Notre collègue Christine Arrighi ayant évoqué les transports terrestres, je vais de mon côté consacrer mon intervention au transport aérien. Je serai brève sur les crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA), qui retracent les moyens dont dispose la direction générale de l'aviation civile (DGAC) pour remplir ses missions de sécurité du transport aérien. Les investissements du BACEA dans la navigation aérienne se poursuivent, dont quelques-uns auront un impact environnemental positif mais insuffisant au vu des perspectives de trafic.
En effet, l'année 2022 esquisse le retour à une situation comparable à celle antérieure à la crise sanitaire concernant les niveaux de trafic du transport aérien. En France, le trafic de passagers en juillet 2022 a atteint 84 % du niveau de juillet 2019. La crise sanitaire ne semble ainsi pas avoir eu d'effet durable significatif sur la baisse du transport aérien. Cette persistance rend d'autant plus nécessaire la limitation de l'impact environnemental de l'aviation. Je rappelle que l'avion émet 145 grammes de dioxyde de carbone (CO
Pourtant, vous ne le faites pas. Notre collègue Christine Arrighi a expliqué à quel point les transports ferroviaires souffrent de sous-investissements. À l'inverse, le transport aérien est, lui, largement soutenu. Certes, le taux minimal d'incorporation de bio-carburants est relevé par le projet de loi de finances (PLF) à 1,5 % en 2024 et les tarifs en cas de non-atteinte de l'objectif augmentent de 34 %, mais la fiscalité demeure très favorable au transport aérien. Je rappelle que le kérosène utilisé comme carburant par le transport aérien commercial n'est pas taxé, même pour les vols nationaux alors que rien n'empêcherait de le faire. Les billets d'avion pour les vols intérieurs bénéficient du taux réduit de TVA à 10 %, comme les billets de train, alors que ce transport est largement préférable d'un point de vue environnemental, et les billets d'avion pour les vols internationaux sont quant à eux exonérés de TVA.
Dans le même temps, vous refusez de baisser le taux de TVA sur les billets de train alors qu'il s'agissait d'une proposition de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). Il serait souhaitable, à l'inverse, de baisser la TVA sur les billets de train en finançant cette mesure par une hausse de la TVA sur les billets d'avion. La taxe de solidarité sur les billets d'avion, dont une partie finance l'Afitf, est quant à elle à un niveau très bas, parfois seulement 1,13 euro par billet, ce qui ne permettra même pas d'atteindre le plafond d'affectation de l'Afitf en 2023 : 163 millions d'euros sur 230 millions. Là encore, il faut l'augmenter pour permettre à l'Afitf de financer des investissements dans le ferroviaire, le vélo, le fluvial et la marche.
Même pour aider les riverains des aéroports à vivre dans des conditions acceptables, la fiscalité du transport aérien n'est pas à la hauteur. Les ressources issues de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) ne seront que de 37 millions d'euros en 2022 quand l'Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA), dont nous avons auditionné plusieurs représentants, estime à 700 millions d'euros sur cinq ans les besoins de financement.
Votre unique stratégie pour limiter l'impact environnemental du transport aérien consiste à miser sur les biocarburants en finançant la recherche en la matière, alors que les biocarburants – même si l'on mise sur ceux de deuxième génération qui n'entrent pas en concurrence avec les productions alimentaires – sont convoités par de multiples secteurs et ne seront jamais produits en quantités suffisantes pour couvrir tous ces besoins.
La seule possibilité pour limiter l'impact environnemental du transport aérien est de limiter le nombre de vols, ce qui suppose de déployer une fiscalité dissuasive et de développer les solutions alternatives de mobilité durable. Les liaisons en train à l'échelon européen, qui supposent un investissement de l'ordre de 500 millions d'euros dans l'ERTMS, proposent une solution alternative concrète à l'avion, de même que les RER métropolitains, qui nécessitent 1 milliard d'euros d'investissement pour chacune des treize métropoles françaises, offrent une solution alternative concrète à la voiture. Je regrette que cette stratégie ne soit pas la vôtre, et que vous continuiez à financer la fiscalité avantageuse dont bénéficie l'avion, au détriment de solutions durables qui sont l'avenir des transports.