Mme Laurence Robert-Dehault interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur l'incompatibilité des législations relatives à la parité électorale avec celles consacrant le droit à l'autodétermination des personnes transgenres. Depuis le début des années 2000, les législations se multiplient pour favoriser la parité en matière électorale. La loi de 1999 relative à l'égalité entre les femmes et les hommes pose les premiers jalons de l'objectif constitutionnel d'égal accès aux femmes aux mandats électifs. La loi du 6 juin 2000 traduit concrètement cet objectif en contraignant les partis politiques à présenter un nombre égal d'hommes et de femmes pour les élections municipales, régionales, sénatoriales et européennes et en établissant des pénalités financières aux partis qui ne respectent pas la parité pour les élections législatives. Les législations relatives à la parité se répandent également à l'ensemble des pans de la société : haute fonction publique (ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 portant partie législative du code général de la fonction publique), enseignement supérieur (loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche), élections professionnelles (article 7 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi et ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales), ordres professionnels (ordonnance n° 2015-949 du 31 juillet 2015 relative à l'égal accès des femmes et des hommes au sein des ordres professionnels), etc. Ces législations ont incontestablement produit leurs effets en matière électorale et aucun parti politique ne les remet en cause. Alors qu'en 2002, 12 % des députés étaient des femmes, aujourd'hui ce nombre s'élève à 37 %. Néanmoins ces avancées semblent être remises en cause par la conjugaison de plusieurs courants dont celui des revendications des personnes transgenres. L'article 56 de la loi n° 2016-1547 de modernisation de la justice de 2016 qui crée l'article 61-5 du code civil pose des faisceaux d'indices nécessaires à l'identification du syndrome du transsexualisme. Ces indices sont le fait que la personne se présente publiquement comme appartenant au sexe revendiqué, soit connue sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel, ait obtenue le changement de son prénom afin qu'il corresponde au sexe revendiqué. L'article 61-6 va plus loin : « le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut motiver le refus de faire droit à la demande [...] ». Ainsi, afin d'entériner un changement de sexe au registre d'état civil, la loi de 2016 a substitué à l'exigence de « reconnaissance médicale » l'exigence de « reconnaissance sociale », laquelle peut évidemment fluctuer d'un environnement social à l'autre. L'absence de critère objectif dans la détermination d'un syndrome de transsexualisme comporte le risque d'amener à des dérives susceptibles d'entraîner la caducité des lois électorales en matière de parité et, en conséquence, un net recul du droit des femmes. Mme la députée aimerait savoir si, désormais, l'autodétermination par le genre prédomine par rapport à la détermination biologique par le sexe, quelle substance reste-t-il de l'esprit des évolutions législatives notamment en matière électorale ? Elle souhaiterait savoir s'il faut alors consacrer l'abandon de la parité au seul profit de l'autodétermination personnelle ? Ou confirmer que seule la référence à l'état civil de naissance sert de critère pour établir les listes électorales, conformément aux règles qui gouvernent la parité ? Par exception, l'hypothèse dans laquelle, par intervention chirurgicale et chimique, un candidat aurait changé de sexe avant l'élection, ne serait alors retenu que son état civil modifié, pour appliquer une parité de nature civile, à défaut d'être de nature biologique ; c'est-à-dire le maintien d'une division traditionnelle. Mais dans ce cas, Mme la députée souhaiterait également savoir, comment le ministre de l'intérieur a-t-il pu valider la candidature, dans la 10e circonscription du Nord, d'une « candidate » transgenre, ayant conservé ses attributs masculins et dont l'état civil n'avait manifestement pas été juridiquement modifié lors du dépôt de la candidature en préfecture, lors des dernières élections législatives de 2022 ? Pour finir, elle souhaite demander au Gouvernement s'il faut donc conclure, que subrepticement, ce dernier n'entend plus maintenir les législations relatives à la parité, en considérant que le sexe mentionné au registre d'état civil, n'a plus son rôle de marqueur puisque seule primera l'identité de genre uniquement revendiquée par le candidat dans sa profession de foi.
Dans le cadre d'élections politiques, figurent parmi les pièces à joindre à tout dépôt de candidature un certificat de nationalité, un passeport ou une carte nationale d'identité en cours de validité (article R. 128 du Code électoral). Aussi, ce sont les pièces justificatives présentées au moment du dépôt de candidature qui font foi et au regard desquelles s'appliquent les règles de parité. Ces règles ont été instaurées par la loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, qui a également prévu des sanctions financières à l'égard des partis qui ne les respecteraient pas. Toutefois, dans le cadre des élections législatives, un candidat peut présenter un remplaçant du même sexe que lui. En effet, aucune disposition n'impose que le sexe du remplaçant du candidat à ces élections soit différent de celui du candidat, ces éléments étant sans lien sur la validité des candidatures. Ainsi, dans le cas d'espèce, c'est au regard de l'état civil de la personne candidate que sa candidature a été enregistrée, son identité de genre n'entrant pas en considération, aux termes des dispositions précitées. Un éventuel changement d'état civil à la suite du dépôt d'une candidature, notamment durant la campagne électorale, n'a pas pour conséquence de remettre en cause les informations enregistrées par la préfecture. En outre, aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit aux personnes candidates de recourir auprès des électeurs à un genre différent de celui inscrit à leur état civil, de même qu'il existe la possibilité de recourir à un nom ou prénom d'usage. Enfin, en tout état de cause, la candidature d'une personne ne saurait être refusée sur le fondement de son genre, au titre notamment de l'article 225-1 du Code pénal interdisant toute distinction opérée entre les personnes physiques sur un critère subjectif, cet article faisant mention d'acte de discrimination à raison de l'identité de genre depuis la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel.
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