À l'heure où certains se gargarisent de la commande de nouveaux Rafale prévue en 2023, il me semble également important de rappeler que cette commande ne permettra pas même d'atteindre l'Ambition 2030 prévue par la LPM. En 2030, l'armée de l'air et de l'espace disposera de 159 Rafale, alors que l'Ambition 2030 prévue par la LPM en prévoyait 185. Cet objectif ne sera donc pas atteint alors même qu'il est aujourd'hui insuffisant, notamment parce qu'il a été établi dans un contexte stratégique où la question de l'attrition de nos avions ne se posait pas, contrairement à aujourd'hui.
J'ai évoqué l'aviation de chasse, mais j'aurais aussi bien pu vous détailler le manque d'équipements de nos avions, le faible stock de munitions, ou encore l'état de certaines infrastructures de vie sur les bases aériennes, qui ne sont pas dignes du niveau d'engagement et de dévouement de nos aviateurs, auxquels je souhaite rendre hommage.
Voilà la vérité derrière les chiffres. Comprenez-moi bien : il ne s'agit pas de nier les efforts qui ont été faits dans le cadre de l'actuelle LPM, qui a mis un terme à des décennies de déflation – et c'est heureux. Mais ne nous voilons pas la face, car nous avons un devoir de vérité et d'alerte sur la situation de nos armées. Cette exigence de vérité, nous la devons à nos soldats, qui ont décidé de consacrer leur vie à nous défendre, souvent au prix de nombreux sacrifices. Nous la devons à nos concitoyens. Nous la devons à nos enfants.
La vérité, en l'occurrence, c'est que cette LPM n'est pas suffisante pour nous donner les capacités de durer dans un conflit de haute intensité. C'est la raison pour laquelle j'en appelle à un véritable sursaut capacitaire à l'occasion de la prochaine LPM. Celle-ci devra revoir le format de nos flottes et de leurs équipements, mais aussi combler nos lacunes capacitaires, mises en exergue par le Retex – retour d'expérience – Ukraine : je pense par exemple aux capacités de destruction des défenses antiaériennes ennemies.
J'espère aussi que la prochaine LPM sera l'occasion de tirer les conséquences de l'échec de la coopération sur le Scaf – système de combat aérien du futur. Nous savons faire de façon autonome des sous-marins nucléaires et des porte-avions. De la même manière, nous saurons construire le système de combat aérien du futur. Osons le pari de l'autonomie stratégique !
Monsieur le ministre, vous évoquez à juste titre la nécessaire mise en place d'une « économie de guerre », mais ce que le contexte exige, c'est avant tout un budget de guerre.