Je regrette que l'actualisation de la loi de programmation militaire, souhaitée par le Président de la République, ne suscite pas davantage de débats au regard de l'instabilité du contexte mondial. Alors qu'il convient d'arrêter des choix stratégiques, comme notre appartenance à l'Otan, les décisions seront prises dans l'intimité. De même, la tenue régulière d'auditions à huis clos pose un problème. Si les informations relatives à la défense sont confidentielles, est-il pertinent d'user d'un tel procédé à l'endroit de députés qui représentent le peuple ?
Notre groupe salue la progression du budget mais les fameux 3 milliards d'euros supplémentaires promis ne sont pas au rendez-vous. Ce budget ne tient pas compte de l'inflation, estimée à 4,2 % en 2023. Ne serait-ce que pour leur préparation opérationnelle, nos forces seront durement affectées. Le budget est par ailleurs amputé des 357 millions d'euros nécessaires à la revalorisation de l'indice de la fonction publique. Ces coûts supplémentaires auraient dû s'ajouter aux crédits et non s'y fondre.
Les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation ne cessent de faiblir. Pourquoi ne pas pérenniser le budget et affecter les sommes non dépensées du fait de la disparition de certains anciens combattants, à d'autres actions ? Nous proposerons des amendements en ce sens, pour améliorer la prise en charge des blessés psychiques ou étendre la reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins victimes de barbaries durant la deuxième guerre mondiale et les orphelins de parents incorporés de force et exécutés.
Alors que le ministre annonce le doublement des effectifs de la réserve opérationnelle, aucune mesure n'est prise en ce sens dans le budget pour 2023. Les 1 500 créations nettes de postes civils, notamment dans le renseignement ou la cyberdéfense, sont salutaires mais comment renforcerez-vous les effectifs opérationnels envoyés sur les théâtres d'opérations ? Nous ne pouvons que nous inquiéter des conséquences de l'insuffisance des capacités et des cessions pour la disponibilité de nos matériels. Par rapport au contrat opérationnel, la disponibilité des canons de 155 millimètres passe de 90 % à 58 %. Dans la chasse, celle des appareils passe à 69 %. Dans l'armée de l'air, seuls 65 % des objectifs d'intervention prévus par le contrat opérationnel ont été atteints. Quelles seront les conséquences de la cession d'une partie de nos lance-roquettes unitaires ? Nous ne remettons pas en question ces livraisons et ces cessions mais nous devons rester vigilants.
Concernant les fonds marins, les 3,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et les 3,1 millions d'euros en crédits de paiement ne sont pas à la hauteur de l'enjeu que représente la maîtrise des fonds marins. Agissons dès maintenant en augmentant les crédits.
Pour ce qui est de l'espace, le projet de loi prévoit 702 millions d'euros de crédits de paiement en 2023, soit une augmentation de 10 % par rapport à l'année précédente. C'est louable mais certains défis sont oubliés, comme la météo spatiale et les débris, qui sont les principaux responsables de la dégradation de nos équipements.
Enfin, nous vous proposons de créer un nouveau programme, consacré à la transition énergétique et écologique. Le ministère a publié une stratégie Climat et défense, en avril dernier. Remplacer 150 chaudières qui représentent 10 % du parc, notifier deux contrats de performance énergétique, c'est bien, mais est-ce suffisant pour répondre au défi du dérèglement climatique ? Il est temps d'accélérer. Nous devons réfléchir à l'après-pétrole. Nous sommes bien conscients de la difficulté de s'approvisionner en biocarburants mais promettre que les avions utiliseront 1 % de carburant biojet en 2023 ne suffira pas.
Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons lors du vote de ce budget qui, malgré tout, va dans le bon sens.