Je me vois contraint de revenir sur la LPFP, puisque certains propos m'ont quelque peu surpris. J'ai passé l'âge du patriotisme d'institution, et mon sujet n'est pas tant de savoir si le Haut Conseil dispose de toutes les informations que de veiller au respect des engagements de mon pays. La France est un État de droit, qui appartient à l'ordre juridique européen, et qui doit respecter les lois organiques pour l'ordre interne et les traités pour l'ordre externe. Nous sommes un État souverain, mais nous appartenons, jusqu'à nouvel ordre, à l'Union européenne. Bruxelles n'est pas doté d'une armée de bureaucrates : c'est une institution politique agissant en fonction des traités. L'idée que la Commission européenne puisse se débrouiller seule me paraît brutale ou naïve. Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le député Guiraud, je pense que votre formulation n'est pas la bonne. Je ne plaide pas pour telle ou telle version de la loi de programmation, pour laquelle j'ai partagé différentes remarques en tant que président du Haut Conseil. Je souligne simplement que l'absence de LPFP pourrait emporter des conséquences juridiques internes et externes extrêmement préjudiciables pour notre pays, comme le non-versement des fonds européens, dont personne ne pourrait se réjouir. Comme le dit le proverbe, pacta sunt servanda, les traités doivent être respectés, et cette règle s'applique à tous en démocratie. Nous avons donc besoin d'une LPFP, dans l'intérêt du pays.
Sur le fond, je doute que l'on puisse dire que les hypothèses pour 2023 seraient renforcées. À ce stade, notre avis n'exprime aucune remise en cause, même si nous estimions la prévision de croissance quelque peu élevée. Or selon les prévisions des macroéconomistes, l'écart s'est plutôt accru depuis cinq semaines, en raison de toute une batterie de paramètres. Les incertitudes demeurent nombreuses pour 2023, à la hausse comme à la baisse. Les valeurs mobilières dépendent de l'évolution de la bourse, des transactions, avec un risque de baisse sur l'exercice 2022 largement pris en compte dans le PLF 2023.
Contrairement à ce que plusieurs d'entre vous ont souligné, les recettes de TVA ne suivent pas une tendance baissière. Leur croissance est simplement amoindrie, à hauteur de 9 % au lieu de 11 %, en lien avec des remboursements et non en raison d'une révision de la base taxable. Il ne s'agit donc pas d'un signe de faiblesse de la consommation, et nous ne tablons pas sur un amoindrissement de la demande. Le scénario macroéconomique de l'OFCE est certes différent s'agissant du pouvoir d'achat, avec moins de croissance et moins d'emplois, mais de nombreuses incertitudes pèsent encore sur ces deux paramètres. L'avenir nous dira qui a raison.
Le bouclier tarifaire sera naturellement pris en compte par la Cour des comptes, non dans le cadre d'une évaluation, sachant que cet objet est encore variable, mais sans doute dans le cadre de nos rapports. Nul doute que nous aborderons le sujet lorsque je vous présenterai, en juin, le rapport sur la situation et les perspectives sur les finances publiques. Selon les analyses existantes, le coût brut du dispositif serait de près de 40 milliards d'euros en 2022, tandis que le coût net serait amoindri de 10 milliards d'euros grâce aux reversements des entreprises du secteur des énergies renouvelables au titre du service public de l'énergie. Pour rappel, ces entreprises recevaient, en subvention, l'écart entre les prix de marché de l'électricité et les prix de référence, afin d'assurer leur rentabilité. Cette subvention s'est transformée en reversements à l'État, puisque les prix de marché dépassent les prix de référence, et ces reversements sont classés en recettes supplémentaires, réduisant ainsi le déficit à hauteur de 9,6 milliards d'euros en 2022 et 19 milliards d'euros en 2023. Il s'agit d'une analyse économique et comptable, et l'évaluation interviendra certainement un peu plus tard.
Enfin, je ne dispose d'aucune information particulière sur le sujet du nucléaire. Je suis simplement lecteur attentif de la presse, et je crois me souvenir que le président de la République avait annoncé, en fin d'année 2021, le rééquipement de la France en nucléaire, qui s'est donc traduit par un projet de loi présenté ce matin en Conseil des ministres.