Monsieur le rapporteur, vous affirmez que la France s'est montrée à la hauteur de son histoire et de ses valeurs dans l'accueil qu'elle a réservé aux déplacés ukrainiens. Un constat en découle : quand la volonté politique est là, nous pouvons être à la hauteur des défis. Mais sommes-nous réellement à la hauteur quand nous tendons une main aux déplacés ukrainiens tout en brandissant la matraque contre les autres réfugiés ? Sommes-nous réellement à la hauteur quand des familles avec enfants en bas âge doivent dormir dans la rue faute de places d'hébergement, dans l'irrespect le plus total des obligations de la France en matière de droits humains ? C'est le cas dans ma circonscription, au Mans, où la préfecture met en avant la non-vulnérabilité des enfants de plus de trois ans dormant à la rue.
Le projet de budget joue sur les effets d'annonce inhumains, masquant bien mal ses fondements sécuritaires. Certes, les bleus budgétaires annoncent fièrement la création de 5 900 places d'hébergement mais on peut s'interroger sur l'application réelle de cette mesure quand on sait que seules 900 nouvelles places avaient vu le jour sur les 4 900 prévues dans le projet de loi de finances pour 2022. Ces annonces cachent difficilement l'absence d'une politique d'accueil digne et humaniste. Ainsi, votre rapport se garde bien de noter la diminution de 176,3 millions d'euros de la dotation pour l'allocation pour demandeur d'asile. Il omet également de mentionner la diminution de 3 % des crédits de l'action Garantir l'exercice du droit d'asile.
Au contraire, c'est une approche sécuritaire que le Gouvernement poursuit, au mépris de ses engagements en matière de droits humains. La Cour européenne des droits de l'Homme a condamné la France à neuf reprises pour avoir enfermé des mineurs dans des centres de rétention administrative. Les associations dénoncent l'allongement de la durée de la rétention administrative, l'insalubrité, la promiscuité, la surpopulation et les mauvais traitements subis par les personnes enfermées dans ces centres. Qu'importe : le Gouvernement s'entête et annonce un plan d'ouverture de places en CRA et investit 52,2 millions d'euros dans des lieux de privation de liberté.
Les crédits de la mission Immigration, asile et intégration reflètent la compromission de ce Gouvernement face aux idées du Rassemblement national. Non, nous ne pouvons pas dire que la France est à la hauteur de ses valeurs quand le Gouvernement entretient les fantasmes de l'extrême droite sur une immigration massive, alors que la plupart des flux de migration ont lieu au sein des pays du Sud. Non, le Gouvernement n'est pas à la hauteur quand il opère un tri au sein des personnes que nous accueillons. Non, il n'est pas à la hauteur quand il annonce un projet de loi sur le droit d'asile pour début 2023 et ouvre la porte à une débauche de xénophobie, comme ce fut le cas lors des débats sur la loi « asile et immigration » de 2018.
Nous rejetons cette approche fondée sur les coups de com' et la course folle au sécuritaire. Nous réclamons une approche humaniste, solidaire et réaliste. Sans surprise, le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale votera contre les crédits alloués à la mission Immigration, asile et intégration.