. J'ai eu la chance immense de diriger une administration qui comptait des milliers d'éducateurs et de cadres. Je connais donc bien la colère des éducateurs et la réalité du terrain. En qualité de magistrate, je mesure parfaitement la difficulté de la tâche des juges des enfants. Certains choisissent aujourd'hui d'abandonner le métier, c'est un signe auquel je suis particulièrement attentive d'une évolution négative pour des métiers autrefois attractifs.
Le Président de la République s'est déjà mobilisé lors du précédent quinquennat en faveur de la protection de l'enfance – la loi du 7 février 2022 précitée en témoigne. Toutefois, le choix de placer mon secrétariat d'État auprès de la Première ministre montre la volonté du Président de mettre le judiciaire et l'éducation nationale au cœur de la politique de protection des enfants là où mon prédécesseur s'était davantage intéressé à la santé et à la solidarité. J'ai été choisie pour trouver des solutions mais la situation n'est pas simple. Nous vivons dans une société de violence. C'est la raison pour laquelle l'éducation est centrale. Nous devons tordre le bras à l'idée selon laquelle, en matière de pornographie, la protection des données et celles de nos enfants peuvent être mises sur le même plan.
Un plan sera présenté à l'issue du comité interministériel de l'enfance qui doit se tenir le 21 novembre prochain. À cette occasion, seront définies les actions à mener à la suite du rapport de la Ciivise. Plusieurs réunions ont déjà été organisées entre les ministères. Deux préconisations formulées par le rapport ont déjà été retenues, les autres étant à l'étude : d'une part, la grande campagne de sensibilisation sur les violences sexuelles, que nous lancerons en février 2023 ; d'autre part, la création d'un dispositif d'accompagnement des professionnels confrontés à la révélation de délits sexuels. Il n'est pas facile pour des maîtresses d'école, des éducateurs, des médecins libéraux d'avoir à gérer de telles révélations.
J'ai largement évoqué l'accueil des enfants handicapés en soulignant l'importance de la pluridisciplinarité des équipes au sein desquelles les Aesh doivent trouver leur place. Nous sommes, et vous l'avez bien dit, sous forte pression à cause de la hausse des prescriptions d'accompagnement notifiées par les maisons départementales des personnes handicapées (Mdph). Nous avons réalisé de gros progrès grâce aux plateformes de diagnostic. Les enfants sont plus nombreux à être diagnostiqués donc à avoir besoin d'être accueillis. Nous devons maintenant travailler sur les long, moyen et court termes pour garantir le meilleur accompagnement. La situation reste inacceptable pour bien des enfants, il faut donc agir vite. Nous sommes pleinement mobilisés, les moyens supplémentaires en sont la preuve, mais ils ne sont pas encore arrivés jusqu'au dernier kilomètre, si cher à notre Président de la République. Le sujet sera abordé lors du comité interministériel.
En ce qui concerne la prise en charge des parents qui viennent d'outre-mer et la facilitation des démarches lorsqu'un enfant est atteint d'un cancer, il ne devrait pas y avoir de débat. Je m'engage à faire bouger les lignes autant que possible, le plus rapidement possible, tant la situation est inacceptable.
Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement, et moi avons réuni l'ensemble des associations la semaine dernière et saisi la Première ministre ainsi que le Président de la République du problème posé par la diminution du nombre de places d'hébergement d'urgence. Les chiffres sur le nombre d'enfants à la rue, même s'ils sont difficiles à établir, sont plus importants que ceux mis en avant par les associations, nous en avons bien conscience. Nous travaillons, d'une part, pour éviter la fermeture d'un trop grand nombre de places, sachant que la solution de l'hébergement d'urgence n'est jamais durable ; en outre, les hôtels auxquels nous avions eu recours pendant le covid demandent aujourd'hui à accueillir plutôt des touristes. D'autre part, nous travaillons sur la répartition sur l'ensemble du territoire des enfants, dans le respect de la vie des familles, afin de soulager certaines métropoles qui sont congestionnées. Il n'est pas simple d'éloigner les enfants des lieux où ils sont parfois suivis dans un hôpital mais cela peut leur offrir une vie meilleure grâce à des logements plus adaptés et des équipes bienveillantes pour les entourer.
Olivier Klein et moi avons créé un petit groupe de travail agile entre nos directions pour faire des propositions très concrètes d'accompagnement de certaines familles vers des territoires plus bienveillants, notamment celles comptant des enfants en grande fragilité. Il est évidemment inacceptable qu'un enfant soit à la rue en 2022.
Monsieur Bruno Studer, la concertation avec l'ensemble des acteurs du numérique s'est achevée le 6 octobre. Leurs réponses sont en cours d'exploitation par les administrations concernées. Nous devrions donc rapidement pouvoir prendre le décret. Je suis plutôt optimiste sur la possibilité d'impliquer les plateformes et l'ensemble des acteurs afin de renforcer l'impact du texte.
S'agissant des influenceurs, je ne suis pas en mesure de vous répondre. Pour éviter d'être inexacte, je préfère revenir vers vous.