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Pierrick Berteloot
Question N° 10891 au Ministère de la justice


Question soumise le 15 août 2023

M. Pierrick Berteloot interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les prénoms régionaux refusés à l'état civil en raison des caractères orthographiques qui n'appartiennent pas à l'alphabet romain. L'actualité française est ponctuée d'affaires de refus de prénom régionaux par l'état civil, en raison de l'emploi de caractères non autorisés. Pourtant, la défense des langues régionales est une volonté affichée de l'État. Il s'était engagé d'ailleurs le 8 février 2019 à ouvrir une réflexion sur les conditions d'intégration à l'état civil des signes régionaux. L'utilisation des signes diacritiques régionaux dans les seuls noms et prénoms des personnes mentionnés dans les actes de l'état civil pourrait donc être autorisée par décret, après une étude d'impact. Le ministère de la justice poursuit les travaux à ce sujet depuis plusieurs années maintenant, sans donner d'informations quant à leurs évolutions. Si le prénom ne doit pas être contraire à l'intérêt de l'enfant, la possibilité de préserver sa culture régionale à travers un prénom typique doit pouvoir être une possibilité pour les familles. Il lui demande donc où en est l'étude d'impact et quand l'État va publier un décret autorisant l'intégration des signes diacritiques régionaux.

Réponse émise le 24 octobre 2023

La question porte sur l'impossibilité actuelle d'intégrer les signes diacritiques régionaux dans les actes de l'état civil, et particulièrement dans les prénoms inscrits dans ces actes, et sur l'avancée des travaux du ministère de la Justice pour faire évoluer cet état du droit. En l'état, la circulaire du 23 juillet 2014 relative à l'état civil précise que les seuls signes diacritiques admis dans les actes de l'état civil sont les points, accents et cédilles tels qu'ils sont souscrits ou suscrits aux voyelles et consonnes autorisés par la langue française. Les signes diacritiques régionaux n'en font pas partie. Lors de la signature du contrat d'action publique pour la Bretagne, le 8 février 2019, le Premier ministre s'était engagé à ce que l'Etat ouvre une réflexion sur les conditions d'intégration à l'état civil de tels signes régionaux. Conscient qu'une telle réforme impliquerait d'importantes difficultés pratiques, le ministère de la Justice avait entamé une étude pour recenser toutes les adaptations nécessaires à l'intégration à l'état civil des signes diacritiques régionaux : impact sur l'ensemble des actes et démarches effectués tout au long de la vie des intéressés (affiliation à la sécurité sociale, délivrance de titres d'identité, établissement d'actes notariés, etc.). Une telle réforme impliquait également une adaptation des systèmes d'information de tous les services publics pour garantir que les personnes y soient désignées conformément à leur état civil et pour assurer qu'elles y soient reconnues. La loi n° 2021-641 du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion prévoyait cependant, en son article 9, que les signes diacritiques des langues régionales soient autorisés dans les actes de l'état civil. Or, le Conseil constitutionnel, saisi de la constitutionnalité de cette loi, a déclaré inconstitutionnel cet article 9 dans sa décision du 21 mai 2021 (décision n° 2021-818 DC). Le Conseil constitutionnel y rappelle qu'« en prévoyant que des mentions des actes de l'état civil peuvent être rédigées avec des signes diacritiques autres que ceux employés pour l'écriture de la langue française, ces dispositions reconnaissent aux particuliers un droit à l'usage d'une langue autre que le français dans leurs relations avec les administrations et les services publics ». Il conclut que les dispositions de cet article méconnaissent l'exigence selon laquelle le français est la langue de la République, consacrée à l'article 2 de la Constitution qui dispose que « le français est la langue de la République ». Cette décision a donc fait obstacle à l'intégration des signes diacritiques dans les actes de l'état civil. En conséquence, aucune modification en ce sens de la circulaire du 23 juillet 2014 précitée n'est envisagée.

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