. – Je viens du monde de l'artisanat, donc du monde des produits transformés ; mais j'ai à cœur de transformer les produits dans les meilleures conditions.
À ce titre, la première question est la suivante : qu'est-ce qu'un bon produit, au regard de son impact social, environnemental et nutritionnel ? Le travail, entrepris il y a vingt ans et accompli avec Pierre Weill, président de l'association Bleu Blanc Cœur, m'a conduit à mettre l'accent sur la qualité des sols, sur celle des herbages et sur le bien-être animal. L'OMS nous dit aujourd'hui que la santé globale, c'est bien cela.
Il faut commencer par savoir quel est le produit que l'on transforme. Or, dans les années soixante-dix, on a présenté le low cost comme la solution aux problèmes de pouvoir d'achat : « Renoncez à la qualité et l'on vous garantira un petit prix. » Ce fut le mariage de la carpe et du lapin, qui aboutit à une situation terrifiante : nous avions déjà la fracture sociale, nous avons désormais l'alimentation à deux vitesses. Ceux qui vont plutôt bien, ceux-là mêmes qui peuvent entendre nos discours et nos analyses, mangent plutôt bien en privilégiant les circuits courts, mais d'autres n'ont que le choix du prix. Ils n'ont droit qu'à l'ultra-transformé et à l'ultra-internationalisé. C'est la partie la plus choquante de notre alimentation, étant donné l'impact colossal de ces produits sur la santé publique.
Bien sûr, certains additifs sont utiles – ainsi, la caroube est nécessaire à l'appertisation –, mais d'autres ne servent strictement à rien. Or leur prolifération est dommageable pour la génération à venir, ne serait-ce que parce que les produits dont il s'agit nous éloignent de la commensalité et du partage des saveurs.
Ma conclusion est simple. Certains produits sont très mauvais pour la santé publique. On les connaît, qu'il s'agisse du sur-sucré, du sur-gras ou du sur-transformé. On sait les dégâts que causent les phosphates présents dans les sodas. Ces produits doivent donc être taxés, à l'instar du tabac.
En effet, pour lutter contre la mauvaise alimentation, il faut commencer par refaire des mangeurs, et le mangeur de demain se construit dans des lieux de responsabilisation, comme l'école.
Il faut apprendre aux plus jeunes à manger pour que, demain, ils fassent la différence entre un bon et un mauvais produit ; pour qu'ils ne soient pas des consommateurs, mais des mangeurs. Non seulement on protégera le vivre ensemble, mais notre société sera beaucoup moins malade.
Les nouvelles taxations permettront aussi de financer la lutte contre la sédentarité, qui, avec le manque de sommeil, a un fort impact sur l'alimentation.
Je me battrai de toutes mes forces pour défendre la formation culinaire des plus jeunes. Il y va aussi de notre agriculture : pour transformer notre agriculture, il faut modifier les modes de consommation.