le Conseil d'État relève également qu'à partir des connaissances scientifiques disponibles, les dispositifs de dissuasion acoustique ne permettent pas de réduire suffisamment ces captures. Il est donc impérieux, avant d'autoriser à nouveau des navires de pêche équipés de dispositifs dissuasifs dans le golfe de Gascogne, de collecter des données scientifiques plus précises et d'effectuer un contrôle sur les effaroucheurs afin de s'assurer que ces derniers ou que d'autres dispositifs de dissuasion fonctionnent ou soient développés à partir de travaux d'observation pour mettre fin à ce massacre. Face à cette situation alarmante, cette dérogation de navigation pour les navires équipés d'effaroucheurs dans les zones de pêche dans le golfe de Gascogne accentuerait la dégradation de cet écosystème marin déjà trop fragilisé. Aussi, elle souhaite savoir si le Gouvernement entend revenir sur sa décision d'autoriser les bateaux équipés de pingers dans cette zone.
Face à l'augmentation d'échouages de cétacés, la Commission européenne a mis en demeure la France à l'été 2022 de renforcer les mesures de lutte contre les captures accidentelles. Le Gouvernement a lancé, dès septembre 2022, un plan d'urgence de 17,8 millions d'euros en ce sens. C'était la première fois qu'un plan de ce type était mis en place aussi rapidement et avec des financements publics aussi importants. Il prévoyait notamment l'équipement en dispositifs d'effarouchement, de caméras embarquées et de systèmes de suivi GPS d'environ 250 navires à des fins d'observation scientifique. Le Conseil d'État a considéré, dans son jugement du 20 mars 2023, qu'à date les actions mises en œuvre étaient insuffisantes pour réduire le nombre d'échouages sous le seuil des 5 000 captures accidentelles évaluées. Le Secrétaire d'État chargé de la mer a alors reçu, le 27 avril 2023, avec la Première ministre, les professionnels afin de préparer ensemble les suites à donner. Trois principes ont été définis : Protéger les cétacés sans déstabiliser la filière pêche. Une équité de traitement en ciblant aussi les navires étrangers. Le besoin de faire progresser la connaissance scientifique et la transparence des résultats. Des concertations de plusieurs mois avec les représentants des professionnels locaux ont été lancées ainsi qu'une consultation du public par la suite. Cinq décisions fortes ont été prises à l'issue de cette concertation : Pour la première fois en France, une large fermeture spatio-temporelle de l'activité de pêche d'une durée de 30 jours (du 22 janvier au 20 février) lors des trois prochains hivers. La fermeture couvre l'ensemble du Golfe de Gascogne, soit une très large zone (188 500 km2). L'ensemble des filets et chaluts à risque sont concernés, à savoir 600 navires. L'élargissement de l'expérimentation à grande échelle de dispositifs techniques : des pingers répulsifs fixés à la coque du navire, émettant seulement lors de la mise à l'eau du filet, des balises acoustiques sur les filets, utilisant un signal bio-inspiré et des réflecteurs acoustiques passifs sur les filets droits, permettant d'augmenter la visibilité des filets vis-à-vis des dauphins. Le renforcement de l'observation des interactions en mer : des caméras embarquées devront être installées sur les navires volontaires d'ici fin 2024. Les navires équipés de dispositifs techniques reconnus par l'État seront exemptés de la fermeture spatio-temporelle Ces mesures s'appliqueront aussi aux navires étrangers. Les déclarations des captures restent par ailleurs obligatoires et primordiales, et les contrôles seront renforcés. Ces différentes mesures et le projet de recherches scientifiques DELMOGES contribueront à mieux estimer les risques de mortalité des petits cétacés par capture accidentelle et à l'évaluation de dispositifs techniques à partir de fin 2024.
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