Parce qu'elle porte sur les actions concrètes rendues possibles par le vote du budget, la seconde partie de la loi de finances nous permet d'aborder la réalité concrète de nos politiques publiques. Le programme 146 que nous examinons, ce sont les Rafale équipés de missiles ; ce sont les avions ravitailleurs qui, dans les heures qui ont suivi l'agression de l'Ukraine, ont décollé de la base de Mont-de-Marsan pour des missions de police du ciel en Pologne ; ce sont les avions-cargos qui, dans le même temps, ont transporté matériels et munitions en Roumanie pour le bataillon Aigle ; c'est le groupe aéronaval composé du porte-avions, de frégates multimissions, de frégates à capacité aérienne renforcée et d'avions de patrouille maritime ; ce sont nos sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de la force océanique stratégique (FOST) et nos aéronefs des forces aériennes stratégiques (FAS), qui assurent la posture permanente de dissuasion nucléaire ; ce sont les véhicules blindés du programme Scorpion engagés dans la lutte contre les groupes armés terroristes en bande sahélo-saharienne.
Ce que nous examinons à l'instant, mes chers collègues, c'est le programme budgétaire qui assure leur financement. Ce programme s'inscrit dans le cadre d'une loi de programmation militaire respectée à l'euro près depuis 2019, ce qui est un fait inédit depuis des décennies.
La modernisation des équipements de nos forces armées est au cœur de l'ambition portée par la loi de programmation militaire. Depuis 2017, les crédits du programme 146 sont passés de 10 à 15,4 milliards d'euros. Au total, ce programme représente plus de 35 % des crédits de l'ensemble de la mission "Défense" . Pour 2023, ce budget poursuit et accélère le renouvellement de l'ensemble de nos capacités. Il contribue au renouvellement de nos capacités de dissuasion, avec les travaux en cours sur les futurs missiles nucléaires ou le sous-marin nucléaire de troisième génération. Il renforce nos capacités de combat, avec pour 2023 la commande de 42 nouveaux Rafale, la création d'une brigade interarmes Scorpion d'ici à la fin de l'année, la livraison du second sous-marin nucléaire d'attaque de type Barracuda ou encore la poursuite des travaux préparatoires du porte-avions de nouvelle génération.
Il modernise nos capacités de commandement, de communication et de renseignement avec le lancement en 2023 du satellite de télécommunications et du troisième satellite d'observation ou encore les travaux sur les successeurs de l'avion radar Awacs – Airborne Warning And Control System, ou système de détection et de commandement aéroporté –, que j'ai eu l'honneur de voir sur la base aérienne 702 Avord. Enfin, il amplifie nos capacités de projection, avec par exemple le renouvellement de notre flotte de transport tactique et stratégique, qui offre une capacité d'élongation inédite à notre armée de l'air et de l'espace.
Au-delà de la poursuite des grands programmes structurants, les crédits prévus pour 2023 tiennent naturellement compte du contexte stratégique que nous connaissons. Un effort particulier est ainsi prévu à hauteur de 2 milliards en autorisations d'engagement sur la nécessaire reconstitution de nos stocks de munitions – missiles moyenne portée pour l'armée de terre, missiles Exocet pour la marine, missiles Aster pour le système de défense aérien ou encore missiles Scalp-EG – Système de croisière conventionnel autonome à longue portée-Emploi général.
Mes chers collègues, l'examen du programme nous donne également l'occasion d'évoquer les coopérations européennes. Ces coopérations ont évidemment du sens : sur le plan opérationnel en favorisant l'interopérabilité, sur le plan financier en réduisant les coûts et en permettant de les partager. Notre première responsabilité est donc de tout faire pour concrétiser ces coopérations.
En revanche, ne soyons pas naïfs face aux difficultés rencontrées. Notre volontarisme ne doit pas nous conduire à ignorer les risques d'échec des coopérations engagées, a fortiori lorsqu'elles se heurtent à des blocages qui se multiplient. Tout plan A doit être assorti d'un plan B, et je retiens des contacts établis dans le cadre de cette mission budgétaire que nos industriels et nos états-majors en ont pleinement conscience.
Mes chers collègues, l'efficacité de notre défense passe par des moyens renforcés, par une lucidité de tous les instants et par un état d'esprit d'unité et de responsabilité. Au début de mon propos, j'évoquais le caractère concret de notre exercice. Ayons conscience du poids de nos choix : s'opposer à ce programme, ce serait nous condamner à voir nos avions cloués au sol, nos armements non renouvelés, notre dissuasion amoindrie et, en fin de compte, alors que la guerre frappe le sol européen, notre défense affaiblie.