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Yannick Neuder
Question N° 10941 au Ministère auprès du ministre du travail


Question soumise le 22 août 2023

M. Yannick Neuder attire l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion au sujet de la baisse des niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage. M. le député a été alerté par la chambre des métiers et de l'artisanat de son territoire, les centres de formations des apprentis (CFA) et certains représentants de professions dont l'activité repose en grande partie sur les contrats d'apprentissage. En effet, au 1er septembre 2023 s'appliquera une réduction moyenne de 5 % des niveaux de prise en charge (NPEC) financière pour certaines certifications visées par contrats d'apprentissage (environ 47 % des certifications). Cette décision a été prise en conseil d'administration de France compétences du 10 juillet 2023. Cette diminution s'inscrit dans la continuité d'un premier amortissement déjà consenti en 2021 et ayant suscité une forte incompréhension. L'arrêté entérinant une nouvelle baisse des financements, s'il est pris, aura de lourdes conséquences sur la formation par apprentissage mais aussi sur les CFA et plus largement sur le secteur de l'artisanat qui maille une grande partie du tissu économique de la circonscription de M. le député. Plus généralement, les 137 CFA du réseau des CMA impactés par cette baisse généralisée et brutale forment 112 500 apprentis par an, ce qui en fait le premier formateur par apprentissage dans le pays. Au regard des enjeux concernant la formation des jeunes et le niveau de l'emploi pour nombre de métiers en tension dans l'artisanat, les évolutions budgétaires, fussent-elles à la baisse, doivent être décidées à l'aune des objectifs de la politique d'apprentissage comme de l'évaluation de ses effets réels sur l'offre et la qualité de la formation. Très concrètement, l'impact de cette baisse sur le « coût contrat » est bien plus conséquence pour des formations de l'artisanat. Par exemple pour un master en droit des affaires, ce coût passe de 8 500 euros à 8 393 euros, soit une baisse de 1,25 %, quand pour un CAP boulanger il passe de 6 683 euros à 6 015 euros, soit une baisse de 10 %. Par ailleurs, cette décision ne repose pas sur des critères de calcul qui prennent en compte les coûts supportés par les CFA, ces mêmes coûts ayant très significativement augmenté dans le contexte inflationniste qui frappe le pays. Les centres supportent des charges liées à la singularité de ces formations et de leurs besoins pour fonctionner (ateliers, lignes de production, matières premières, machines, électricité...). En l'état de la décision de baisse des niveaux de prise en charge, plusieurs des CFA situés sur le territoire devront fermer à court ou moyen matière des sections de formation, ce qui signifie très concrètement que des artisans ne seront plus formés à certains métiers et donc qu'à moyen terme des entreprises artisanales seront dans l'impossibilité d'être reprise. L'apprentissage doit demeurer un levier d'accès à l'emploi qualifié, d'intégration professionnelle et de développement économique notamment dans les territoires ruraux comme celui de M. le député où l'artisanat constitue un pilier socio-économique majeur. Par ailleurs, les intentions affichées du Gouvernement en matière de développement de l'apprentissage, doivent être suivies d'actes et de mesures concrètes pour sanctuariser les besoins des CFA dans leur mission de formation. Il lui demande donc d'envisager un l'ajournement de la baisse des NPEC des contrats d'apprentissage actuellement en préparation pour le 1er septembre 2023 et l'instauration d'une concertation sur le financement de l'apprentissage pour définir des niveaux de financement soutenables pour les acteurs et conformes une véritable stratégie de développement de l'apprentissage.

Réponse émise le 7 novembre 2023

L'apprentissage constitue une réponse efficace et concrète aux tensions de recrutement que rencontrent de nombreuses entreprises partout sur le territoire, y compris dans le secteur de l'artisanat, historiquement porté sur cette voie d'entrée dans les métiers.  Depuis 2018, le Gouvernement a considérablement favorisé son développement, en lui consacrant des moyens exceptionnels. D'abord pour les jeunes bien sûr, à travers la garantie d'une formation gratuite et de qualité, mais également pour toutes les entreprises, notamment les TPE-PME, à travers la création d'une aide à l'embauche d'alternants, qui permet de maintenir une dynamique d'entrée en apprentissage importante dans notre pays.  Conformément à la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, l'Etat, grâce à son opérateur France compétences, est chargé d'assurer un travail de régulation des niveaux de financement de l'apprentissage, afin d'en assurer la pérennité et de garantir un usage efficient des fonds mutualisés des entreprises. Ce travail de régulation repose sur l'analyse annuelle des données de la comptabilité analytique des Centres de formation d'apprentis (CFA), qui permet de déterminer les coûts réels de formation, afin d'en adapter le niveau de financement. A ce titre, il est de la responsabilité des pouvoirs publics, et notamment de la mission de régulation de France compétences, de garantir un juste niveau de financement au regard des coûts réels constatés.  La baisse des niveaux de prise en charge ne s'inscrit donc pas dans une logique stricte d'économie mais bien dans une démarche de fixation du juste prix, en responsabilité vis-à-vis de nos finances publiques.  De fait, la méthode de régulation mise en place lors de cet exercice prend en compte les effets de l'inflation (de 5,2 % en 2022 selon l'Insee), puisqu'afin de fixer sa valeur maximale recommandée, France compétences a appliqué à l'ensemble des coûts moyens de formation constatés dans les CFA et par certification, une hausse de 10 %. Aucune baisse n'est intervenue en dessous de cette valeur. A cette première garantie quant à la préservation des équilibres économiques des CFA est venue s'ajouter une seconde garantie, puisqu'il a été acté que, pour les niveaux de prise en charge définis par les branches, l'Etat n'imposerait aux branches aucune baisse au-delà de 10 % pour une formation donnée, et ce même si pour certaines formations, les écarts constatés excédaient largement ce taux. Dans le respect de ces principes, le référentiel de France compétences organise une diminution de 5% en moyenne des niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage conclus à compter du 8 septembre 2023. En complément, le Gouvernement a souhaité préserver la capacité de l'appareil de formation à former des apprentis sur les métiers transverses, sur lesquels les branches professionnelles avaient été peu nombreuses à proposer des valeurs, et auxquelles étaient appliquées les valeurs de carence, dont certaines accusaient des baisses importantes. Parce que ces métiers sont essentiels au développement économique de nombreuses entreprises [dont celles de l'artisanat], le Gouvernement a réhaussé les valeurs de carence en limitant la baisse au maximum à 10 % par rapport aux valeurs de 2022.  De surcroît, le Gouvernement est conscient que la complexité que revêt le système de régulation budgétaire de l'apprentissage ne favorise pas une prévisibilité et une stabilité optimale pour le développement de l'appareil de formation en apprentissage. C'est en ce sens que celui-ci est ouvert au dialogue avec les acteurs de l'apprentissage dont les réseaux représentants des CFA, et notamment les chambres des métiers et d'artisanat, afin d'envisager les pistes d'amélioration de ce processus. Une large consultation sera organisée en ce sens à la fin de l'année 2023.  Ainsi, le Gouvernement maintient-il son engagement majeur en faveur de l'apprentissage, tout en conduisant des mesures en faveur de la rationalisation du fonctionnement des centres de formation des apprentis qui participent à l'objectif de soutenabilité budgétaire du système de financement de l'alternance, gage de sa pérennité, avec pour objectif d'atteindre un million de nouveaux apprentis par an dans notre pays d'ici la fin du quinquennat.

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