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Intervention de Steve Chailloux

Séance en hémicycle du jeudi 27 octobre 2022 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2023 — Défense ; anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSteve Chailloux :

Nous sommes réunis ce soir pour discuter du premier budget de la 16e législature, et l'analyse des crédits alloués à la mission "Défense" ainsi qu'à la mission "Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation" , permet d'établir un double constat.

Le premier est édifiant : le projet de loi de finances pour 2023 s'inscrit dans la continuité des précédents. Il respecte, pour la cinquième fois, la trajectoire budgétaire tracée par la loi de programmation militaire en 2019. Cette dernière prévoyait un budget s'élevant à 44 milliards d'euros en 2023 : l'objectif est atteint. Il convient de se réjouir des efforts accomplis et de saluer cet exemple de conformité. Néanmoins, le temps n'est pas aux réjouissances et le second constat de cette analyse, au regard du contexte géopolitique actuel, est plus qu'inquiétant : la guerre frappe de nouveau le continent européen, avec une violence jamais observée depuis la seconde guerre mondiale. La réponse formulée par la France à travers ce budget révèle qu'elle est prise de court, perturbée par l'ampleur de l'événement.

Afin de préserver la France d'une quelconque extension du conflit ukrainien, le Gouvernement présente un budget d'attaque, camouflé en budget de défense, un budget qui montre une répartition discutable des crédits et qui se désintéresse de ceux qui se sont battus hier pour défendre notre mode de vie d'aujourd'hui ; bref, un budget motivé par une vision politique absconse.

Les crédits mobilisés en vue de renforcer la dissuasion nucléaire s'élèvent à 5,6 milliards, somme exagérément élevée pour financer une arme de destruction massive qui sert la mort au lieu de servir la paix, et qui est davantage encline à alimenter des velléités de guerre qu'à les éviter. Ces crédits pourraient être mobilisés en faveur de la paix et pour financer des secteurs dans lesquels la France est en retard : je pense à l'espace, devenu au fil du temps un far west dans lequel la présence française est négligeable, ou à l'incapacité, pour l'armée française, de résister aux attaques chimiques ou radiologiques, compte tenu de notre vide capacitaire en la matière. Bref, il serait plus judicieux d'investir ces sommes afin de rendre notre armée indépendante.

Les crédits du programme 146 du budget de la défense sont également en forte augmentation, passant de 17 milliards d'autorisations d'engagement en 2022 à 23,5 milliards en 2023, soit une augmentation de 38 % : c'est là, sans doute, le fruit d'une prise de conscience de la nécessité de doter notre armée d'équipements et de matériels corrects.

Cette dépense aurait pu être évitée si la France avait fait le choix d'une industrie publique de l'armement. Or il est malheureux de constater qu'à cause de sa privatisation progressive ces dernières années, cette industrie est gangrenée par un mercantilisme défaillant qui nuit à la France comme à l'armée française. Engluée dans une logique de rentabilité, elle produit en quantité massive des armes et des équipements militaires vendus à ceux qui peuvent en payer le prix, y compris à des pays où les libertés fondamentales n'existent pas. Quelle ironie, pour le pays des droits de l'homme, de voir les armes qu'il commercialise utilisées dans des conflits qu'il dénonce !

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