L'examen de ce programme relatif aux transports est un révélateur de ce qu'est la Macronie : une équipe de technocrates sans vision, sans créativité, sans conscience des priorités ni des urgences et, surtout, sans conscience du réel.
Je vous demande pardon de ne jamais souscrire à vos très macroniens « c'est plus compliqué que ça ». Je vais prendre un exemple liminaire qui me tient à cœur. Alors que 30 000 ouvrages d'art, notamment des ponts, sont délabrés, et donc potentiellement dangereux pour la vie des usagers, alors que les petites collectivités n'ont pas les moyens de procéder à leur lourd entretien parce que vous les avez délaissées, et alors que le Sénat vous avait d'ailleurs demandé en 2019 de créer un fonds spécial de 120 millions par an pour ce sujet stratégique, car il touche à la sécurité des Français et à la qualité de nos infrastructures, que faites-vous pour 2023 ? Un plan Vélo à 250 millions. On a les priorités qu'on veut. Dans quel monde vivez-vous ? Ce petit exemple illustre votre préférence pour les artéfacts idéologiques plutôt que pour l'intérêt national.
La France a basculé en dix ans du premier au dix-huitième rang des pays ayant les routes les mieux entretenues au monde : le temps presse pour éviter la tiers-mondisation de notre pays en la matière. Nos routes secondaires sont dans un état effroyable. Le budget de l'État devrait financer un plan massif, avec les collectivités territoriales, qui gèrent et entretiennent plus de 90 % des voiries.
Monsieur le ministre délégué chargé des transports, au lieu de conclure des contrats État-région technostructurels, lancez, avec les préfets, une grande consultation des 35 000 maires de France sur l'état des routes. En six mois, vous connaîtrez la réalité du terrain et vous pourrez créer un fonds d'urgence et définir un plan stratégique pour rendre à la France la qualité de ses routes. Si vous avez versé 300 millions d'aides pour le covid, vous pouvez le faire. Nous voulons vous aider, dites-nous quand on commence.
J'en viens au transport ferroviaire. Quand je me promène à la campagne et que je contemple ces emprises de voies ferrées fermées pour des motifs de logique comptable, je pense à tous ces voyageurs populaires qui empruntaient chaque jour ces lignes pour aller travailler. Vous voulez interdire à ces personnes de prendre leur voiture, après avoir supprimé leur train. Votre transition écologique est punitive à l'égard des automobilistes, alors qu'ils n'ont plus l'alternative des petites lignes. À la fin du compte, en retournant le problème dans tous les sens, aucune cohérence, aucune logique, aucune vision ne se dégage de votre budget pour les transports. J'aime cette phrase de Michel Audiard : « On est gouvernés par des lascars qui fixent le prix de la betterave et qui ne sauraient pas faire pousser des radis. »