Vous devez être identifié pour donner une opinion sur cet élement

Intervention de Alexis Jolly

Séance en hémicycle du jeudi 27 octobre 2022 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Défense ; anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Jolly, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères :

Depuis le début de la guerre en Ukraine, nous assistons au retour des conflits de haute intensité en Europe. Dans un contexte si tendu, seule une stratégie de remontée en puissance forte et durable permettra à nos armées de se préparer aux futurs conflits.

Pour appuyer l'armée ukrainienne, notre pays a fourni du matériel, du carburant et des formations aux soldats ukrainiens. Nous participons par ailleurs très activement à l'effort de guerre de l'Otan en Europe centrale et orientale, en projetant à l'Est des capacités militaires toujours plus nombreuses. Un tel appui engendre évidemment des surcoûts importants, du fait des cessions de matériel militaire français – qui devra être remplacé – à l'armée ukrainienne et du renforcement des effectifs sur le flanc est. À cela s'ajoutent les surcoûts des opérations extérieures et des missions intérieures, la réorganisation du dispositif Barkhane hors du territoire malien, la stabilité du dispositif Chammal et, bien entendu, des surcoûts considérables liés à l'augmentation du prix des énergies.

Les deux premières décennies du XXIe siècle ont été marquées par une forte diminution des moyens des armées françaises, alors que le niveau de menace a augmenté sur la même période. Le ministère des armées a perdu 63 250 emplois entre 2008 et 2019, soit 20 % de ses effectifs. Entre 2003 et 2020, le nombre de chars Leclerc est passé de 406 à 222, celui des avions de combat de 393 à 261 et celui des frégates de premier rang de 17 à 15 – en comptant les frégates de type La Fayette, dont les capacités sont pourtant limitées.

Cet affaiblissement des ressources matérielles s'est aussi traduit par une diminution des ambitions : la loi relative à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 envisageait que, dans le cadre d'une opération classique majeure en coopération avec nos alliés, l'intervention de la France se traduirait par l'envoi de 50 000 soldats et d'une centaine d'avions de combat. Dix ans plus tard, la LPM 2014-2019 a réduit la participation à une telle opération à seulement 15 000 soldats et 45 avions de combat. Ainsi, après des années d'une détérioration des capacités de notre armée – injustifiée au vu du contexte international –, la hausse des moyens prévue par la LPM pour les années 2019 à 2025 était tout simplement inévitable et même vitale pour la préservation des intérêts français.

Elle n'en reste pas moins insuffisante. En effet, la dernière LPM ne prévoit la création que de 6 000 emplois supplémentaires, un nombre très modeste qui ne compense que 10 % des effectifs supprimés depuis vingt ans. Nos armées manquent de cadres, d'unités élémentaires de combat et, parfois, de spécialistes : le niveau de recrutement actuel étant trop modeste pour permettre l'engagement sur plusieurs théâtres d'opérations, un effort soutenu de recrutement doit donc être engagé dans la durée.

Parlons clairement : notre armée est à l'os, et l'ensemble des cadres comme des soldats peuvent en attester. La valeur et la qualité de nos troupes font honneur à la France, et je profite de l'occasion qui m'est donnée pour rendre ici un hommage appuyé à nos hommes, qui exercent leur mission de soldat avec courage, dans un contexte financier et matériel beaucoup trop restreint.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion