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Rodrigo Arenas
Question N° 10031 au Ministère de la transformation


Question soumise le 18 juillet 2023

M. Rodrigo Arenas alerte M. le ministre de la transformation et de la fonction publiques sur le caractère abusif des pratiques gouvernementales en matière de recours à des consultants extérieurs pour assurer des missions stratégiques. La Cour des comptes, dans son rapport « Le recours par l'État aux prestations intellectuelles de cabinets de conseil », pointe un certain nombre de « lacunes » graves. C'est le cas par exemple de l'appel fait à BCG - Boston Consulting Group pour constituer un « design system ». La mission principale de ce prestataire était de remplir un dossier de financement auprès du fonds pour la transformation de l'action publique, outil budgétaire pourtant créé par le Gouvernement. Pour cette simple mise en relation de deux administrations, ce groupe privé a obtenu la coquette somme de 70 380 euros. Au niveau global, les prestations informatiques ont vu leur montant tripler entre 2017 et 2021 pour atteindre près de 650 millions d'euros (constituant les trois quarts des prestations). Bien que ces dépenses ne constituent que 0,25 % des dépenses de fonctionnement de l'État, le fait que celles-ci aient triplé devrait alerter. À titre de comparaison, la DITP (direction interministérielle de la transformation publique), censée être le service de l'État à même de réaliser cette mission, ne disposait pour l'exercice 2022 que de 110 ETP, soit 9,2 millions d'euros de dépenses de personnels. Cette direction n'a quant à elle bénéficié d'une augmentation de ses dépenses de personnels que de 39 % de 2018 à 2022. Depuis le vote de la LOLF (loi organique sur les lois de finances) en 2001, un gestionnaire peut utiliser des crédits d'investissement pour une dépense d'intervention ou de fonctionnement, mais ne peut pas inventer des dépenses de personnels alors même qu'il existe des besoins. On doit interroger cette logique qui pousse les administrations à externaliser un certain nombre de services, parfois stratégiques. On devrait bien plutôt réinternaliser l'ensemble des missions stratégiques pour éviter la situation de « dépendance » de « perte de maîtrise » de l'État vis-à-vis des cabinets de conseil que la Cour des comptes pointe dans son rapport. Face à cette situation, il lui demande quand il va décider qu'à budget donné, le recrutement d'agents publics soit rendu possible et décidé au niveau opérationnel, pour éviter un usage immodéré des cabinets de conseil dans les missions relevant de l'État et de son administration.

Réponse émise le 2 janvier 2024

Le Gouvernement a fait de la réinternalisation des missions confiées à des cabinets de conseil privés l'une de ses priorités. Ce mouvement, accentué grâce à la circulaire du Premier ministre du 19 janvier 2022, fait l'objet de réflexions initiées dès 2015 par la direction des achats de l'État (DAE). En janvier 2020, la DAE a proposé lors de la conférence des achats de l'État de recourir plus souvent aux compétences internes en alternative au recours à des prestataires extérieurs. En avril 2021, dans le cadre du plan achats de l'État, il a été proposé la création d'un pôle interministériel d'achat de prestations intellectuelles à la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) et de renforcer le recours aux compétences internes de l'État, notamment en créant des emplois de consultants internes en contrepartie d'une baisse des dépenses de conseil. Le jaune budgétaire 2024 « Recours au conseil extérieur » fait état de la baisse du recours au conseil extérieur. La circulaire du Premier ministre du 19 janvier 2022 sur l'encadrement du recours par les administrations et les établissements publics aux prestations intellectuelles pose le principe d'un recours au conseil externe en dernier ressort, après avoir vérifié que des compétences internes ne pouvaient pas répondre aux besoins d'accompagnement exprimés par les administrations. Plusieurs mesures ont été prises pour permettre d'internaliser un nombre croissant de missions : Les dispositifs de contrôle interne ont été accentués dans les ministères pour permettre de vérifier que le besoin donnant lieu à un projet d'achat de prestation intellectuelle ne peut être satisfait par des ressources internes ; Les moyens de conseil interne sont en forte croissance : Les inspections et conseils généraux ont été invités à développer leur offre de conseil. Ainsi, l'IGF a vu ses effectifs augmentés de 12 ETP en 2021 et 2022 ; Les effectifs de conseil interne de la DITP ont été accrus de 25 ETP en LFI 2022 et 2023, et de 20 ETP en 2024, pour disposer d'une équipe étoffée mobilisable par l'ensemble des ministères ; Les ministères ont dégagé des ressources pour internaliser des projets et développer des équipes de conseil avec des expertises sectorielles fortes ; Une meilleure utilisation des ressources de la recherche publique est également en cours de conception. Le mouvement d'internalisation des missions de conseil externalisées s'accompagne par ailleurs de mesures pour développer les compétences des agents publics : Les formations initiales et continues de l'INSP sont profondément revues pour mieux équiper les cadres de l'État avec les compétences nécessaires à la conduite de l'action publique ; Un processus de modification des référentiels de compétences avec les délégués à l'encadrement supérieur des ministères et la DITP est en cours ; La DITP développe, au sein du campus de la transformation publique, des formations permettant aux administrations d'acquérir des compétences nouvelles : école de conseil interne, direction de projets, excellence opérationnelle, participation citoyenne, design, facilitation, coaching, co-développement, etc. Le transfert de compétence est plus systématiquement organisé. Par exemple, la DITP accompagne actuellement le ministère de l'éducation nationale dans l'internalisation des compétences en excellence opérationnelle dans le cadre d'une mission dans les services RH des rectorats. Enfin pour chacune des compétences recherchées dans les prestations intellectuelles, pour mobiliser les agents dotés des compétences ou qui y ont été formés, des communautés interministérielles sont en cours de structuration.

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