La question des AESH mérite que nous y consacrions un peu de temps. Plusieurs amendements portent notamment sur leur statut.
Le projet de loi de finances prévoit 4 000 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires. Depuis 2017, le nombre d'AESH a augmenté dans des proportions importantes : 55 %. Toutefois, nous sommes confrontés à plusieurs problèmes.
Le premier concerne la grande variabilité des décisions des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) selon les départements. En 2020, par exemple, 74 % des élèves en situation de handicap bénéficiaient d'une notification d'aide individuelle dans le Finistère, contre 38 % dans la Vienne. Une instance de dialogue entre l'Assemblée des départements de France et le ministère de l'Éducation nationale a été mise en place pour harmoniser les pratiques, car on ne saurait se satisfaire de telles inégalités territoriales.
Le deuxième problème tient à l'insuffisance des capacités d'accueil dans les instituts médico-sociaux, en particulier les instituts médico-éducatifs (IME) et les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP). Pour certains enfants, le milieu ordinaire n'est pas la bonne solution, y compris avec l'accompagnement d'un AESH.
Le troisième problème concerne l'attractivité du métier d'AESH, comme en témoigne la difficulté croissante à trouver des candidats. La rémunération a pourtant progressé récemment : le décret et l'arrêté du 23 août 2021, résultats du Grenelle de l'éducation, ont introduit une nouvelle grille indiciaire, une revalorisation régulière et automatique et un avancement tous les trois ans. Qui plus est, la grille est construite sur trente ans, ce qui ouvre des perspectives de carrière. Cette grille a défini les contours d'une véritable institutionnalisation du métier d'AESH.
La revalorisation du métier passe aussi par une meilleure formation. La formation initiale prévoit 60 heures. Ce n'est pas suffisant. Le PLF pour 2023 contient des crédits destinés à la formation des AESH.
Renforcer l'attractivité de ce métier suppose d'augmenter les rémunérations. À partir de janvier 2023, les AESH, comme du reste les assistants d'éducation (AED), auront accès aux primes REP et REP+. Les décrets d'application devraient être bientôt publiés. Est-ce suffisant ? Non.
Je ne suis pas favorable au passage du temps plein à 24 heures. Il serait préférable d'augmenter la quotité de travail pour les AESH qui le souhaitent – car, pour certains, la durée de 24 heures n'est pas le résultat d'un choix. Qu'il s'agisse de l'augmentation de la quotité de travail, de la prise en compte de la pause méridienne ou encore de l'intégration du temps périscolaire, il faut travailler avec les collectivités territoriales. J'ai eu à gérer ce genre de problèmes lorsque j'étais maire.
Il faut envisager la création d'un contrat unique émanant de l'Éducation nationale mais prévoyant un conventionnement avec la collectivité territoriale et un reversement effectué par cette dernière en direction de l'Éducation nationale pour la prise en charge de la pause méridienne. Le ministre, entendu hier soir, a laissé la porte ouverte en ce qui concerne l'augmentation du temps de travail sur le temps scolaire, et pas seulement sur le temps périscolaire, avec des missions plus larges, relevant de la vie scolaire et de l'inclusion, ou encore du soutien aux enseignants et aux directeurs d'école.
Faut-il aller jusqu'à la création d'un corps ? La question reste ouverte. Je considère qu'elle ne saurait être réglée par voie d'amendement dans le cadre du PLF. Elle doit faire l'objet d'une réflexion globale sur le métier d'AESH, avec en ligne de mire l'augmentation de la quotité de travail pour ceux qui le souhaitent.
Il importe également de dépasser la question de l'accompagnement individuel. En effet, on peut se demander si la seule solution pour que l'école soit inclusive passe par l'accompagnement de chaque élève par un AESH. Doit-on envisager, dans certaines conditions, de rattacher des AESH non pas à des enfants mais à des établissements ? Doit-on renforcer les mutualisations qui ont commencé à être mises en place avec les pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial) ? Au fond, l'inclusion scolaire n'est pas seulement une question de gestion des individus : c'est une question plus globale.
L'école inclusive ne se réduit pas forcément à la place de l'AESH dans le système scolaire. C'est ce que nous avons retenu de nos échanges avec l'Institut national supérieur de formation et de recherche pour l'éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés. C'est ce que dit Nicolas Eglin, président de la Fédération nationale des associations au service des élèves présentant une situation de handicap. L'accompagnement n'est qu'un des facteurs de l'école inclusive ; ce n'est ni le seul ni le premier. Des études menées au Royaume-Uni concernant les teaching assistants, qui ont été très largement déployés autour des personnes en situation de handicap, montrent que les élèves accompagnés individuellement ne réussissent pas mieux que ceux bénéficiant de l'aide d'un accompagnant qui s'occupe globalement de l'inclusion au sein de la classe ; parfois même, ils réussissent moins bien.
La question est fondamentale, passionnante, elle fait l'objet d'études et de recherches à l'université et conduit à se pencher plus globalement sur la place des AESH. Je ne crois pas que nous puissions résoudre tous ces problèmes au détour d'un amendement dans le PLF. Avis défavorable.