M. Yannick Neuder attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires à propos du projet de décret modifiant l'article R. 214-1 du code de l'environnement. Ce décret prévoit de réintroduire dans la nomenclature IOTA (installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l'eau et les milieux aquatiques) la rubrique regroupant les travaux de renaturation des milieux aquatiques. M. le député a été saisi par les associations et structures regroupant les gestionnaires d'étangs, inquiets par cette modification substantielle du code de l'environnement qui menace grandement les ouvrages aquatiques, le patrimoine qui y est lié et les acteurs qui en vivent. Ce projet de décret voit le jour alors que le Conseil d'État avait annulé un autre décret pris en 2020, portant le même objectif en soumettant à un régime de déclaration, et non d'autorisation administrative, les travaux définis par arrêté du ministère charge de l'environnement ayant uniquement pour objet la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques, y compris les ouvrages nécessaires à cet objectif. Ainsi, il était permis de modifier des dizaines à des milliers de linéaire de rivière, sans que l'impact soit correctement évalué, sans qu'une concertation puisse être organisée en amont des projets de destruction ou de réaménagement. La nouvelle version du décret rétablit cette même philosophie, prétendant toujours cibler la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques. Les travaux dits « de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques » qui ne présentent pas de danger pour la sécurité publique et qui n'accroissent pas notablement le risque d'inondation sont maintenus dans le champ d'application de la déclaration globale et exclusive au titre de la nouvelle rubrique 3.3.5.0. Ce décret menace considérablement de disparition des sites faisant partie intégrante du patrimoine de nombreux territoires, comme dans la circonscription de M. le député et ses moulins, forges, plans d'eau et surtout étangs façonnant ainsi les paysages auxquels les riverains sont attachés. Par ailleurs, ce décret semble occulter un des incontournables rôles de certains de ces ouvrages comme les étangs, notamment en matière de souveraineté alimentaire. En effet, en Isère, la pisciculture s'inscrit à la fois dans un usage traditionnel des étangs mais aussi dans une perspective de régulation des écosystèmes que de nombreuses associations s'attachent à cultiver. Aussi, il souhaite que le Gouvernement puisse revenir sur l'application de ce décret aux lourdes conséquences pour les acteurs à l'œuvre pour faire vivre les plans d'eau, étangs et moulins et souhaite connaître sa position sur ce sujet.
La restauration des fonctionnalités des milieux aquatiques et des zones humides constitue une solution fondée sur la nature qui, dans un contexte de changement climatique, permet une meilleure résilience de ces milieux. Elle est également indispensable au respect des engagements de la France en matière de bon état écologique des cours d'eau : les altérations hydromorphologiques d'origine humaine sont en effet l'une des principales causes de non-atteinte des objectifs de la directive-cadre sur l'eau. Afin d'encourager la restauration des fonctionalités naturelles des cours d'eau, la procédure des travaux de renaturation a été simplifiée (régime de déclaration) avec l'introduction en 2020, de la rubrique 3.3.5.0 de la nomenclature « loi sur l'eau » annexée à l'article R.214-1 du code de l'environnement. Par plusieurs décisions du 31 octobre 2022, le Conseil d'État, sans remettre en cause les considérations relatives aux effets sur l'environnement ayant conduit à la création de cette rubrique, a considéré que certains des travaux relatifs à des ouvrages (barrages, ouvrages d'endiguement) ne pouvaient pas être soumis à simple déclaration dans le cadre de la rubrique 3.3.5.0. mais méritaient d'être soumis à autorisation environnementale en raison de leurs impacts sur la sécurité publique. Ainsi, la disposition du décret du 30 juin 2020 portant création de la rubrique 3.3.5.0 et l'arrêté du même jour définissant les travaux relevant de cette rubrique ont été annulés à compter du 1er mars 2023. Il convient de préciser que le moyen retenu par le Conseil d'État pour annuler cette rubrique est qu'elle soumet à déclaration tous les travaux ayant pour objet la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques, indépendamment des risques et dangers qu'ils sont susceptibles de présenter, méconnaissant ainsi l'article L. 214-3 du code de l'environnement. Elle ne contrevenait cependant pas à la concertation et à la conciliation systématiquement mises en œuvre par les services de l'État au niveau local, avec l'ensemble des parties prenantes concernées par le projet de restauration tel que prévu par l'article L. 214-17-1. Cependant, l'annulation de la rubrique 3.3.5.0 compléxifie significativement la mise en oeuvre de l'ensemble des projets de renaturation, alors même que la majorité de ces projets n'aggrave pas les risques d'inondations, voire les réduit : restauration de zones humides, de plaines d'inondation, reméandrage, etc. Cette décision a donc suscité l'inquiétude de porteurs de projet (dont des collectivités territoriales). Ainsi, comme annoncé par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires le 15 février, en réponse à une question de M. Hugonet, un nouveau décret a été préparé afin de rétablir un régime simplifié de déclaration pour les projets de renaturation des millieux aquatiques, tout en tenant compte des réserves du Conseil d'État. Ce projet de décret a fait l'objet d'une consultation du public du 19 avril au 11 mai 2023. Le Conseil d'État a été saisi en juillet.
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