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Valérie Bazin-Malgras
Question N° 10545 au Ministère du travail


Question soumise le 1er août 2023

Mme Valérie Bazin-Malgras attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme, sur le mode de gestion des caisses de congés payés du bâtiment et des travaux publics (BTP). Depuis 1937, le secteur du BTP dispose en effet d'un réseau de caisses qui assure la collecte des cotisations et le versement des indemnités de congés payés aux salariés, en application des principes prévus aux articles D. 3141-12 et suivants du code du travail. La raison d'être des caisses à cette époque était la forte mobilité des salariés du bâtiment bien souvent journaliers embauchés à la tâche. Centraliser les cotisations devait assurer aux salariés le versement de leurs congés à bonne date, quel que soit le temps de présence dans le dernier poste occupé. Cette affiliation est obligatoire pour toute entreprise dont l'activité principale relève du champ d'application des conventions collectives nationales du BTP, comme l'a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 16 décembre 2015. Une exception existe cependant : les salariés embauchés sous le statut d'apprentis pour lesquels le choix existe pour l'employeur soit de les déclarer à la caisse, soit, après accord de cette dernière, d'assurer lui-même le paiement des congés payés. Les cotisations dues par l'employeur sont calculées en fonction d'un pourcentage de la masse salariale mais sont fixées par chacune des seize caisses présentes sur le territoire métropolitain et en outre-mer, si bien que les niveaux des cotisations appelées peuvent différer en fonction du lieu de situation géographique des entreprises assujetties. De plus, l'objet même des CIBTP, à savoir assurer le versement des congés payés aux salariés, n'est pas respecté par les Caisses. Ces dernières évaluent à 200 millions d'euros le montant des congés payés non versés chaque année aux salariés du bâtiment et paradoxalement au regard des fondements évoqués en 1937, plus particulièrement à l'égard des salariés en mobilité. Par ailleurs, les sommes avancées chaque mois par les entreprises du bâtiment privent ces dernières d'une trésorerie annuelle de 6,9 milliards d'euros. Une somme considérable qui pénalise l'équilibre des besoins en fonds de roulement de ces entreprises dans un contexte où beaucoup d'entre elles se trouvent en extrême fragilité. Ainsi, alors que même les petites entreprises du bâtiment disposent aujourd'hui, comme l'ensemble de leurs collègues du monde entrepreneurial, des logiciels qui leur permettraient de régler elles-mêmes les congés payés de leurs salariés dans le respect du droit du travail et des accords collectifs, elle souhaite savoir si le Gouvernement entend revenir sur un dispositif qui avait toute sa place dans les années 1930, mais qui est aujourd'hui largement dénoncé.

Réponse émise le 5 septembre 2023

En application des articles L. 3141-30 et D. 3141-12 et suivants du code du travail, le service des congés payés dans le secteur du bâtiment et des travaux publics est assuré par des caisses de congés payés, constituées par les employeurs de la profession sous la forme d'associations sans but lucratif de type loi de 1901, agréées par le ministre du travail. Le réseau ainsi constitué comprend douze caisses réparties sur les territoires métropolitains et d'outre-mer, dont deux caisses à compétence nationale. La mission de contrôle et d'harmonisation du réseau est assurée par une caisse de surcompensation, le réseau des Caisses des congés et intempéries du bâtiment et des travaux publics (CIBTP). Au 31 mars 2021, le réseau comptait 209 432 entreprises adhérentes et 1 421 000 salariés bénéficiaires de congés. Ces caisses ont été instituées par le législateur compte tenu d'une certaine instabilité de l'emploi inhérente au secteur du bâtiment et des travaux publics, marqué par l'embauchage et le débauchage fréquents de travailleurs en raison du caractère saisonnier de l'activité exercée ou de l'intermittence du travail à fournir. Il apparaissait délicat, dans ces conditions, de subordonner le droit au congé des salariés de ce secteur à la condition d'un travail continu au service d'un même employeur, comme c'est le cas dans le droit commun. C'est pourquoi le législateur a prévu, dans ce secteur d'activité, un système particulier imposant la constitution de caisses de congés payés auxquelles les employeurs doivent s'affilier. Ce système permet d'une part aux caisses de se substituer aux employeurs pour le versement des indemnités de congés payés financées par des cotisations patronales et, d'autre part, aux salariés ayant été occupés chez plusieurs employeurs au cours de la période de référence de bénéficier de leur droit aux congés payés. Leur mission d'origine s'est ensuite élargie, en raison de l'implantation de leur réseau, à la collecte d'autres cotisations, telles les cotisations de chômage-intempéries ou celles pour l'organisme de prévention des risques professionnels dans le bâtiment et les travaux publics. Les caisses de congés payés garantissent aux salariés concernés, en sus du paiement de l'indemnité légale de congés payés, l'application des dispositions conventionnelles et, plus précisément, le versement des primes de vacances et d'ancienneté. Le taux de la cotisation congés payés fixé par le conseil d'administration de la caisse conformément à l'article D. 3141-29 du code du travail ne génère pas des coûts supplémentaires pour les entreprises. En effet, la fixation du taux de cotisation est déterminante pour calculer la cotisation congés payés destinée à financer le règlement des indemnités de congés payés, la prime de vacances, les jours supplémentaires pour ancienneté ou pour fractionnement, ainsi que les charges sociales afférentes. Les sommes perçues par les caisses après le recouvrement des cotisations font l'objet de placements financiers dont les produits contribuent à la couverture des charges fiscales et sociales ainsi que des avantages prévus par les conventions collectives du secteur (jours supplémentaires au titre du fractionnement et de l'ancienneté, congé pour enfant à charge, etc.). Aussi, le processus de fusion des caisses, mais également un alignement des pratiques et un rapprochement des systèmes informatiques, ont permis de diminuer l'amplitude entre les taux maximal et minimal de cotisation opérés par les caisses auprès des employeurs. Il convient en outre de préciser que le coût apparaît neutre pour les entreprises adhérentes car les frais de gestion des caisses de congés payés sont couverts par les produits des placements financiers que réalisent les caisses et ce en dépit de la baisse des taux des marchés financiers. Ainsi, les caisses sont à même d'équilibrer leur gestion en toute neutralité pour les entreprises adhérentes. Pour l'ensemble du réseau CIBTP, le coût réel des indemnités de congés bénéficiant aux salariés du bâtiment et des travaux publics (BTP) s'élève à 6,61 milliards d'euros pour un niveau de cotisations prélevées de 6,74 milliards d'euros (au 31 mars 2021). Enfin, il est à noter que la Cour de cassation et le Conseil d'Etat ont chacun eu à connaitre, respectivement en 2022 et 2023, d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative aux caisses de congés payés. Dans les deux cas, les hautes juridictions ont jugé que la question ne présentait pas un caractère sérieux, considérant notamment que l'atteinte portée au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et à la liberté d'association par le système des caisses de congés payés mise en avant par la question était justifiée et proportionnée au regard de la mission d'intérêt général confiée à ces dernières, et n'ont en conséquence pas renvoyé la question au Conseil constitutionnel. Il ressort de ces éléments que le système des caisses de congés payés est conforme à la Constitution, toujours adapté à la situation des entreprises concernées et qu'il n'engendre pas un coût financier particulier pour ces entreprises.

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