M. David Habib appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation économique de la filière lait de brebis. Celle-ci traverse actuellement une crise majeure et ce pour des raisons multiples, dont principalement la baisse importante de la consommation des produits à base de lait de brebis en raison du contexte d'inflation et une hausse exorbitante des charges qui n'a pu compenser la hausse du prix de vente du lait de brebis. Enfin, les épisodes de sécheresse de l'année 2022 ont entravé le renouvellement des stocks fourragers. Aujourd'hui, la rémunération des éleveurs de brebis s'est effondrée. Elle est en moyenne inférieure au Smic. Parmi les produits laitiers, les produits au lait de brebis font partie de ceux qui ont été largement délaissés au profit des produits de première nécessité. En matière de négociations commerciales, aucune revalorisation n'a été obtenue. Il faut rappeler que la filière lait de brebis emploie environ 20 000 équivalents temps plein (ETP) qu'il s'agisse de la production de lait, sa collecte, sa transmission et sa commercialisation. Dans les Pyrénées-Atlantiques, située majoritairement en zone de montagne, mais aussi parfois en plaine, la filière lait de brebis valorise les territoires, les paysages et les savoir-faire. Face à cette situation d'urgence, les professionnels demandent un soutien fort de l'État. Il en va de la pérennité de cette filière, de ses élevages et installations. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures pourraient être prises afin d'aider cette filière à traverser cette crise.
Le ministre chargé de l'agriculture suit avec attention la situation des filières agricoles et notamment celle de la filière ovine laitière, en particulier l'évolution conjointe des prix à la production et des coûts de production. Selon les indicateurs de conjoncture publiés par France Brebis Laitière, le prix du lait à teneurs réelles en matière grasse et matière protéique payé au producteur en France pour le lait de brebis a augmenté de près de 2 % sur l'ensemble de la campagne 2021-2022 (octobre 2021-septembre 2022) par rapport à la campagne précédente, à 1 056 euros (€) pour 1 000 litres. Si les données définitives de la campagne 2022-2023 ne seront connues qu'en début d'année 2024, la progression du prix du lait semble s'accentuer pour la campagne en cours (de 8 à 10 %). Selon l'institut de l'élevage (Idele), l'indice des prix d'achats des moyens de production agricole est, en lait de brebis, en hausse de 17,7 % en moyenne sur la campagne 2021-2022 par rapport à la campagne précédente et de 10,4 % en moyenne sur les huit premiers mois de la campagne 2022-2023. Dans ce contexte, selon l'Idele, les résultats courants par unité de main d'œuvre (UMO) dans le bassin de production de Roquefort sont passés en moyenne de 22 100 €/UMO en 2021 à 16 200 €/UMO en 2022 (- 27 %) ; dans le bassin des Pyrénées-Atlantiques, les résultats sont passés entre 2021 et 2022 en moyenne de 17 400 €/UMO à 12 700 €/UMO (- 27 %). Pour ces deux bassins de production, la hausse des charges n'a pas été compensée par celle du prix du lait et des autres produits (agneaux, brebis de réforme). Face à cette situation, des leviers d'amélioration durable des résultats économiques doivent être envisagés. Le Gouvernement agit sur le long terme pour améliorer les relations commerciales et renforcer la position des agriculteurs dans la chaîne de valeur. La loi du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs (EGALIM 2) permet de mieux tenir compte des coûts de production des agriculteurs grâce notamment à la prise en compte d'indicateurs de coûts et de prix et le jeu des clauses de révision automatique du prix. À l'aval, elle prévoit plusieurs mécanismes protecteurs pour les fournisseurs, notamment la non-négociabilité de la matière première agricole, la non-discrimination tarifaire, le ligne à ligne, ainsi que les clauses de révision automatique des prix tant sur les marques nationales que sur les marques de distributeurs. Ces dispositions sont cruciales dans la période actuelle de forte hausse des coûts de production des éleveurs et de la nécessaire répercussion de ces augmentations à l'aval des filières. Les négociations commerciales annuelles sur les marques nationales achevées le 1er mars 2023, second exercice d'application des dispositions de la loi EGALIM 2 concernant l'aval, ont permis de constater toute la pertinence de ces mécanismes. La loi du 30 mars 2023 tendant à renforcer l'équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs vient étoffer le dispositif législatif issu de la loi EGALIM 2. En particulier, elle prolonge jusqu'au 15 avril 2025 le relèvement du seuil de revente à perte de 10 % pour les produits agricoles et alimentaires, et jusqu'au 15 avril 2026 l'encadrement des promotions, ce qui constituait une demande forte des représentants de l'amont agricole. L'encadrement des pénalités logistiques est également renforcé. Par ailleurs, pour venir en aide aux exploitations confrontées à des hausses de charges qui dégradent leur compte d'exploitation de manière très significative, des soutiens de droit commun sont mis en œuvre par le Gouvernement (dispositif de report ou de prise en charge des cotisations sociales dues par les exploitants à la mutualité sociale agricole, dispositif d'aide à la relance de l'exploitation agricole (AREA) qui remplace depuis 2018 le dispositif Agridiff pour les éleveurs en difficulté). Les éleveurs de brebis laitières peuvent bénéficier de ces mesures dès lors qu'ils remplissent les critères d'éligibilité. Les éleveurs en production biologique (représentant près de 11 % de la collecte de lait de brebis) pourront également bénéficier du plan de soutien au secteur de l'agriculture biologique, récemment renforcé. En effet, le Gouvernement a annoncé lors du salon de l'agriculture, un plan pour l'agriculture biologique contenant des mesures de soutien d'urgence ainsi que des mesures structurelles de long terme visant à atteindre les objectifs fixés de développement de l'agriculture biologique. Pour répondre aux difficultés conjoncturelles, un fonds d'urgence initialement doté de 10 millions d'euros (M€) a été mis en place pour apporter une aide immédiate aux exploitations engagées en agriculture biologique qui sont en graves difficultés économiques et en risque de déconversion. Ce plan de soutien a été complété et renforcé le 17 mai 2023, notamment en dégageant une enveloppe de 60 M€ pour aider à résoudre les difficultés les plus urgentes des filières agricoles en agriculture biologique.
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